Massacre à la tronçonneuse… – 26° dimanche, Année B

 « Celui qui n’est pas contre nous, est pour nous ». (Marc 9, 38-48)

Jésus offre parfois un portrait bien contrasté. Dans l’évangile de ce dimanche, le Fils de l’homme tient des propos d’une sévérité inouïe : « Celui qui entraînera la chute d’un de ces petits (…) qu’on le jette à la mer. Si ta main t’entraîne au péché, coupe-la (…) Si ton pied t’entraîne au péché, coupe-le (…) Si ton œil t’entraîne au péché, arrache-le… » Prenons ces paroles à la lettre et la vie chrétienne se transformera bien vite en un « massacre à la tronçonneuse », qui laissera nombre d’entre nous borgne et manchot. Pourtant, un peu plus tôt dans l’évangile, le même Jésus fait preuve d’une grande mansuétude : « Celui qui vous donnera un verre d’eau (…) ne restera pas sans récompense ».  Comment comprendre pareil changement de ton? Le Christ utilise le langage des rabbins de son époque. Comme eux, Il force parfois le trait. Non pas pour nous arracher mains et pieds, mais pour avertir que le mal n’est pas qu’une innocente question de faiblesse humaine. En effet, le péché ne corrompt pas que nos membres, mais l’humain tout entier. Surtout quand ce mal s’en prend aux plus faibles (pensons aux souffrances des victimes de la pédophilie). Par contre, ajoute le Christ, celui qui fait un peu de bien – ne fut-ce qu’offrir verre d’eau – rachète bien des péchés. Et cela vaut même pour les plus grands criminels. Car si le mal étouffe notre humanité, le bien – lui – dit notre condition de créature de Dieu. Que l’on soit chrétien ou non :  « Celui qui n’est pas contre nous, est pour nous ».

La Cité critique

Devoir d’enquête
Remarquable « Devoir d’enquête » ce mercredi soir à « La Une » (RTBF-TV) sur Michelle Martin. Le magazine de société présenté par Malika Attar a su dégager un portrait de l’ex-épouse de Marc Dutroux tout en nuance. L’énormité de ses actes ne fut pas gommée, mais par la mise en perspective de son parcours de vie, la personnalité de la « femme la plus détestée de Belgique » reçut de l’épaisseur. J’ai été particulièrement impressionné par la réaction de maître Jean-Philippe Rivière, l’avocat de Sabine Dardenne – une des victimes survivantes de Marc Dutroux. Il regrette que Michelle Martin ait été libérée à ce stade de sa détention, mais dit respecter les décisions de justice – à commencer par celle des jurés, qui n’ont pas condamné cette femme à perpétuité. Vivre en démocrate, implique de respecter des décisions judiciaires que l’on n’aurait peut-être pas prises soi-même… Merci, Maître Rivière, de nous le rappeler.

Partenaires avant d’être adversaires
Il y a quelques jours, j’ai reçu un communiqué du Centre d’Action Laïque (CAL) en date du 15 septembre, regrettant que le projet de durcissement de la législation sur la libération conditionnelle soit porté dans la précipitation, dans la foulée de « l’affaire Martin »: « ce projet de réforme s’écarte d’une conception humaine de la justice et de la société ».  Je ne connais pas assez le dossier pour me prononcer. Cependant, je souligne que maître Rivière s’est exprimé de la même façon au cours de l’émission que je viens d’évoquer.
Voilà bien un sujet de société où toutes les traditions philosophiques pourraient collaborer. Ce 22 septembre dernier, le CAL organisait un grand remue-méninge appelé « la Cité critique ». Un invité inattendu se trouvait au milieu de la foule laïque: Mgr Léonard. L’archevêque ne s’est pas converti au libre-examen, mais il venait écouter et s’instruire. Ce faisant, il souligne que – pour édifier la « cité critique » – croyants de religions diverses et laïques sont partenaires avant d’être adversaires. Des oppositions demeurent et il ne s’agit pas de transiger dans le débat sur diverses questions éthiques. Mais, tout comme il y eut jadis collaboration face au drame des sans-papiers, la législation sur la libération conditionnelle pourrait justifier une position commune des cultes et de la laïcité, qui fasse avancer le débat public vers « une conception humaine de la justice et de la société ».

