Badbuzz chez les Enfoirés – Goldman répond.

La nouvelle chanson des Enfoirés « Toute la vie », ne fait pas l’unanimité – c’est le moins que l’on puisse dire. Parfois les commentaires se font féroces. Ainsi le billet d’humeur de Jean-François Lauwens dans « le Soir » de ce jour. Intitulé : « C’est donc officiel : Les enfoirés sont des… enfoirés », il n’y va pas par le dos de la cuillère.

Que s’est-il donc passé ? Jean-Jacques Goldman est, sans sortir de disque depuis 14 ans, la personnalité préférée des Français. D’un coup, il vient de perdre de son aura. Les concerts des Enfoirés sont depuis 20 ans la plus grosse audience télé de l’année. D’un coup, on a envie de zapper celui du 13 mars sur TF1. Quel raté, JJG. Pas toi, pas maintenant, disait Gilardi à Zidane ! Quel raté qui a abouti, jeudi, à la création d’un #TweetecommelesEnfoirés sur Twitter et à voir Jacques Attali, l’homme qui a joué les intermédiaires entre Coluche et Mitterrand et prononcé l’oraison funèbre du père des Restos, y poster ceci : « J’ai toujours détesté les Enfoirés. Leur dernier clip est un monument de vulgarité et de haine des jeunes. Au secours, Michel (ndlr : Colucci)! Le meilleur don est anonyme. Si des chanteurs veulent donner aux Restos, ils feraient mieux de donner 10% des recettes de leurs concerts. » L’objet du délit, c’est donc le clip de la nouvelle chanson des Enfoirés, « Toute la vie ». S’y font face une chorale de jeunes et les chanteurs de la bande (parfois aussi jeunes mais en version riche). Le problème, c’est la collection de clichés prêtés aux « jeunes » et aux « vieux » (en fait « vieux » veut dire « célèbres »). Les jeunes de 2015 ont comme univers des « portes closes », des « nuages sombres », les « dégoûts », les « colères », le « chômage », la « violence », le « sida ». Le message passe mal, c’est le moins que l’on puisse écrire, auprès des jeunes qui se sentent emprisonnés dans une image glauque et méprisante, «J’échange ma jeunesse contre ta caisse ». Mais le pire est ailleurs, dans la réponse des « vieux » (cons), mais alors très très cons genre « T’es en train de fumer ou quoi ?». Sur le thème « Vous, vous avez toute la vie devant vous alors oh on se calme et on attend gentiment son tour » et avec des répliques dignes d’un personnage de sketch de… Coluche : « Tout ce qu’on a il a fallu le gagner / A vous de jouer mais faudrait vous bouger. » Voilà le message des millionnaires de la variété aux jeunes de France. Maxime Le Forestier a-t-il bien lu ces paroles avant de les chanter ? Incendié sur Twitter, le compte des Enfoirés répond péniblement : «  La chanson raconte l’inverse. Elle ne blâme pas, elle encourage. C’est un message d’espoir, pas de fatalité. » C’est possible. C’est même probable. Mais si ce n’est pas clair pour le public, c’est que c’est raté. Et ça l’est, totalement. Dans les années 80, les chansons de Goldman avaient su parler à toute une génération. Mais il ne s’était pas encore reclus hors du monde avec comme complice annuelle une troupe de nantis donnant l’aumône et à la réussite parfois incompréhensible.

Dans la même veine, lire aussi ce qu’écrit une jeune blogueuse : http://www.madmoizelle.com/toute-la-vie-enfoires-325779

A cela Jean-Jacques Goldman répond : « C’est une chanson dans laquelle des adolescents reprochent aux générations qui les ont précédés l’état du monde qu’ils leur laissent : pollution, chômage, violence, dette, misère (c’est un sujet qui n’est pas si fréquent…). Les Enfoirés jouent le rôle des adultes qui leur répondent comme trop souvent : en se dédouanant et avec mauvaise foi, mais en espérant qu’ils feront mieux. Le fait que la jeunesse nous demande des comptes me semble la moindre des choses. Le fait que la chanson se termine en faisant confiance à l’avenir aussi. »

Mon avis ? J’invite chacun à se faire une religion, en allant voir le clip sur « les Inrocks », « L’Obs » ou encore « Le Soir ». Je trouve personnellement la chanson bien tournée, car – comme si souvent chez l’auteur de « Là-bas » – les points de vue sont superposés sans prendre parti, histoire de faire réfléchir. Dans ce cas-ci, le dialogue de sourd entre jeunes et adultes, se lançant des reproches. Ceci étant dit, on peut ne pas aimer, mais je trouve  dommage – et pour tout dire navrant – de voir pour autant remis en cause l’aventure des « Enfoirés ». Dans un monde qui cultive la sinistrose, pourquoi tirer sur les élans de générosité du monde de la variété ?  Bien sûr que Goldman et sa bande ne sont, ni Mère Theresa, ni l’abbé Pierre. Mais, au moins, ils font quelque chose. Et ça, c’est un message – non pas d’abord adressé à la jeunesse – mais aux adultes que nous sommes.

 

 

 

2 réflexions sur « Badbuzz chez les Enfoirés – Goldman répond. »

  1. C’est vrai qu’ils « font quelque chose » mais d’autres initiatives existent et en Belgique aussi, avec des gens du peuple, des gens de tous les jours, qui ne font pas des millions avec leurs disques ou spectacles mais qui prennent sur leur temps et parfois sur leurs sous pour agir en première ligne. Pour moi, les enfoirés, c’est non !

    1. Vraiment pas malins ces « Enfoirés ». Ils auraient dû s’appeler « Les Charlies »: on leur aurait f… la paix au nom de la liberté d’expression!

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