La tentation de la démocrature soft – suite et pas fin 😉

Bon, bon… Pour ce qui est de passer un premier mai au calme, c’est plutôt raté.
Quelle foire d’empoigne suite à mon article sur le blog.
Et ça continue, encore et encore, sur les réseaux sociaux.
Et dire qu’il y a des gens qui ne font que cela toute la journée.
Je les plains, car moi – je suis déjà saturé.
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Résumons le florilège des réactions les plus critiques :
Il y a ceux qui trouvent mes propos « abjects »… Voilà pour la nuance.
Il y a ce professeur de droit qui signale que je pourrais être pénalisé aux termes de l’article 268 du code pénal. Je suis juriste et… je n’ai pas compris. Il ajouta que, comme les ministres du culte sont payés par l’Etat, ils devraient se taire… Alors que les ministres de la laïcité seraient donc payés par l’Etat pour parler? Je n’ai pas compris, non plus.
Certains me reprochent d’avoir soupçonné la députée Sophie Rohonyi d’appartenir à l’ultra-droite. Alors que – relisez ce que j’ai écrit –  j’ai simplement signalé que « dénier voix au chapitre aux évêques dans un débat de société », ressemblait à la réaction de l’ultra-droite quand l’Eglise parle d’immigration. Si je fais cette comparaison, c’est justement parce que la députée Rohonyi n’a rien de commun avec l’ultra-droite. Ce fut donc une façon d’avertir de l’inconséquence démocratique de pareille attitude.
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La députée Rohonyi, elle-même, a publié une réaction en signalant que l’avis « unanime » des experts universitaires transformait une fois pour toute le débat sur l’avortement en débat de santé publique, sans lien (je la cite) avec une « faute morale ».
C’est elle qui parle de « faute ». Pas moi.
J’ai simplement rappelé – et je le maintiens – que tous les avis universitaires n’enlèveront pas au débat sur l’avortement sa dimension éthique. (Plusieurs professeurs de médecine m’ont écrit pour me remercier de l’avoir rappelé.)
Le simple fait que des « limites légales » continuent à exister dans tous les pays, démontre à suffisance que la balance entre le choix d’une femme enceinte et la défense de la vie à naître, est un délicat exercice.
Si la science a son mot à dire dans ce débat, l’éthique enrobe ce dossier de part en part.
Toutes les femmes le savent bien. Aucune ne juge l’avortement comme un acte banal.
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Il y a enfin tous ceux qui m’ont objecté que les curés devaient rester dans leur sacristie et ne pas se mêler de débats de société.
Ce sont les mêmes qui applaudissaient quand le cardinal Danneels co-signa avec le président du Centre d’Action Laïque, un appel pour des critères de régularisation pour les sans-papiers.
Cherchez la logique.
Ceux-là donnent un droit illimité à la parole à la laïcité (réputée rationnelle) et pas au cultes (réputés obscurantistes).
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La laïcité politique à laquelle j’adhère, signifie qu’aucune conviction ne peut  supplanter la majorité démocratique, mais que chacune peut – et même doit – pouvoir s’exprimer. Jamais je n’accepterai de vivre en devant restreindre mon droit à la liberté d’opinion… Et la critique qui l’accompagne.
Je récuse donc une laïcité « dogmatique » qui fait taire les convictions spirituelles et ne ne donne voix qu’au libre examen.
Je le répète: je ne suis pas un citoyen de seconde zone et – comme toute instance représentative d’une communauté – les responsables d’un culte ont voix au chapitre dans tous les débats de société.
Après, c’est le parlement qui tranche. Telle est la démocratie.
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La partie la plus inquiétante du débat du jour s’est d’ailleurs déroulée en néerlandais.
Où des déçus de la démocratie m’ont écrit qu’il serait temps que je réalisé que le débat démocratique est de la blague.
Que tout n’est que conflit – que l’on gagne ou l’on perd.
Je leur ai répondu que je restais viscéralement démocrate et que je préférais perdre un débat en démocratie que de le gagner par la contrainte.
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Suite et pas fin. J’ai demandé à François De Smet, président de Défi, de participer au débat, vu qu’il est philosophe. Je lui ai soumis deux questions: 1. l’avortement est-il un débat avec une dimension éthique? 2. une instance philosophique/spirituelle comme les évêques de Belgique a-t-elle un droit démocratique à s’exprimer publiquement dans pareil débat, quitte à être contredite ensuite par d’autres ?
Il m’a promis sa réponse d’ici quelques jours. 
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A suivre donc. 
D’ici là, moi je vais me coucher. 