Le prix des cultes et de la laïcité
Ceci m’amène à souligner que – sans exclure des adaptations – le régime de financement belge des cultes et de la laïcité, est imprégné d’une certaine sagesse. Le système allemand et autrichien est celui de l’impôt du culte. Avec pour corollaire l’exclusion des services d’Eglise de tous ceux qui ne paient pas. Les évêques allemands l’ont récemment rappelé sous une huée de critiques. Pourtant, c’est le propre de la logique du système: c’est en payant son obole qu’un citoyen dans ces pays marque son adhésion à une Eglise. Voilà pourquoi, je n’ai jamais été partisan de l’introduction d’un tel système en Belgique. Le système italien (et espagnol, dans une moindre mesure) est celui du référendum religieux: le citoyen vote pour attribuer sa part d’impôt dédicacé. Cela me semble déjà plus praticable, mais avec pour dégât collatéral de mettre les cultes en concurrence. Le système de non-financement public, oblige – quant à lui – les cultes à se financer par d’autres voies. Cela peut être délicat pour assurer leur indépendance par rapport à des mécènes fortunés et pas forcément désintéressés. Le système belge pense le financement des cultes et de la laïcité un peu comme une magistrature. La « magistrature du sens » (religions reconnues et laïcité) reçoit un salaire fixe de l’état. Ceci assure aux ministres du culte et aux conseillers laïques une autonomie financière, afin de garantir qu’ils exercent leur fonction sans être soumis à des influences parasites. Je ne dis pas que ce système est idéal, mais je le trouve adapté à notre pays.

 

Jaloux, moi ? – 25° dimanche, Année B

 « Sur la route, ils avaient discuté entre eux pour savoir qui était le plus grand ». (Marc 9, 30-37)

Déjà dans la cour d’école, le besoin de se démarquer nous chatouille. Qui ne s’est jamais vanté que : « Mon papa a une plus grosse bagnole que le tien » ?  Et tout au long de la vie, la tentation d’être au centre des attentions tenaille. Chacun rêve à sa manière d’être la reine du bal, le manager de l’année, la tête de liste politique, le médaillé d’or, etc. La recherche d’excellence n’est pas mauvaise en soi – que du contraire. A condition de se réjouir de l’excellence du voisin. Vouloir être performant – fort bien. Ne pas accepter qu’un autre le soit tout autant, voire bien davantage – cela est problématique. Saine émulation ne rime pas avec jalousie.

La jalousie est un sentiment omniprésent en l’homme. Et pourtant, peu le reconnaissent. Rare est celui qui confesse : « oui, il m’arrive d’être envieux ».  Contemplons les disciples de Jésus : « Sur la route, ils avaient discuté entre eux pour savoir qui était le plus grand ». Alors le Christ, prenant un enfant, leur enseigne que le plus grand est celui qui accueille les plus petits ; que le premier est celui qui prend la place du serviteur. Même parmi les baptisés, pareil enseignement n’a jamais été évident. C’est ce qu’illustre l’épître de saint Jacques : « Vous êtes jaloux et vous n’arrivez pas à vos fins, alors vous entrez en conflit et vous faites la guerre ». (Jacques 4, 2) Malgré cela, une petite voix nous murmure à la conscience : « Jaloux, moi ? Jamais de la vie. L’autre, je ne dis pas… Mais pas moi, moi, moi… » 

Droit au blasphème… et langue de bois – La Libre p.52-53

Interrogé hier par ‘La Libre’ sur l’affaire ‘Charlie Hebdo’, l’interview est paru dans le quotidien de ce jour en p.53 à côté de l’avis de Maître Dermagne. Vous pouvez lire cet échange en allant sur le site du journal et participer au débat. Il y a déjà 104 commentaires…

J’épingle un avis, signé « Adriatique »:  » Eric de Beukelaer fait des progrès remarquables dans la langue de bois et le politiquement correct. Il aurait un succès fou dans un numéro de contortionnisme ». Ma réponse: « Cher Monsieur ou Madame Adriatique, Je suis de ceux qui pensent que la nuance est amie de la vérité et alliée du bon-sens ».

