Jeudi Saint – « Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout » (Jn. 13,1).

La cathédrale de Liège était encore bien plus bondée que d’habitude, hier soir, pour la Messe Chrismale. Après l’ « annus horribilis » passée par l’Eglise catholique en Belgique, c’est réconfortant. Avant de bénir l’huile des malades, l’Evêque fit lever ses prêtres et demanda publiquement pardon pour tous les abus sexuels commis par des membres du clergé. Ce n’était pas misérabiliste. Tout juste digne. Evidemment, l’Eglise n’est pas « que » ça et elle est même « tout sauf » ça. Mais quand son Maître et Seigneur, durant son ultime repas, veut dire Son amour jusqu’au bout, Il lave les pieds de ses disciples. Eh bien, il y avait quelque chose de cela dans la liturgie de hier soir à la cathédrale. Les hommes ont les pieds englués de boue et – trop souvent aussi – de sang ou de merde. L’Eglise est fidèle à son Maître chaque fois qu’elle se baisse pour laver les pieds de cette humanité. Comme prêtre, je dois m’efforcer de ne jamais oublier cela. Et me connaissant, ce n’est pas gagné. En ce jeudi saint, merci donc à tous ces catholiques qui prient pour leurs prêtres, conscients qu’ils sont tout à la fois pécheurs et bergers.

Mondialisation : des racines et des ailes

Il ne m’appartient pas de m’aventurer dans le champ de la politique partisane, mais je souligne une déclaration de l’ancien premier-ministre et intellectuel reconnu, Mark Eyskens, parue ce jour en p.3 du Soir : « Le nationalisme dérive facilement en égoïsme collectif. Il repose sur le paradigme dépassé que tout peuple peut devenir un État. Il y a dans le monde… 6.000 peuples. Cela nous ferait 6.000 États membres de l’ONU au lieu de 192 ! Ridicule… (Question) Vous dites même que le peuple flamand n’existe plus… Cela vaut aussi pour les peuples wallon, français, etc. À la KUL (université catholique de Louvain-flamand) nous avons calculé le taux d’« allochtonisation» (un des quatre grands-parents d’origine étrangère). Pour la Belgique, cela donne 22 %. Pour Bruxelles, 65 %, pour Anvers, 48 %, pour Saint-Josseten-Noode… 96 %. Le peuple est devenu population. Et la population est multiculturelle. Le grand défi de demain sera de transformer la multiculturalité en interculturalité : intégration sans assimilation. Tout discours nationaliste, protectionniste, est un combat d’arrière-garde ». Fin de citation.

Personnellement, je suis frappé par la montée en Europe de mouvements faisant appel à l’identité nationale, aux récentes tensions franco-italiennes sur l’immigration, à la réticences des pays du nord de l’Europe à soutenir l’euro à travers ceux du sud. Tout ceci s’explique politiquement, bien évidemment – et une fois de plus – je ne souhaite pas m’aventurer sur ce terrain. Mais cela démontre également que la génération qui a bâtie l’Europe des droits de l’homme sur les ruines du nazisme, est bien morte. Les hommes et femmes aujourd’hui au pouvoir – contrairement aux Schuman, Monet, Adenauer, puis aux Mitterrand et Kohl – n’ont de l’événement fondateur que fut, pour la seconde moitié du XXe siècle, la seconde guerre mondiale, qu’une connaissance livresque. Ils n’en cèdent donc que plus facilement à un des vieux démons qui hante tout politicien en démocratie : la tentation de flatter l’électeur en désignant « l’autre » comme principal responsable de ses ennuis. « L’autre » peut prendre bien des visages : l’étranger chez moi, le peuple qui se trouve derrière la frontière ou encore, la trop anonyme superstructure européenne. Cela marche d’autant mieux que tout n’est jamais totalement faux. « L’autre » n’est pas plus dénué de défauts que… moi-même. Et puis, en temps de ressac économique, la propension est plus forte de d’abord veiller à la défense de ses légitimes intérêts. Enfin, un besoin de « racines » se fait sentir dans notre monde chaque jour plus anonyme et standardisé. D’où le retour au folklore et au terroir. Mais voilà : Notre besoin actuel de redécouvrir des racines – réelles ou fantasmées – est sain, tant qu’il ne se laisse pas parasiter par la peur. Se sentir différent de « l’autre » est structurant, à condition que cette « différence » soit perçue comme un enrichissement et non comme une menace. Un arbre a de profondes racines, non pas pour ramper sous terre, mais afin de s’élever vers le ciel. Et si le Christ a pris racine parmi les hommes un jour de Noël, c’est pour nous donner par sa Pâques les ailes d’un enfant de Dieu.