22 réflexions sur « La tentation de la démocrature soft – suite et pas fin 😉 »

  1. « Le simple fait que des « limites légales » continuent à exister dans tous les pays, démontre à suffisance que la balance entre le choix d’une femme enceinte et la défense de la vie à naître, est un délicat exercice ».

    EXCELLENT ! Merci Monsieur L’Abbé.

  2. « Le simple fait que des « limites légales » continuent à exister dans tous les pays, démontre à suffisance que la balance entre le choix d’une femme enceinte et la défense de la vie à naître, est un délicat exercice. »

    Excellent ! Merci Monsieur l’Abbé !

  3. Il y a dans les propos de cette députée quelque chose de « scientiste » : parce que l’avortement relèverait de la science médicale, il échapperait à l’évaluation éthique, comme si ce qui relève de la science et, en particulier de la médecine, échappait de ce fait à pareille évaluation. Mais heureusement, rien, absolument rien, n’échappe à l’évaluation éthique, c’est-à-dire, en effet au débat d’opinion et à l’échange d’arguments. Après, comme tu le dis fort bien, Eric, c’est dans nos pays démocratiques le Parlement qui tranche mais dans quelle société vivrions-nous si ce débat éthique était a priori escamoté? Que ce soit une responsable politique qui affirme cela… voilà qui interroge, tout de même, sur la vigueur intellectuelle de nos démocraties, et de nos élus.

    1. Oui, par contre je vois tout autant de scienticisme de l’autre côté aussi: à dire que si on aurait établit que c’est une vie humaine (basé sur des critères scientifiques comme la présence de battements de cÅ“ur), le débat sera clos. Comme si l’éthique n’avait du coup plus rien à dire même dès qu’on admet cela.

    2. « scientiste  » est, en effet, dans le cas qui nous occupe, un mot plus juste que « scientifique « .

  4. Je trouve cette loi et cette idée d’avoir du coup moins de liberté d’expression stupide aussi.
    Par contre, ça va dans les deux sens. Pour l’abroger il faudra abroger le financement des cultes aussi. Pourtant je ne vous ai pas encore vu militer pour l’abrogation du financement des cultes.

    Puis, que les les non religieux peuvent aussi prétendre aux mêmes privilèges religieux pour leur non religiosité explicite. Ben, on leur donne surtout quelque chose dont on sait d’avance qu’ils en ont pas besoin pour puis leur dire que désormais ils n’ont pas à se plaindre.

  5. Dialogue de sourds… Éric de Beukelaer et Sophie Rohonyi n’emploient pas « morale » dans le même sens. Pour la députée, la morale se confond avec le droit positif, qui s’incarne dans la loi votée démocratiquement. La dépénalisation de l’avortement est à ses yeux morale, puisque légale. Le débat est clos par la loi, et l’allongement du délai pour avorter ne change rien à la nature du problème. Madame Rohonyi a d’ailleurs raison de dire : « Ce qui leur pose problème, ce n’est pas l’extension de la loi, c’est le droit à l’avortement en tant que tel. »
    En revanche, pour le vicaire général, la morale se confond avec le droit naturel, qui s’incarne dans des préceptes moraux, fondés sur la raison. La dépénalisation de l’avortement est légale, mais pas pour autant morale. La loi ne clôt pas le débat et l’allongement du délai aggrave évidemment le problème moral, que la loi, à ses yeux, n’a pas réglé.
    Deux positions irréconciliables parce qu’elles s’appuient sur des prémisses opposées…

    1. Bonsoir. Je pense que votre remarque est très juste. Il me semble que la loi n’évacue pas le choix éthique mais le laisse au libre choix de chacun, en se réservant d’organiser les modalités médicales. Belle soirée. Thierry.

    2. Pour ceux qui n’ont pas fait le droit :
      On fait croire aux gens depuis toujours que ce qui est légal, permis par la loi, c’est bien, tandis que ce qui est illegal, interdit, c’est pas bien.
      Cependant, dans un état réellement démocratique, l’esprit critique citoyen devrait être enseigné à tous, aussi sous forme de dissertations , de faits historiques ( , d’exemples d’actualité.
      Le tout, en communicant de manière verbale non- violente.
      On nous dira que pour celà il faudrait davantage de profs bien formés et que les profs coûtent cher. Pourtant la démocratie est à ce prix.

  6. Bonsoir Éric,
    J’aimerais vous remercier d’avoir exprimé votre opinion. Sur ce type de sujet je suis souvent en désaccord sur certains points. Mais enfin on peut en effet débattre sereinement. Même en terrain miné.
    Belle soirée. Thierry

  7. Eh bien maintenant tu vois ce que cela fait d’etre traité de paria, de citoyen de seconde zone, de sous prolétaire. Ah oui aussi n’oublie pas de me bloquer, comme tu l’as fait pendant des années!

