Le donatisme nouveau

Ainsi, l’évêque Bernard Fellay, supérieur de la Fraternité Saint-Pie X déclare que le pape François est un authentique moderniste et qu’avec lui « la situation de l’Eglise est un vrai désastre, et ce pape est en train de la rendre 10.000 fois pire ».« Si le pape actuel continue comme il a commencé, il va diviser l’Eglise. Il fait tout exploser. Les gens vont finir par dire: c’est impossible qu’il soit le pape, nous ne voulons pas de lui. […] Il provoque la colère. Bien des gens seront découragés parce que certains membres de l’Eglise seront tentés de la rejeter en bloc ».

J’y pensais en rentrant ce soir de la première soirée Nightfever au cœur de la ville de Liège. Organisée par le chemin neuf, l’emmanuel, les jésuites, salésiens, dominicains, paroisses… elle rassembla de nombreux jeunes. Au programme: témoignage et exhortation du nouvel évêque, louange, adoration eucharistique, confessions,… D’où ma question: « Mgr Fellay, où est le fléau qui fera exploser l’Eglise? » Vous me faites vraiment penser aux donatistes – ces rigoristes africains qui, au IVe siècle, refusaient de reconnaître la validité des sacrements délivrés par les évêques qui avaient failli lors de la persécution de Dioclétien. Ils se présentaient comme les seuls « vrais, purs et durs »… Ils ont fini nécrosés. J’en appelle à votre responsabilité d’évêque: « Qui est source de division? Où donc conduisez-vous votre troupeau? »

Je ne me réjouis pas de vous voir ainsi vous embourber dans le schisme. Me reviennent les paroles de saint Augustin face aux donatistes (sermon sur le Psaume 32): « Les donatistes qui disent : « Vous n’êtes pas nos frères » nous traitent donc de païens (remplacer « païens » par « modernistes »). C’est pourquoi ils veulent nous rebaptiser (dans ce cas-ci: nous imposer comme seule valide, la liturgie pré-Vatican II), car ils affirment que nous n’avons pas ce qu’ils nous donnent. De là découle leur erreur, de nier que nous ne soyons leurs frères. Mais pourquoi le Prophète nous a-t-il dit : Vous leur répondrez : « Vous êtes nos frères » sinon parce que nous reconnaissons en eux le baptême que nous ne réitérons pas. Eux donc, en ne reconnaissant pas notre baptême, nient que nous soyons leurs frères ; nous, en ne réitérant pas sur eux, mais en reconnaissant le nôtre, nous leur disons : « Vous êtes nos frères ! »

15 réflexions sur « Le donatisme nouveau »

  1. Je suis très heureux de votre prise de position. Le point de vue du représentant de la « fraternité » m’avait sidéré. Dans l’instant, je n’ai pas pu vivre votre élan de sagesse qui parvient, malgré l’insulte, à y voir un élan de fraternité.

  2. Enfin, la page des discussions avec la fraternité Saint Pie X visant à son retour est tournée. L’opération conçue avec les meilleures intentions n’aurait jamais dû démarrer à mon sens. J’espère maintenant que les membres de la fraternité Saint Pie X cesseront de se définir en opposition à Vatican II et son application et qu’ils approfondiront leur propre spiritualité. Respectons-les et demandons leur d’essayer de faire de même.

  3. Les excès des traditionalistes ne sont-ils pas la conséquence d’errements doctrinaux et liturgiques qui n’ont plus rien à voir avec la foi de l’Eglise? Oui à la liturgie issue de Vatican II, non aux pseudo-liturgies inventées par des clercs en état d’ébriété métaphysique.
    Jean-Pierre Snyers (jpsnyers.blogspot.com)

      1. Monsieur de Stoop, les mots ont leur importance car ils véhiculent un sens. Il ne s’agit pas de participer avec amour à UNE liturgie ‘ISSUE » de Vatican II, mais bien de LA liturgie DE Vatican II. La première n’est qu’une parmi de nombreuses variantes dues à des célébrants plus ou moins éclairés (et souvent moins que plus), la seconde est celle du Missel à laquelle chaque fidèle à droit. Rien de plus, rien de moins. Le reste vient du Mauvais!

  4. Nous avons reçu Dennis Gira mardi soir à la librairie diocésaine de Tournai. Un homme d’exception et son livre « Le dialogue à la portée de tous…ou presque ». Il serait un cadeau précieux à certains; encore faudrait-il qu’ils soient capables de dialoguer!

  5. Frapper un homme à terre. Empoisonner un malade. Critiquer celui que tous méprisent. Se montrer ouvert en disant que celui-là est fermé. Se battre pour défendre l’opinion que tous partagent déjà. Retourner le couteau dans la plaie de l’homme blessé. Refuser de le comprendre parce qu’il ne me comprend pas. S’acharner sur la brebis galeuse déjà expulsée, s’opposer à son retour.