De la Démocratie – Avortement, Piss Christ et Culottiers

La démocratie repose sur davantage que l’arithmétique électorale (la majorité décide). Elle implique un parti-pris de l’intelligence (« cela vaut la peine de débattre, car l’autre est – comme moi – un être raisonnable ») et de l’émotion (« ce n’est pas parce que nos avis divergent, que l’autre est de mauvaise foi). C’est cette dernière attitude de « bienveillance dans le débat » qui me semble le plus souvent faire défaut dans notre « émocratie ». Rien de tel pour convaincre dans les médias, que de charger d’émotions négatives mon contradicteur. En néerlandais, cela s‘appelle : « frapper sur le joueur et non sur le ballon ».
Les catholiques ont pratiqué cela, et le pratiquent sans doute encore, par rapport aux « mécréants laïques », mais le contraire est tout aussi vrai. Comme l’écrit Caroline Sägesser (« La fracture du monde laïque », revue « Politique ») : « les laïques (en Belgique) se sont trouvés longtemps dans la position moralement très confortable de l’« underdog » : la puissance de l’ennemi (catholique) donnait à la cause un surcroît de légitimité ; il ne fallait guère s’embarrasser de gants pour tenter de le frapper (dans un sens strictement figuré, bien entendu) ». Chacun conviendra que le rapport de force s’est, de nos jours plutôt équilibré, voire carrément inversé. Cela ne semble pas pour autant empêcher de continuer de cogner sec. Ainsi, pour répondre au jeune porte-parole de la Marche pour la Vie, le journal « le Soir » de ce jour (p.13) interviewe rien de moins que le professeur ULB Yvon Englert. Pour commencer, celui-ci pose correctement les termes du débat : « Il faut dire clairement qu’il est contraire à la vérité de dire que l’embryon est une personne et que l’avortement est un meurtre ». Personnellement, je n’utiliserai jamais le vocable « meurtre », voire « homicide » en matière d’avortement, mais de fait – la question consiste à savoir à partir de quel moment la société protège l’embryon humain et pourquoi. La joute amicale que j’ai eue à ce sujet avec mon ami, le professeur ULB Baudouin Decharneux (« Une cuillère d’eau bénite et un zeste de soufre », éditions EME) illustre que les avis sur la question peuvent diverger, à condition d’encore pouvoir en débattre… C’est ici que l’article du jour dérape. On ne joue plus « le ballon », mais on s’en prend aux intentions – forcément cachées – du joueur. Je cite le professeur Engler, parlant des « Marcheurs pour la Vie » : « Ces pro-vie sont en fait des anti-choix. Ces mouvements, que ce soit en France, aux Etats-Unis ou chez nous sont extrêmement intolérants et adoptent le modèle de la Légion du Christ ». Je ne connais pas la « légion du Christ » (fusion entre « la légion de Marie » et les « légionnaires du Christ » ?) et je peux admettre que l’intolérance se trouve parfois dans le camp des pro-vie, mais je n’ai rien vu, ni entendu, de tel au cours de la Marche pour la Vie. Je demande donc : « franchement, Professeur Engler, de quel côté se trouve l’intolérance ? » C’est un peu comme dans un débat sur l’immigration, où les uns se feraient traiter de « fachos » et les autres de « naïfs fossoyeurs de la société ». Ceci, plutôt que de reconnaître que le sujet met en jeu des valeurs respectables, mais contradictoires, et que la question est de savoir où l’on place le curseur. Eh bien dans le débat sur l’avortement, le fond de la question est également de savoir où la société place le curseur entre la dignité d’une vie humaine à naître, d’une part, et la volonté d’une femme de ne pas porter cette vie à terme, de l’autre. Et je repose la question : dans notre bonne démocratie, est-il encore permis d’en débattre ?
Charité bien ordonnée commençant par soi-même, je souhaite retourner l’argument en parlant de l’affaire « Piss Christ » et – par prolongation plus souriante – de la cathédrale de Hasselt. Ici, ce sont mes frères chrétiens qui prêtent les pires intentions à des artistes. De quoi s’agit-il ? Comme tant d’autres, j’ai été gêné par cette photo d’un Christ plongé dans un bocal d’urine. Je ne saisis pas ce que cela apporte, si ce n’est de la provocation. Je puis donc comprendre que des voix expriment – calmement – que cela les blesse. En démocratie, on a encore le droit de critiquer une œuvre d’art. Mais de là à utiliser la violence pour détruire cette photo, je dis « non » avec force. Je rappelle d’abord aux baptisés que les excréments humains qui blessent le plus la dignité du Christ, ne sont pas ceux d’un bocal d’urine, mais bien de notre péché. Et dans un pays aux prises avec l’abus sexuel sur mineurs, chacun comprendra où se trouve le vrai blasphème. Je signale ensuite que l’art est toujours une matière explosive, mais qu’une société qui essaie de censurer ses artistes au nom de la bienséance, ne fait que crier sa peur. Quant aux personnes qui critiquent le « Christ de Hasselt », elles le font de façon pacifique. Je ne puis donc que les trouver de « bonne foi » – c’est le cas de le dire. Mais je les invite tout de même à découvrir le Christ nu de l’église San Spirito à Florence (Michel Ange). Souhaitent-elles vraiment que, pour lui comme pour celui de Hasselt, on fasse à nouveau appel à un « braghettone », artiste-culottier romain du XVIè siècle qui fut chargé de couvrir le sexe des œuvres d’art du début de la Renaissance ?

