Carême en confinement – Jour 16 – Les pauvres et les morts…

Coup de téléphone paniqué d’une amie, qui travaille comme technicienne de surface. Sans beaucoup de  moyens économiques, elle est entrée en chômage technique depuis deux semaines, confinement oblige. Mais voilà -elle n’a pas perçu son chômage, alors que les factures continuent à tomber. Comme elle n’a pas internet, je lui promet d’envoyer un message à l’ONEM, ce que je fais. Mais – problème technique? – mon email refuse de se laisser envoyer. Je téléphonerai donc demain à l’ONEM, en espérant ne pas attendre trop longtemps. Je me dis que pour des personnes comme elles, ce temps de confinement est vraiment une épreuve. Et ce n’est pas fini.

Toute autre est la situation de cette autre amie, qui a accompagné sa maman en fin de vie. Celle-ci est décédée ce jour et l’amie me téléphone pour les funérailles. Je lui explique que ce sera au cimetière. Elle me recontacte pour le dire que la cérémonie ne peut dépasser 20 minutes, pour des raisons sanitaires. Compréhensible, mais difficile de faire son deuil dans de telles circonstances…

Carême en confinement – Jour 15 – Maigres poissons…

J’aime bien la culture des poissons d’avril. Comme chaque année, j’en fait un sur mon blog. 

Pourtant, cette année, j’ai bien senti que le coeur n’y était pas. Alors que vos proches passent leurs journées à vous envoyer des vidéo rigolotes (ou presque…), c’est comme si une pudeur s’était emparée de nous.Pudeur face aux défunts, morts souvent de façon confinée. Pudeur envers leur famille qui vit des funérailles réduites au plus stricte minimum. Pudeur envers les malades. Pudeur par crainte d’attraper le virus, ou d l’avoir attrapé sans le savoir. Pudeur envers les soignants qui n’arrêt pas. Envers tous les autres qui se démènent durant cette crise et tous ceux qui ne peuvent plus guère sortir de chez eux. Pudeur, enfin, face à la récession économique dure et profonde qui s’annonce.

Oui – cette année, ce furent de maigres poissons. Des poissons de temps de carême…    

Ceci n’est pas un poisson d’avril: Léviathan, sors de ton confinement ! – La Libre pp.32-33

Ce mercredi 1er avril est parue dans les colonnes du quotidien La Libre, une chronique conjointe de Bruno Colmant (économiste UCLouvain), Baudouin Decharneux (philosophe des religions ULB) et votre serviteur.

Outre que les deux co-auteurs sont des amis et des personnes d’une grande stature intellectuelle, j’apprécie le regard complémentaire posé sur la crise actuelle. 

Pour lire la chronique, cliquez sur « Leviathan, sors de ton confinement! » 

Merci à La Libre de nous offrir cet espace de réflexion.  

Confinement – Office du jeudi Saint en Radio ou en TV – Consignes liturgiques concernant le geste du lavement des pieds

Confinement oblige, nombre d’offices du triduum pascal seront cette année célébrés en studio d’enregistrement, afin d’être diffusés via la Radio (RCF…),  la TV (KTO…), ou encore plus simplement via FaceBook pour nombre d’offices en paroisse. 

Pour l’office du jeudi saint, se pose la question du lavement des pieds. Comme reproduire un geste si fort, alors qu’il n’y a guère d’assistants à l’office diffusé depuis le studio et que tout contact direct est prohibé pour raisons sanitaires?

C’est à cela qu’un écrit de la Congrégation du culte divin a cherché à répondre.  Par lettre circulaire, datée de ce mercredi 1er avril, Mgr Sardynalwill,  deuxième sous-secrétaire à la Congrégation du culte divin, propose d’adapter la liturgie du jeudi saint aux circonstances pastorales. « Nous préconisons de garder le beau geste du lavement des pieds lors des célébrations en studio, mais de le faire sous une forme particulière, soit le lavement des pieds de micro », écrit le prélat. «  Le micro représente, en effet, en l’occurence, l’accès à la communauté des fidèles absents à l’office. Il est donc liturgiquement indiqué d’en faire le réceptacle théologique d’un geste de service pastoral ». 

Une preuve supplémentaire, qu’à l’ère du pape François, Rome veille à s’adapter aux réalités du terrain dans un monde médiatique. 

Carême en confinement – Jour 14 – Les élèves et leurs parents…

Ce jour, c’était l’anniversaire de mon neveu et filleul. Je téléphone donc au jeune adolescent et nous parlons de choses et d’autres. Il me dit qu’il a du travail scolaire, car chaque jour, les professeurs lui envoient des devoirs. « Cela fait plus ou moins de boulot que quand tu es en classe ? », lui demande-je. « Plus » me répond-il. Je souris, et lui raconte que les séminaristes à Namur font exactement la même récrimination. Comme quoi…

Plus tard dans la journée, je parle avec son père, qui est mon frère cadet. « Je vois que l’école suit les choses avec lui », lui dis-je. « Tu ne crois pas si bien dire », me répond-il. « Sa mère et moi passons des soirées entières à l’aider. J’ai dû signaler à l’école que, vu nos emplois du temps professionnels, nous ne savions plus suivre. » 

Bref, pour élèves comme parents… vivement le retour à l’école 😉. 