    1. Le rôle d’un prêtre ou de tout autre religieux n’est-il pas justement d’empêcher nos consciences de s’endormir ? Bravo à l’Abbé de Beuckelaer pour son article et merci !

    2. Le rôle d’un prêtre – et de tout autre religieux – n’est-il pas justement d’éviter que nos consciences ne s’endorment ???

  8. Tout cela est de la cathophobie. Mais celle-ci n’est pas reconnue par les catholiques, ceux-ci ne pensant qu à tendre la joue gauche.
    Quand cette cathophobie sera t elle reconnue par les évêques de Belgique par rapport à une islamophobie fantasmée ?.
    Les évêques préfèrent pourtant s occuper de cette soi disant islamophobie que de la réelle cathophobie si forte qu’il ne serait plus permis à un catholique de s exprimer publiquement sur un sujet important. Dire aux catholiques qu ils doivent se taire et se murer dans un grand effacement, c’est de la haine à l encontre de notre communauté.
    La haine du catho c’est de la cathophobie.
    Quand les évêques se réveilleront ils ?
    Quand ceux ci s occuperont ils de la cathophobie plutôt que de l islamophobie ?
    Lisez. ‘ islamophobie mon oeil’ de Djemila Ben Habib ou Islamophobie, intoxication ideologique de Philippe D Iribarne.

    Ouvrez les yeux sur la haine qui nous vise et soyez moins naïfs.

    Ne plus pouvoir exprimer une opinion c est du communisme pur jus.
    Normal en région francophone, 75 pourcent des citoyens votent à gauche voire à l extrême gauche. Ce qui ne présage que le pire à venir selon moi.
    Dans les régimes communistes il ne faisait pas bon être croyant.
    Hélas, eric s en prend toujours aux partis d extrême droite. C’est son fantasme. Où est l extrême droite en wallonne où le ptb fait 20 pourcentage des intentions de voix ??
    Se tromper de combat, c’est déjà le perdre.
    Ceci est une opinion. Mon opinion.
    Réveillez vous autorités catholiques !

  9. Ces réactions sont la conséquence logique de la mode de la petite phrase, qui a réduit votre propos à un titre ronflant sur la « démocrature soft » au mépris des nuances.

    Ce qui est proprement terrifiant d’ailleurs, c’est la manière dont Uyttendaele s’est employé avec verve et sans la moindre gêne à justifier cette manchette qui n’est pas le vôtre, par sa violente injonction à vous taire.

    La deuxième partie de son injonction est d’ailleurs prémonitoire d’un choix dont l’Eglise ne pourra bientôt plus faire l’économie : pour garder sa liberté de parole et d’annoncer l’Evangile, elle devra renoncer à son financement.

  10. Interdit de s’exprimer si on ne partage pas les vues de ceux qui voient (sans morale) l’avortement comme un acte simplement médical? Eric, merci pour ton bon sens et ton courage. Contradiction oblige, pas mal de ceux qui te critiquent ne seraient sans doute pas nés pour te jeter des pierres si leurs ancêtres avaient souscris aux mêmes idées que les leurs.

  11. Dans le fond toutes ces polémiques viennent d un parti qui ne représente absolument rien en wallonnie. Vraiment insignifiant.
    A Bruxelles, leur carburant électoral c’est la haine du flamand et de la Flandre. Demandez à quiconque de décrire leur programme vous aurez une réponse on ne peut plus muette.
    Ce parti moribond qui a donc au cœur de son programme la haine de l autre communauté de Belgique ne méritait pas cette polémique.
    Pourquoi dialoguer avec des haineux ?
    Haineux qui vont bientôt disparaître tant en wallonnie qu à Bruxelles ?

    Ceci est mon opinion.

  12. Pour ceux qui n’ont pas étudié le droit:
    Depuis toujours on fait croire aux gens peu scolarisés que ce qui est permis ( légal) , c’est bien, tandis que ce qui n’est pas permis ( illégal ) c’est pas bien.
    Dans un état vrament démocratique, tous auraient dü avoir accès à des cours’ d’sprit critique citoyens. Avec des dissertations, des faits historiques, des faits d’actualité.
    Le tout après avoir appis à communiquer verbalement de manière non violente.
    Mais ces cours supplementaires, donnés par des profs bien formés, coûteraient cher à l’ état.
    Comme tout ce qui rendrait la Belgique un peu plus démocratique : enseignement gratuit, accueil de migrants, prisons répondant aux normes, soins de santé de qualité pour tous.

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