Lueur de Pâques… (La Libre p.47)

(Merci à « La Libre » d’avoir publié ce lundi un petit témoignage, que j’ai rédigé car il me semblait faire du bien en ce début de Semaine Sainte… pour le moins « chahutée »)

Au début de ma prêtrise, j’assurais chaque année l’animation religieuse des sessions de formation Jeunesse & Santé de la région de Verviers, qui a lieu durant les vacances de Pâques. Au cours de celles-ci, environ 130 jeunes de plus de 15 ans sont pris en charge par une 20-aine d’autres jeunes de moins de 25 ans, qui leur apprennent les techniques pédagogiques et ludiques utiles pour animer bénévolement les camps de la Mutualité chrétienne de l’été suivant. La plupart de ces adolescents étaient déjà membres de mouvements de jeunesse. Outre cette semaine de session durant le congé de Pâques, ils acceptaient donc de consacrer une bonne partie de leurs vacances d’été au service de plus jeunes : d’abord dans leur mouvement scout ou patronné et puis à la Mutu. Je les admirais et trouvais qu’ils ne ressemblaient en rien à la génération cynique et repliée sur des jeux vidéos que certains présentent comme une généralité. De plus, n’allez pas croire que leur session soit un moment de laisser-aller : la formation Jeunesse & Santé est une école d’exigence et d’excellence. Enfin, l’aspect religieux n’est pas évacué. Un module est consacré à la spiritualité et l’Eucharistie traditionnelle de la session – pourtant nullement obligatoire – est suivie par plus de neuf participants sur dix. Non pas que tous ces jeunes soient des piliers d’Eglise (faut pas rêver), mais au cœur de leur session de Pâques, cette célébration vient les rejoindre dans un engagement concret. Du coup, le sens religieux de l’Eucharistie leur est bien plus accessible et la présence du Christ y est pour eux mieux lisible. L’âge venant, j’avais laissé ma place de prêtre-animateur à une confrère et ami plus jeune, qui s’en tira fort bien. Mais ce prêtre partit en mission dans un pays en voie de développement. C’est ainsi que je reçus un mail des responsables de Jeunesse & Santé, me demandant si j’accepterais de les dépanner. J’y suis allé avec quelques appréhensions : je me sentais un peu âgé pour animer des adolescents dont je pourrais désormais être le père et puis, je ne savais pas quelle genre de jeunes j’allais désormais rencontrer. Eh bien, il y a quelques jours, je me suis senti rajeunir. J’ai retrouvé le même enthousiasme, le même idéal et la même fraicheur. Et quand j’ai célébré devant plus de 120 adolescents une Eucharistie qu’ils avaient préparé et dont ils animaient les chants, je me suis dit que – pour notre communauté catholique qui connaît en Belgique sa dose de chemin de croix – il y avait là comme une lueur de Pâques.

