Après Benoît XVI, le dernier Pape?

Sur le net ou dans la rue, d’aucuns me demandent si le prochain Pape sera le dernier. Pareille inquiétude se fonde sur la soi-disante « prophétie de saint Malachie », éditée en 1595 par le moine bénédictin Arnold Wion. Il s’agit d’un document de six pages dont il attribuait la composition à saint Malachie, archevêque d’Armagh (1095 env.-1148). Cette liste reprend une suite de cent onze devises qui s’appliquent aux papes, depuis Célestin II (1113-1114) jusqu’à nos jours. Si on suit la liste des Papes, Jean Paul Ier serait De medietate lunae (moitié de la lune); Jean-Paul II De labore solis (le travail du soleill) et Benoît XVI De gloria olivae (la gloire de l’olivier). Après, ne resterait qu’un dernier pape. Saint Malachie le décrit comme « Pierre le romain » qui – après la tribulation – verrait le Jugement dernier.  De quoi agiter les consciences.

Se préparer au retour du Christ, est le devoir de tout chrétien. Mais le faire en se fondant sur la « prophétie » de saint Malachie me paraît moins inspiré. L’ouvrage est, en fait, une composition. (Ici, je m’inspire librement d’un article). Une première partie est historique et décrit les Papes se succédant depuis le soi-disant auteur – Malachie – au XIe siècle, jusqu’à la date réelle de composition de l’ouvrage, fin du XVIe siècle. En effet, jusqu’à Urbain VII (1590), les devises sont accompagnées d’un bref commentaire dont l’auteur serait le dominicain Alfonso Charon, dit Ciacconius. Comme on y retrouve les mêmes erreurs d’armoiries et le même choix d’antipapes que dans les notices des papes publiées en 1557 par Onofrio Panvinio, les historiens pensent que Charon se serait servi de cet ouvrage pour composer sa liste. Après Urbain VII, le ton change. On donne aux Papes des devises vagues qui peuvent s’appliquer à tout un chacun. A une exception près: la devise qui suit Urbain VII. De antiquitate urbis désignait fort clairement le cardinal Simoncelli, évêque d’Orvieto, Urbs vetus. La soi-disante prophétie de Malachie avait donc été fabriquée par un petit malin au XVIe siècle pour influencer un conclave, en invitant les cardinaux à choisir l’évêque d’Orvieto. Malheureusement pour l’auteur, celui-ci ne fut pas élu pape et la « prophétie » sombra dans l’oubli. Ce qui me permet de conclure par un jeu de mot pourri: « Bien Malachie ne profite jamais ». Quoique… Ses prédictions retrouveront une gloire posthume aux XIXe et XXe siècles.

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