Inquisitio – fresque postmoderne

Le chaud mois de juillet réduisant le nombre des réunions en soirée, j’ai pu regarder ce mercredi soir les deux premiers épisodes de la série TV lancée par France 2 : Inquisitio. Ce téléfilm a fait réagir les catholiques de France. Le porte-parole des évêques de l’Hexagone, Mgr Bernard Podvin eut une réaction virulente à son encontre : « Programmée, hélas, à heure de grande écoute. Plusieurs universitaires médiévistes, peu suspects de complaisance envers l’Eglise catholique, nous disent combien ils sont atterrés par cette série. Citons, entre autres points scandaleux, le traitement indigne réservé à la grande mystique Ste Catherine de Sienne…  Parce que cette période historique est extrêmement difficile pour tous, elle requiert d’autant plus un service délicat et éminent de la vérité. Quand un tel parti-pris aimante une production, qu’a t’elle encore de … culturelle ? Je pleure et m’indigne de songer qu’à l’audimat, beaucoup risquent de se croire  instruits par cette manière tendancieuse d’honorer l’histoire humaine et religieuse … »
Cette réaction n’est pas vraiment contredite par Nicolas Cuche, le réalisateur de la série : « Et pourtant, même peu montré, le Moyen Âge reste extrêmement puissant dans l’imaginaire collectif. Autrement dit, il était pour moi un espace de liberté où inventer un univers qui soit vraisemblable et évocateur sans prétendre à une vérité de reconstitution, un espace plus vierge que ne l’aurait été la cour de Louis XIV par exemple. « Mon » Moyen Âge s’inspire parfois aussi bien des historiens que de la science fiction et des jeux vidéo. Je l’assume ». 

Ce que j’en pense ? Inquisitio est un téléfilm moyennement bien ficelé, qui n’arrive pas à la cheville du Nom de la Rose. N’est pas Umberto Ecco, qui veut. Inquisitio n’en décrit pas moins certains aspects d’un XIVe siècle qui vit se déployer, tout à la fois les grandes peurs en Occident et la raison moderne.
Ceci étant dit, si le personnage de l’inquisiteur a de l’épaisseur, les gentils médecins juifs de la série me semblent peu crédibles. Deux siècles plus tard, je ne dis pas. Mais ces savants qui dissèquent des corps pour comprendre, sont surtout une projection au mieux anachronique de nos attentes du jour.
Ce n’est cependant pas le pire : Comme le signale Mgr Podvin, dans Inquisitio, la description du personnage de sainte Catherine de Sienne est totalement hors propos. Je comprends bien que le réalisateur ne prétend pas à la reconstitution historique et que « son » Moyen Âge s’inspire tout autant de la science fiction et des jeux vidéo… Il n’empêche. Ne pas prendre en compte le phénomène de la sainteté au cœur de l’histoire chrétienne, c’est totalement passer à côté de son sujet. Travestir, de surcroît, Catherine de Sienne en une sorte d’éco-terroriste illuminée, n’est pas tant faire preuve de liberté créatrice que le signe que l’on a rien compris ou voulu comprendre.
Bref, Inquisitio s’avère in fine une reconstitution épique un peu cheap, qui surfe sur nos clichés postmodernes. Si la série ne nous apprend que trop peu ou fort mal sur le XIVe siècle, elle est par contre éloquente pour illustrer les phantasmes de notre XXIe siècle naissant.      

Une réflexion sur « Inquisitio – fresque postmoderne »

  1. Inquisito, ce titre m’a directement accroché !
    Mais j’ai déchanté lorsque j’ai vu Catherine de Sienne.
    J’ai compris qu’il s’agissait uniquement d’attirer le public vers un téléfilm (découpé en série au format de télévision actuel) sois disant historique.
    Je vais regarder les épisodes suivants pour me faire une idée complète mais je crains que hormis du sang et de la cruauté rien ne soit a retenir de cette oeuvre.

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