Waarom stichter kloostergemeenschap Tibériade op mij indruk maakt (cfr.De Morgen p.3)

In deze – desondanks alles – ‘Goede Week’ staat een troostend artikel te lezen op p.3 van de krant ‘De Morgen’. Het stuk werd geschreven door Sue Somers. Uittreksels ervan: “Crisis in de kerk? Niet in de Tibériade. In deze kloostergemeenschap nabij Rochefort wijden acht meisjes en eenendertig jongens zich aan God, het gebed en het evangelie. De jongste is twintig, de oudste halfweg de dertig. Diep verscholen in de Ardense bossen eren ze in pij en op sandalen de rust en de soberheid. Ze leven op zichzelf: ze bakken hun eigen brood en kweken groenten in de moestuin. Maar bezoekers zijn welkom. Op zondag zijn de vespers in de kapel toegankelijk voor het publiek en wie wil, kan op bezinning komen, alleen of in groep. (…) Te midden van al het kerkelijke onheil timmert de Tibériade hard aan de weg. De kloostergemeenschap zendt zijn zonen en dochters uit naar Congo, Litouwen en de Filippijnen, maar binnenkort ook naar Strijpen, nabij Zottegem. (…) Broeder Marc vindt niet dat hij met zijn jonge volgelingen een uitzondering is. « Wij maken ook deel uit van de kerk. Ik voel bij jongeren een grote dorst naar het evangelie. Elk jaar komen hier 12.000 jongeren over de vloer. « 
Ik ken broeder Marc, stichter van deze veelbelovende – en zelfs een beetje ‘hype’ – kloostergemeenschap. De man maakt indruk op mij. Waarom? Omdat wie hem ontmoet, maar al te vlug beseft dat hij echt nederig is. Niet ‘pompeus nederig’ zoals zij die zich zondaars noemen om alleen maar als bescheiden over te komen. Neen, de echte nederigheid van een man die zijn eigen beperkingen goed kent, ermee heeft leren leven en er trouwens ook mee kan lachen. Daarom vind ik zijn stichting ‘gezond’ en denk ik dat deze gemeenschap in de Kerk vruchten zal blijven dragen. In Rome ontmoette ik ooit de stichter van nog veel succesvollere kloostergemeenschap: de Legionairs van Christus. De man was inspirerend, maar maakte op mij een allesbehalve nederige indruk. Het verbaasde me dus maar half toen ik vernam dat hij van zijn voetstuk gevallen was (al betreurde ik de impact van de schokgolf die dit veroorzaakte op de honderden ‘legionairs’ die hun roeping met oprechtheid beleefden). Wel, broeder Marc is van een heel ander houtje gesneden. Wie me niet gelooft, volge mijn raad: Breng een paasbezoekje aan Tiberiade!

« Lourd silence » de l’Eglise ?

