Ci-dessous ma chronique parue dans l’hebdo Marianne-B de cette semaine:
Les chroniqueurs – j’en fais partie – sont une engeance qui intervient régulièrement dans la presse écrite et audiovisuelle en qualité d’observateur qualifié. Avec son alter ego journalistique – l’éditorialiste – ils font là œuvre d’utilité publique. Cependant, le donneur de leçon médiatique se doit de garder une certaine humilité face à l’acteur social. Là où le premier peut rectifier une chronique moins inspirée d’un trait de plume, le second se mouille dans l’action publique. « Obama et Hollande doivent-ils intervenir en Syrie ? » Facile de distribuer bons et mauvais points dans les colonnes d’un magazine. Mais que ferait le docte analyste à la place du décideur politique? A l’époque de mon mandat de porte-parole des évêques de Belgique, je me souviens avoir été mis sur le gril – sourire en coin – par un des éditorialistes politiques les plus influents au nord du pays. Aujourd’hui, l’homme est mandataire NVA et il vient de se faire rappeler à l’ordre par son parti, à la suite de déclarations sur la stratégie à adopter après les élections. Chroniqueurs et éditorialistes se sont gaussés de sa mésaventure. Quelques années plus tôt, il aurait été de leur nombre. D’où ce souhait : Chers collègues éditorialistes et chroniqueurs, un peu d’humilité svp. L’acteur social qui est la cible de votre plume plongée dans le picrate – ce pourrait être vous. …Ce pourrait être moi.
Commentaire: Dans cette chronique, je souhaitais exprimer, une fois de plus, toute la difficulté du conflit syrien. Trop facile de venir avec des solutions noire sur blanc. Si je soutiens l’appel du Pape François à ne pas intervenir militairement unilatéralement, vu que personne ne voit où pareille intervention mènerait, parfois le « droit d’ingérence humanitaire » doit pouvoir être appliqué. L’impasse syrienne pointe donc aussi sur l’actuel déficit de droit international.
Je rappelle ici le n°67 de l’encylique « Caritas in Veritate » de Benoît XVI – à méditer par tous, mais plus particulièrement par les pays membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU: « Face au développement irrésistible de l’interdépendance mondiale, et alors que nous sommes en présence d’une récession également mondiale, l’urgence de la réforme de l’Organisation des Nations Unies comme celle de l’architecture économique et financière internationale en vue de donner une réalité concrète au concept de famille des Nations, trouve un large écho. On ressent également fortement l’urgence de trouver des formes innovantes pour concrétiser le principe de la responsabilité de protéger et pour accorder aux nations les plus pauvres une voix opérante dans les décisions communes. Cela est d’autant plus nécessaire pour la recherche d’un ordre politique, juridique et économique, susceptible d’accroître et d’orienter la collaboration internationale vers le développement solidaire de tous les peuples. Pour le gouvernement de l’économie mondiale, pour assainir les économies frappées par la crise, pour prévenir son aggravation et de plus grands déséquilibres, pour procéder à un souhaitable désarmement intégral, pour arriver à la sécurité alimentaire et à la paix, pour assurer la protection de l’environnement et pour réguler les flux migratoires, il est urgent que soit mise en place une véritable Autorité politique mondiale telle qu’elle a déjà été esquissée par mon Prédécesseur, le bienheureux Jean XXIII. Une telle Autorité devra être réglée par le droit, se conformer de manière cohérente aux principes de subsidiarité et de solidarité, être ordonnée à la réalisation du bien commun, s’engager pour la promotion d’un authentique développement humain intégral qui s’inspire des valeurs de l’amour et de la vérité. Cette Autorité devra en outre être reconnue par tous, jouir d’un pouvoir effectif pour assurer à chacun la sécurité, le respect de la justice et des droits . Elle devra évidemment posséder la faculté de faire respecter ses décisions par les différentes parties, ainsi que les mesures coordonnées adoptées par les divers forums internationaux. En l’absence de ces conditions, le droit international, malgré les grands progrès accomplis dans divers domaines, risquerait en fait d’être conditionné par les équilibres de pouvoir entre les plus puissants. Le développement intégral des peuples et la collaboration internationale exigent que soit institué un degré supérieur d’organisation à l’échelle internationale de type subsidiaire pour la gouvernance de la mondialisation et que soit finalement mis en place un ordre social conforme à l’ordre moral et au lien entre les sphères morale et sociale, entre le politique et la sphère économique et civile que prévoyait déjà le Statut des Nations Unies. »