Et puisque je suis adepte des nuances, j’en ajoute une par rapport à mes propos tels qu’ils ont été repris par le quotidien. Il s’agit de la phrase:« Récemment, en France, il y a eu cette œuvre d’un crucifix plongé dans de l’urine. Personnellement, je ne suis pas du genre à vite m’émouvoir, mais je n’ai pas trouvé cela du meilleur goût. A un moment donné, quelqu’un a cassé l’œuvre. Je pense que c’était regrettable mais il faut parfois comprendre que la liberté de l’artiste suscite des réactions qui se justifient parce qu’on n’a pas eu le respect nécessaire ». Le mot en gras n’est pas adéquat. Rien ne justifie un acte de vandalisme. Je lui préfère: « qui s’expliquent ». Mais d’aucuns diront que je ne fais que m’enfoncer dans la langue de bois…

 

La dernière anarchie… Etat d’âme – Dimanche p.2

L’hebdomadaire ‘Dimanche’ a publié en p.2  ma chronique « état d’âme ». Merci à la rédaction de m’offrir cet espace d’expression:

Il y a un plusieurs années d’ici, un prêtre frondeur flamand écrivit un pamphlet intitulé « Eglise – la dernière dictature ». La presse se fit un plaisir de demander au porte-parole néerlandophone de la conférence épiscopale : « que pensez-vous du titre ? » Avec un large sourire, ce laïc – père et grand-père – répondit : « Cela fait 15 ans que je sers les évêques. Si un jour je dois écrire un tel livre, je l’intitulerai : Eglise – la dernière anarchie ». Ce que mon confrère de l’époque voulait exprimer et que nombre de nos compatriotes ignorent, c’est que l’Eglise catholique est loin d’être une structure pyramidale « top-bottom » ; une institution où toute décision part du sommet pour aboutir à la « base ». Elle est un peuple de baptisés – oui, avec une hiérarchie pastorale (pape, évêques, curés…) – mais également dotée d’innombrables communautés s’organisant selon une dynamique spirituelle propre. Ainsi les consacrés (moines, moniales et religieux en tous genres), groupes de prières et communautés nouvelles.

Il y a quelques jours, je lisais l’interview d’un papa d’une victime de Marc Dutroux . A propos des sœurs de Malonne – l’homme déclara avec conviction : « J’en suis sûr, elles n’ont pas voté ensemble « on va prendre Martin ». Ça se passe plus haut. On ne me fera jamais croire que le clergé et plus haut n’ont pas donné leur avis ». (Le Soir, 8 septembre p.29) Avis erroné – je suis en mesure de l’affirmer. Les Clarisses ont pris la décision d’accueillir Michelle Martin en âme et conscience et sans recevoir d’injonction de quiconque. Cela n’étonnera que ceux qui s’imaginent un catholicisme hiératique et pyramidal. Les habitués de l’Eglise – eux – comprennent. Ils connaissent la séculaire autonomie du monde religieux par rapport aux évêques. Les Clarisses se sont inscrites dans cette tradition et ont pris leurs responsabilités. C’est d’autant plus courageux. Eglise – la dernière anarchie… Qui s’en plaindra ?

Un messie peut en cacher un autre – 24° dimanche, Année B

« Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ». (Marc 8, 27-35)

Jésus est entouré de disciples depuis plusieurs mois déjà. Autour d’eux, les ragots vont bon train : qui est ce rabbi qui parle et agit avec autorité et fait des guérisons surprenantes ? Une réincarnation de Jean le Baptiste ? d’Elie ? d’un des grands prophètes d’autrefois ? Alors le Maître les prend à l’écart et leur pose la question dans le blanc des yeux : « Pour vous qui suis-je ? » Pierre se fait le porte-parole des autres et proclame avec assurance : « Tu es le Messie ».

Bonne réponse…mais demie-vérité : de quel genre de messie s’agit-il ? A partir de ce moment-là, Jésus leur annonce sa passion. Là, Pierre n’est plus d’accord. Si Dieu est tout-puissant, son Elu ne peut être que victorieux. Le prenant à part, le futur prince des apôtres « se mit à lui faire de vifs reproches ». En clair: il engueule Jésus. Alors le Maître le remet publiquement à sa place : « Passe derrière moi tentateur ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ».

Rien n’a vraiment changé : les foules rêvent d’un Messie qui change le monde, alors que Dieu envoie son Fils convertir les cœurs. Le Christ ne promet pas des lendemains qui chantent, mais une vie digne des enfants de Dieu. Chemin exigeant, s’il en est : « Si quelqu’un veut marcher derrière moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive ».