Ce WE, le ministre Steven Vanackere trouvait sur les antennes de RTL que l’Eglise devrait davantage s’exprimer, suite à l’interview-choc de l’ancien évêque de Bruges. Ce matin, l’édito de « Vers l’Avenir » regrettait que cette même Eglise refuse de faire un « mea culpa » plein et entier et le journal « Le Soir » titrait en Une sur son « lourd silence ». J’avoue ne pas comprendre. En matière de pardon, puis-je inviter l’éditorialiste de « Vers l’Avenir » à aller relire la belle lettre pastorale des évêques, qui remonte – elle – au… 19 mai 2010 ? (extrait ci-dessous *). En matière de communication, il faut savoir ce qu’on veut : On ne peut, d’une part, reprocher à l’Archevêque de trop parler et de faire cavalier seul dans les médias et, de l’autre, lui en vouloir de se taire. Depuis la sortie médiatique de l’ancien évêque de Bruges, la communication de la Conférence épiscopale de Belgique a fonctionné selon les règles : les deux évêques-référents pour les question d’abus sexuels (Mgr Harpigny, côté francophone et Mgr Bonny, côté flamand) ont abondamment répondu aux sollicitations des médias. Afin d’éviter la cacophonie, les autres évêques sont restés discrets. L’Archevêque n’a fait que respecter la discipline collégiale, tout en rappelant que – comme convenu depuis des semaines et selon la coutume – il parlerait aux médias à Pâques. Il faut savoir ce qu’on veut : Il est pour le moins curieux de reprocher à l’Eglise catholique d’être trop hiératique, mais de conclure que tant que son Numero Uno (tout symbolique… car l’Archevêque n’est que premier parmi ses pairs) n’a rien dit, personne n’a parlé. Enfin, par rapport aux recommandations de la Commission parlementaire, je reprends ce que je publiais samedi sur ce même blog, puisque l’article du « Soir » me cite fort flatteusement en p.7 (merci Ricardo!): « Un peu de temps doit être laissé à l’Eglise de Belgique. Je pense que les évêques prennent ces recommandations au sérieux et réfléchissent à une réponse adéquate aux attentes des élus de la Nation. Mais pas dans la précipitation.»

(*) Extrait de la lettre pastorale des évêques du 19 mai 2010 : « Des abuseurs ont reçu une nouvelle chance, tandis que des victimes portaient en leur chair des blessures qui ne se cicatrisaient pas ou peu. A toutes les victimes d’abus sexuels nous demandons pardon, tant pour l’agression que pour le traitement inadéquat de celle-ci. (…) Nous remercions les victimes qui trouvent le courage de briser le mur du silence en racontant ce qui leur est arrivé. Nous espérons que leur parole contribue à ce qu’elles obtiennent la reconnaissance et la guérison auxquelles elles aspirent. En s’exprimant, elles rendent en outre possible un chemin de purification et de conversion au sein de l’Eglise ».

Réaction de l’Eglise : une impatience à géométrie variable

Belle unanimité entre les édito’s du Soir et de La Libre de ce WE (lire ci-dessous). Je la résume comme suit: « Qu’est-ce que l’Eglise attend pour réagir – favorablement s’entend – aux propositions de la Commission parlementaire à ériger un tribunal arbitral » ? Je suis bien évidemment d’accord que les responsables catholiques doivent continuer à prendre leurs responsabilités dans le dossier des abus sexuels. Cependant, pourquoi une telle impatience? La Commission Lalieux a travaillé pendant plusieurs mois. Peut-on au moins laisser aux évêques et responsables religieux quelques semaines pour saisir les contours juridiques des recommandations parlementaires? Faut-il rappeler que l’Eglise avait réagi – bien avant que le monde politique se saisisse du dossier – en instituant la Commission Adriaenssens ? Que celle-ci a été foudroyée en plein vol par des perquisitions déclarées depuis illégales(*) ? Que, puisque les parlementaires ont reconnu que la défunte commission ecclésiale faisait un excellent travail, et ceci en toute indépendance, ils peuvent comprendre que ces perquisitions ont freiné la prise en charge du dossier « abus sexuel » par les responsables catholiques? Que comme on ne leur a pas facilité la vie, un peu de temps peut donc être accordé à ces responsables pour répondre à l’offre des élus de la Nation? Enfin, que puisque les recommandations de la Commission parlementaire s’adressent également à d’autres milieux qui s’occupent de l’enfance, il est tout de même un peu curieux de seulement exiger de l’Eglise catholique qu’elle réagisse dans l’urgence ? Franchement, je trouve qu’il y a là une impatience à géométrie variable.