Carême en confinement – Jour 13 – Le vrai poids des choses


S’il y a un truc qu’une crise majeure comme celle que nous traversons nous apprend, c’est le vrai poids des choses.

Tant d’événements, qui ordinairement nous occuperaient le coeur et l’esprit, sont remis sans effort à leur juste place. Ainsi, je suis honoré par la confiance de mon évêque, qui m’a confié une nouvelle mission. Et pourtant, ma tête est ailleurs. Auprès de ceux que j’aime et pour lesquels je ne puis m’empêcher de m’inquiéter. 

Par contre, il suffit d’un rien pour émouvoir. Un chat dans un arbre, un lapin dans un fossé, un corbeau dans un parc, le reflet d’un pont dans la Meuse… Et je me surprends à sourire comme le gosse que je n’ai jamais tout à fait cessé d’être. 

Comment sortirons-nous de tout ceci? Recentré sur l’Essentiel ou renvoyé au monde des apparences et du superficiel? Seul l’avenir nous le dira. 

Carême en confinement – Jour 12 – Mais il y a l’humour…


Depuis les origines de l’humanité, trois démarches permettent à l’humain de prendre recul par rapport à la réalité qui s’impose à lui: la religion, qui creuse et célèbre le sens du réel ; l’art, qui vise à saisir et reproduire la beauté du réel ; et l’humour, qui s’amuse face aux paradoxes et impasses du réel.

Au coeur de cette terrible pandémie, l’humour vit bien. Comme tant d’autres, je reçois chaque jour sur mon smartphone, des dizaines de vidéos cherchant à faire sourire en ce temps sombre. Ce matin, une des étudiantes siciliennes qui loge dans le bâtiment où je me trouve, racontait en riant que dans son village, il y a des drones avec caméra et haut-parleur, pilotées par le maire du lieu. Ceci lui permet, dans son accent rocailleux de rappeler ses concitoyens à l’ordre quand ils ne respectaient pas le confinement, en les appelant chacun par leur prénom. Don Camillo et Peppone, à l’heure du Covid, en quelque sorte… 

Oui, cette pandémie fait peur. Mais tant que les hommes trouveront l’énergie d’en rire, ils tiendront debout.   

Carême en confinement – Jour 11 – Devenir des adorateurs en Esprit et en Vérité (Jean 4, 23)

Toute crise peut s’avérer une chance. Le prix à, payer de. l’actuel confinement est, pour les familles, le risque de ne plus se supporter, à force de vivre les uns sur les autres, et pour les malades et anciens, le sentiment d’un isolement total – sans plus guère de visites ou de vie sociale.

La seule façon de vivre cela « par le haut » est de renforcer sa vie intérieure. Nous, les catholiques, vivons notre foi de façon sacramentelle et communautaire. C’est une Grâce. Cependant, elle ne peut faire de nous des croyants « de rites », qui ne vivent pas intérieurement. « Mais l’heure vient, et elle est déjà venue, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité; car ce sont là les adorateurs que le Père demande. » (Jean 4, 23)

Que nous vivions en famille ou isolés, à nous de profiter de ce confinement pour redécouvrir, en ce temps de carême, la force de la prière solitaire, de la méditation de l’Ecriture, ou de la lecture d’un livre qui nourrisse notre foi.  

Ultime signe avant la Pâques – 5e dimanche de Carême, Année A

« Lazare, viens dehors ! » (Jean 11, 1-45)

Ecrire que Jésus a ressuscité Lazare, n’est pas théologiquement correct. Si le Christ a ramené son ami à la vie, cela ne l’a pas rendu immortel. Quelques années plus tard – Lazare a connu la mort pour de bon, comme chacun de nous. Alors seulement a-t-il vécu la résurrection à la suite du Seigneur. La résurrection ne peut donc advenir qu’à la fin de notre vie terrestre : ressusciter, c’est traverser la mort… Il s’agit donc de d’abord mourir.

Il n’empêche – le rappel du tombeau de Lazare, constitue l’ultime signe du Royaume. Celui que la Pâques du Christ viendra sceller et accomplir. « Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, quand même il serait mort;et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. »

A méditer en ce temps de confinement, alors que rode une pandémie qui tue.

Carême en confinement – Jour 10 – Le Pape, seul sous la pluie

La journée fut agitée pour moi, de par les futurs changements annoncés au sein du Conseil épiscopal de Liège. Et pourtant, c’est tout autre chose qui a frappé mon imagination. Tout d’abord l’éditorial du journaliste Fabrice Grosfilley, qui rend le drame du coronavirus tellement concret. Et puis à 18h ce soir, cette image d’un pape, seul sous la pluie, devant une place Saint-Pierre vide. Il prie. Il implore. Il bénit. 

Je les entends persiffler d’ici, les railleurs: dérisoire religion, qui oppose un ostensoir au virus. Ben oui – nous ne sommes pas une religion hollywoodienne, peuplée de super-héros qui gagnent toujours à la fin. Nous sommes une religion d’un Christ crucifié, «  scandale pour les Juifs, folie pour les nations païennes » (1 Cor 1, 23). Le Pape n’est pas un magicien qui vient conjurer la pandémie. Il est un pasteur qui marche avec son peuple en souffrance, sous la pluie battante d’une ville qui pleure.