« Effata ! » – 23° dimanche, Année B

 « Il fait entendre les sourds et parler les muets ». (Marc 7, 31-37)

Dans l’Evangile de ce dimanche, Jésus guérit un sourd-muet avec un peu de salive et une parole étonnante, citée pour cette raison en version originale: « Effata ! », c’est-à-dire « ouvre-toi ». Jésus n’a pas guéri tous les sourds-muets de son époque. Par son geste, Il fait comprendre qu’Il vient délivrer l’homme de sa surdité et de son mutisme spirituel. Le dicton énonce avec justesse : « Il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre ». Et de fait, quand on me demande quel est mon pire défaut, je réponds que c’est sans doute celui dont je n’ai pas encore conscience. Tant que je le nie, mon péché me domine et me rend aveugle, sourd et muet. Je me contente d’objecter avec véhémence : « mais non, je ne suis pas comme ça ! » Par contre, le jour où je prends conscience de ce travers – je « vois » mon défaut, « j’entends » les reproches de mon entourage, « j’exprime » une demande de pardon. Vous l’aurez compris : Jésus n’est pas là pour nous conforter dans le sentiment que nous sommes des « gens biens ». Il n’a pas, non plus, pour mission de nous reprocher que nous sommes des « vauriens ». Non, Il vient à notre rencontre par l’Esprit et dit : « Ouvre ton cœur. Afin que tes oreilles entendent ce que tu n’entendais pas et que ta langue exprime ce qu’elle n’arrivait pas à dire ». « Effata !ouvre-toi ».

Les catholiques et la politique aux USA

Jean-Paul Marthoz en p.14 du quotidien le Soir de ce jour attire l’attention sur les Catholiques aux USA. L’article souligne à quel point ceux-ci sont désormais pleinement intégrés à la vie politique, comme le démontre la présence des deux candidats à la vice-présidence. Un réel changement par rapport aux années ’30, où les catholiques avaient une mentalité d’Underdog (souvent justifiée) les faisant osciller entre soutien au parti économiquement progressiste (le New Deal de Roosevelt) et repli identitaire (l’Union Nationale pour la justice sociale, dirigée par le prêtre Coughlin). Une situation – somme toute – quelque peu comparable avec celle de nombre d’immigrés récents chez nous.

Ce que l’article ne mentionne pas, c’est que le cardinal Timothy Dolan, archevêque de New-York et figure de proue du catholicisme américain, fut sollicité pour prier aux conventions républicaines et démocrates…. Ce qu’il fit, à l’instar de différents pasteurs et rabbins. On imagine difficilement les partis politiques belges demandant une bénédiction à l’archevêque de Malines-Bruxelles et à d’autres leaders religieux. Comme quoi la culture politique diffère des deux côtés de l’Atlantique.

Blog: bilan du mois d’août

Ce blog a été ouvert le 11 mars 2011. En mars, il recevait 1467 visites et 2383 pages avaient été vues. Du 3 avril au 3 mai, il recevait 3689 visites et 5483 pages étaient visionnées ; du 1er mai au 31 mai 3322 visites et 5626 pages visionnées. Du 1er juin au 31 juin, le blog a reçu 3464 visites et 5721 pages furent visionnées. La fréquentation baissa durant les vacances, car le blog – aussi – pris du repos. Pour le mois de septembre 4423 visites sont enregistrées et 6683 pages sont visionnées. En octobre, il y eut 3027 visites pour 4689 pages visionnées. En novembre, il y eut 2679 visites pour 3915 pages visionnées. En décembre, 3203 visites pour 4754 pages visionnées. En janvier, 3143 visites pour 4815 pages visionnées. En février, cela donne 3709 visites pour 5501 pages visionnées. En mars, il y eut 3592 visites et 5530 pages visitées. En avril, il y eut 4063 visites pour 6280 pages visitées. En mai, il y eut 4895 visites pour 8100 pages vues. En mai, il y eut 4499 visites pour 5395 pages vues. Je n’ai pas reçu les chiffres de juin. En juillet,  3502 visites pour 4158 pages vues. En août: 3213 visites pour 5059 pages vues. Vu que le blog ne fut réactivé qu’au 15 août, ce n’est pas mal du tout.

Le lectorat reste majoritairement belge (4020 visites). La France suit avec 477 visites, suivie du Canada (43 visites) et des Pays-Bas (40 visites).

L’article le plus fréquenté fut « Vox populi… vox Dei… De la démocratie représentative »  du 29 août avec 572 visites. Vient ensuite « Ceux qui se mouillent au cœur de l’été » du 16 août avec 368 visites et « Papa et Dieu » du 21 août avec 320 visites.
Merci aux lecteurs et suite au mois prochain.