Ricardo Gutierrez – édito du Soir : «(…) C’est pourquoi l’Eglise belge, à l’instar du Pape, n’a plus à tergiverser. Les élus de la nation lui demandent d’instaurer un tribunal arbitral pour réparer les crimes commis par ses prêtres et ses religieux. La société civile ne peut se contenter des déclarations de bonnes intentions des évêques Harpigny et Bonny. Il est temps que la conférence épiscopale sorte enfin de son mutisme. Elle ne peut à la fois condamner la morgue du pédophile Vangheluwe et adopter ce même dédain à l’égard des centaines de victimes de la loi catholique du silence. »
Pierre-François Lovens – édito de La Libre : « (…) Quant à la Conférence épiscopale de Belgique, qui s’est à nouveau retranchée derrière un communiqué bien impersonnel, on en attend davantage. Car si le cas Vangheluwe n’est plus de son ressort, le silence de nos évêques sur les conclusions de la commission parlementaire dite “abus sexuels” –dont la proposition de créer un tribunal arbitral– ne contribue pas à apaiser les esprits. Ce mutisme devient même embarrassant. Il serait donc temps, là aussi, que nos évêques se prononcent avec clarté et esprit de responsabilité ».

(*) Pour rappel : La chambre des mises en accusation a estimé une première fois, le 13 août 2010, et une seconde fois, le 22 décembre dernier après cassation, que ces saisies étaient illégales. La chambre des mises avait estimé que le juge ne pouvait saisir car, en agissant de la sorte, il allait au-delà de sa saisine et aurait dû se faire accompagner d’un médecin.

Verklaring van de bisschoppen van België na het interview van Roger Vangheluwe/ Déclaration des évêques de Belgique suite à l’interview de Roger Vangheluwe

Wij reageren verbijsterd op het interview dat Roger Vangheluwe donderdagavond 14 april heeft gegeven aan de commerciële zenders VT4 en VTM en nemen er nadrukkelijk afstand van. We zijn uitermate geschokt door de minimaliserende en vergoelijkende manier waarop Roger Vangheluwe spreekt over de gepleegde feiten en de gevolgen daarvan voor de slachtoffers, hun familie, de gelovigen en de brede samenleving. Dit is onaanvaardbaar. Hij beseft blijkbaar nog steeds niet ten volle de ernst hiervan.
Dit interview ligt niet in de lijn van wat Rome aan Roger Vangheluwe gevraagd heeft. Wij vertrouwden erop dat hij zich in stilte zou terugtrekken in het buitenland om zich te bezinnen over zijn daden en de door Rome opgelegde spirituele en psychologische behandeling te volgen.
Dit interview is buitengewoon kwetsend voor de slachtoffers, hun familie en al wie met de problematiek van seksueel misbruik begaan is.
Ook voor de gelovigen is dit interview een kaakslag. Net als wij blijven zij ongetwijfeld radeloos en onthutst achter.
De toon van het interview staat haaks op onze inzet van de laatste maanden om de problematiek van seksueel misbruik ernstig te nemen, oor te hebben voor de slachtoffers en de nodige maatregelen te treffen.

De bisschoppen van België

Nous tenons à exprimer notre stupéfaction face à l’interview donnée par Roger Vangheluwe aux chaines commerciales VT4 et VTM, le soir de ce jeudi 14 avril et souhaitons expressément nous en distancier. Nous sommes extrêmement choqués de la manière dont il minimalise et excuse les faits commis et les conséquences pour les victimes, leur famille, les croyants et plus largement toute la société. C’est inacceptable. Roger Vangheluwe ne semble toujours pas mesurer l’extrême gravité de ses actes.
Cette interview ne correspond aucunement à ce qui lui a été demandé par Rome. Nous lui faisions confiance concernant son retrait dans le silence à l’étranger en vue d’une réflexion sur ses actes et du suivi du traitement spirituel et psychologique imposé par Rome.
Cette interview est extrêmement blessante pour les victimes, leur famille et tous ceux qui sont confrontés avec la problématique de l’abus sexuel. Pour les fidèles aussi, elle est une gifle. Tout comme nous, ils sont indubitablement désespérés et déconcertés.
Le ton de l’interview est en totale contradiction avec les efforts entrepris ces derniers mois pour prendre au sérieux la problématique de l’abus sexuel, écouter les victimes et déterminer les mesures adéquates.