    « Nous prêchons l’oecuménisme, et nous nous séparons toujours davantage les uns des autres. Nous cherchons à creuser des abîmes au lieu de les colmater. Comment cela a-t-il pu se produire ? Une puissance adverse est intervenue dont le nom est le diable. »
    Pape Paul VI, Rome, homélie du 29 juin 1972
    « Predichiamo l’ecumenismo e ci distacchiamo sempre di più dagli altri. Cerchiamo di scavare abissi invece di colmarli.
    Come è avvenuto questo? Il Papa confida ai presenti un suo pensiero: che ci sia stato l’intervento di un potere avverso. Il suo nome è il diavolo »
    OMELIA DI PAOLO VI Solennità dei Santi Apostoli Pietro e Paolo
    Giovedì, 29 giugno 1972
    Vive le Pape !

    1. Cher « Pourquoi » (?), votre réaction est tellement à l’opposé de l’esprit que ce blog essaie de développer, que j’en reste pantois. Si vous prenez la peine de me lire, jamais – je dis bien JAMAIS – en trois années de rédaction de ce blog, n’ai-je critiqué les tentatives de rapprochement entre le Vatican et la Fraternité S. Pie X. Mais je ne pouvais laisser passer les dernières réactions de Mgr Fellay, sans faire la comparaison théologique avec l’attitude des Donatistes. En fait, pareille image m’est venue avec insistance devant le Saint-Sacrement. Cela ne signifie pas qu’elle soit infaillible, mais – bon sang – où voyez-vous que je frappe un homme à terre? (soupir)

      1. Il y a deux lectures possibles.

        Une de ces deux lectures est que les « impurs », ce sont les picinquistes et les « purs » fidèles à la tradition authentique les vadicandeuistes

        Et l’autre lecture est la lecture inverse : les impurs sont les sédevacantistes et les purs les adeptes lefévristes de l’Eglise de toujours

        Qui vous dit que traitant d’hérétique vos adversaires, vous ne faites pas ce que faisaient jadis les donatistes : ostraciser. Vous me direz que les autres font de même…

        Soit : vous seriez tout autant « donatistes », « puriste » l’un que l’autre…

        me vient aussi ceci : si vous tenez pour « donatistes » les lefébristes, vous sous-entendez qu’ils sont par trop intransigeants envers des apostats repentis… Plaçant leur intransigeance au-dessus de la communion

        mais ce faisant vous cautionnez en réalité leur thèse au sinet du apostasie vaticandeuiste…

  6. Lucifer était un « pur et dur » : il n’a pas accepté l’abaissement de Dieu dans la chair. D’où sa révolte personnelle suivie de la rébellion du « tiers des étoiles »… Le premier schisme avait un père : celui du mensonge, celui de l’orgueil.

  7. La FSSPX reconnaît tout-à-fait la validité des Sacrements de l’Église.
    Sa position doctrinale et son attitude globale sont évidemment critiquables. Encore faudrait-il le faire avec des arguments véridiques (il y en a), et avec bon esprit.

    1. Ce que je pense, c’est que pour faire du bon travail œcuménique, il faut d’abord respecter l’autre pour ce qu’il est. La Fraternité St Pie X est née du refus de la déclaration de Vatican II sur la liberté religieuse (un des textes qui me plaisait le plus). Lui proposer de revenir dans l’Eglise catholique en acceptant tout Vatican II, c’était lui demander de se renier. Bien sûr, les conversions en masse sont toujours possibles mais il faut s’en assurer très discrètement donc sans que le monde entier puisse le savoir. De l’autre côté, penser qu’on va pouvoir rejoindre l’Eglise catholique en choisissant à la carte dans le menu Vatican II, c’est ne pas prendre le concile au sérieux. Donc, je suis très content que cette phase s’achève. Maintenant que souhaiterais-je? D’abord que l’on reconnaisse mutuellement sa bonne foi et son droit à l’existence. Cela veut par exemple dire aller à l’occasion prier dans un lieu de culte des uns et des autres (pour être entré quelques fois dans l’église de la fraternité à Bruxelles, je reconnais qu’il faut parfois ne pas regarder les publications proposées). Puis se demander s’il n’y a pas des malentendus, en revenant sur l’histoire du développement doctrinal qui a conduit du syllabus à la déclaration. Alors on peut, si tout va bien, opérer un rapprochement où chacun trouve son compte. Catholiques et Luthériens l’ont fait pour la doctrine de la justification, et les méthodistes ont accepté le document produit.

  8. Sans connaître très bien cette fraternité, je voudrais juste dire que le Pape François est un espoir et une grande chance pour l’Eglise et pour tous les catholiques. Son discours est toujours franc, direct et intelligible pour tout le monde.

    Je suis heureuse chaque fois que je vois ces gestes d’ouverture et surtout la façon dont il s’arrête pour embrasser une personne handicapée; c’est un grand cœur et si quelqu’un a pu me ramener « dans le giron de l’église », c’est bien lui !

  9. @ Jean-Pierre Snyers: comme disait Louis Bouyer: « Chaque manifestation de progressisme délirant donne un coup de pompe à l’intégrisme. » (in « La décomposition du catholicisme », Editions Aubier-Monatigne, 1968, p.78). Il vous rejoint donc entièrement, et ce dès 1968!

  10. moi aussi je suis pour l’oecumenisme mon pere mais finalement cela pousse les cathos a se renier
    car les autres ne font jamais de concession
    pour ma part 3choses ne sont pas negociables
    1 la virginite perpetuelle 2 la maternite divine 3l’immaculee conception

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