Les Evêques de Belgique

Interview VT4 : De schaamte voorbij… (texte francophone, ci-dessous)

“Ik heb spijt over wat ik gedaan heb en vraag om vergiffenis: Eerst aan de slachtoffers die zo zwaar geleden hebben – en indien ze mij niet kunnen vergeven, kan ik daar alleen maar begrip voor hebben. Dan vraag ik ook om vergeving aan de hele kerkgemeenschap, die met tranen heeft moeten vernemen dat ook een bisschop een pedofiel gedrag kon hebben. Tenslotte vraag ik om vergeving aan mijn landgenoten, die omwille van dit schandaal het nog moeilijker zullen hebben om in de Kerk de Blijde Boodschap van Christus te herkennen. De gelovigen die het willen, kunnen ook een beetje voor mij bidden, want gebed heb ik broodnodig. Voor de rest wil in stilte verder boete doen om nog dieper tot berouw en inkeer te komen”.
Toen ik gisterenavond vernam dat de oud-bisschop van Brugge het woord zou nemen, heb ik gehoopt dat het dat zou worden en zeker niets meer. En zo is het ook eigenlijk een beetje begonnen. Maar dan… Deze morgen overkomt me een diep gevoel van onbehagen en droefheid. In de christelijke leer krijgt “schaamte” nooit het laatste woord. Maar “schaamte” kan een weg banen naar berouw, die dan de poort opent voor vergiffenis. En wat ik gisteren misschien het meest gemist heb in dat lange interview van de oud-bisschop, is het aanvoelen van schaamte. Ik wil de man zeker niet belasten, maar er moet toch gezegd worden dat dit niet past. Terecht citeerde Roger Vangheluwe uit het Evangelie volgens Johannes; « Wie zonder zonde is, werpe de eerste steen. » (Johannes 8,7). Maar een paar zinnen verder, voegt Jezus eraan toe: “Was u maar blind, dan zou u zonder zonde zijn. Maar u beweert dat u kunt zien, en dus blijft uw zonde.” (Johannes 9, 41)

Interview sur VT4: Sans honte… (Nederlandstalige tekst, hierboven)

« Je regrette ce que j’ai fait et demande pardon: en premier lieu aux victimes à qui j’ai infligé tant de souffrance – et je puis comprendre que celles-ci n’arrivent pas à me pardonner. Je demande aussi pardon aux fidèles catholiques, qui ont appris dans les larmes que même un évêque pouvait poser des actes pédophiles. Enfin, je demande pardon à mes concitoyens qui, suite à pareil scandale, auront encore plus de peine à reconnaître dans l’Eglise la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ. Les croyants qui le souhaitent, peuvent prier pour moi, car j’en ai grand besoin. Pour le reste, je veux poursuivre ma pénitence dans le silence, pour grandir dans le remord et la conversion ».
En apprenant hier soir que l’ancien évêque de Bruges prendrait la parole, j’ai espéré entendre cela et rien de plus. L’interview a d’ailleurs un peu commencé sur ce ton. Mais après… Ce matin, m’habite un profond sentiment de malaise et de tristesse. La « honte » n’a jamais le dernier mot dans l’enseignement chrétien. Mais le sentiment de honte est un chemin vers le remord, qui ouvre la porte au pardon. Et l’absence de honte est sans doute ce qui m’a le plus frappé dans ce long interview de l’ancien évêque de Bruges. Je ne veux pas ici accabler l’homme, mais je me dois d’exprimer que ce n’est pas correct. A juste titre, Roger Vangheluwe cita hier l’Evangile selon Saint Jean: « Que celui qui est sans péché, jette la première pierre » (Jean 8,7). Mais dans le même Evangile, Jésus ajoute quelques petites phrases plus loin: « Si vous étiez aveugles, vous n’auriez pas de péché. Mais maintenant vous dites: Nous voyons. C’est pour cela que votre péché subsiste ». (Jean 9,41)