« Le Pain qui Christifie » – Fête du Corps et du Sang du Christ, Année A

 «Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui». (Jean 6, 51-58)

Le dimanche de la fête du Corps et du Sang du Christ – appelé communément « la Fête-Dieu – est d’origine liégeoise. Comme le rappela le pape Paul VI en 1965 : « elle fut célébrée la première fois au diocèse de Liège, spécialement sous l’influence de la Servante de Dieu, sainte Julienne du MontCornillon, et Notre Prédécesseur Urbain IV l’étendit à l’Eglise universelle » (encyclique Mysterium Fidei n°63).

Plus de 750 ans plus tard, cette fête rappelle encore que l’Eucharistie est le sacrement qui – par excellence – exprime l’Eglise : Si le Christ se rend sacramentellement présent dans l’Eucharistie, c’est afin que ceux qui communient à Luisoient « Christifiés », c’est-à-dire qu’ils deviennent présence du Christ dans le monde. «Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui», déclare Jésus. Ou, comme l’enseignait saint Augustin aux chrétiens qui participaient à l‘Eucharistie : « Deviens ce que tu contemples, contemple ce que tu reçois, reçois ce que tu es : le Corps du Christ ».

« Trois fois Saint » – Sainte Trinité, Année A

«  Dieu a tant aimé le monde, qu’Il a donné son Fils unique ». (Jean 3, 16-18)

La Trinité n’est pas un problème de mathématiques. Pourtant, comme l’amour ne s’additionne pas, mais se multiplie – ne dit-on pas le « Dieu trois fois Saint » ? – chacun peut vérifier que 1 X 1 X 1, cela fait toujours 1. La Trinité – c’est la foi chrétienne en un seul Dieu multiplié en trois Personnes.

Bien au-delà d’une question de calcul, la Trinité est Mystère d’amour. Le peu que la révélation chrétienne nous ait donné de percevoir de l’infinité de Dieu, est que celui-ci est une éternelle Relation de Don : entre le Père qui est Source de tout Don, le Fils à Qui le Don est destiné et qui le rend au Père dans l’unité de l’Esprit – qui est Don.

Le Don nous précède : « Dieu a tant aimé le monde, qu’Il a donné son Fils unique », mais l’homme est créé à l’image de Dieu. Voilà pourquoi nous sommes des êtres relationnels et voilà pourquoi seul le Don de nous-mêmes nous fait rejoindre notre vérité profonde. Devenir disciple du Christ et vivre son baptême, c’est dans l’Esprit s’unir au don du Fils pour devenir enfant du Père.       

Alerte rouge sur billet vert – La Libre p.33

Ma chronique mensuelle dans le quotidien La Libre, initialement prévue pour le mois de mai, a été différée suite à la polémique sur la laïcité (cf. Chronique du 6 mai: « Oui à la laïcité. Non au laïcisme » )
Comme elle traite de la santé du dollar, la Rédaction du journal a décidé de la publier ce 1er juin en sa page 33, car il s’agit de la date butoir, accordée au Congrès américain pour relever le plafond de la dette publique de l’Etat et ainsi éviter une paralysie des services publics.
Vu le danger d’un tel blocage pour la confiance dans le billet vert, un accord entre démocrates et républicains va être trouvé – chose exceptionnelle, par les temps qui courent. La suite reste à écrire…
Pour lire ma chronique du mois de juin, cliquez sur: « Alerte rouge sur billet vert » 
Merci à La Libre de m’offrir cet espace de réflexion.

« Souffle intérieur » – Pentecôte, Année A

« Il répandit sur eux son souffle et leur dit : « Recevez l’Esprit Saint » (Jean 20 19-23)

Il y a quelques années, j’attendais sur le parvis d’une église du centre-ville que des funérailles commencent. Et je vis un petit enfant jouer devant le cercueil de son arrière-grand-père. Image d’une vie qui file comme l’air.

Et chacun de se demander ce qui n’expire pas. La réponse est : « le souffle ». C’est le même air qui passait dans les poumons du défunt et de son arrière-petit-fils. Mais le souffle est surtout intérieur : celui de l’Esprit – cette Force d’En-Haut qui nous « inspire ». Comme le dit le chant traditionnel « Veni Creator Spiritus », l’Esprit est « l’hôte très doux de nos âmes, adoucissante fraîcheur ».

Le nombre de nos années est court. Vivons donc à pleins poumons spirituels. Demandons l’Esprit du Christ pour nous et pour tous ceux qui nous sont confiés. En ce dimanche de Pentecôte, demandons-Le tout particulièrement pour ces jeunes dans notre diocèse qui reçoivent le sacrement de la Confirmation – don spécial du Souffle intérieur.

«  Gloire à Dieu » – 7° dimanche de Pâques, Année A

« Glorifie ton Fils, afin  que le Fils Te glorifie. » (Jean 17, 1-11)

Nombreux sont nos contemporains qui rejettent un Dieu dont la « gloire » écraserait toute liberté humaine. Pour comprendre l’Evangile, c’est cette représentation de la « gloire » qu’il s’agit de changer.

La gloire de Dieu n’a, en effet, rien à voir avec le phantasme de toute-puissance qui écrase notre liberté. Au contraire, la gloire de Dieu est celle de l’amour qui triomphe quand l’humain se libère. Tout comme la gloire de parents, est de voir leurs enfants devenir des adultes responsables – de même, la gloire de Dieu est de nous aider à devenir des humains, tenant débout dans notre cœur et notre âme.

L’Esprit du Ressuscité nous aide, en effet, à croître spirituellement. Au cours de cette ultime semaine qui nous sépare de la Pentecôte, prions donc chaque jour pour ce Don de l’Esprit qui – en nous libérant de nos peurs – glorifie notre Père du ciel.

«  Esprit de liberté » – Solennité de l’Ascension, Année A

« Et moi, Je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde » (Matthieu 28, 16-20)

Si le Ressuscité avait voulu nous garder sous sa coupe, Il se serait contenté d’apparaître de temps en temps dans les églises ou au coin des rues. Plus besoin d’Evangile, de Vatican, de curés et chacun serait convaincu…

Convaincu, oui. Croyant, non. Il faut être libre pour vivre l’aventure de la foi. Le Christ – qui est Liberté suprême – ne s’impose pas à notre conscience. Avec l’Ascension, Il retourne dans la gloire de Son Père et nous envoie Son Esprit.

C’est cet Esprit de liberté qui nous guide vers toutes les nations, pour annoncer la Bonne Nouvelle et baptiser au nom du Père, du Fils et de l’Esprit. Neuf journées séparent l’Ascension de la Pentecôte – fête du don de l’Esprit. Prions chacune de ces neuf journées. Demandons que le Souffle de Dieu nous renouvelle.  Avec l’Esprit, le Christ « est avec nous tous les jours, jusqu’à la fin du monde ».

Oui à la laïcité. Non au laïcisme. – La Libre p.49

Pour ce mois de mai, j’avais écrit une chronique sur la santé du dollar, dans le cadre de l’économie mondiale.
Vu les récentes polémiques, celle-ci sera publiée en juin (elle sera malheureusement encore d’actualité).
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Je n’ai pas souhaité lui répondre point par point, pour que notre échange ne tourne au bac-à-sable. Je le ferai de vive voix, la prochaine fois que je le verrai.
Je me contente simplement de préciser deux points:
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– Je rappelle que, si on lit ce que j’ai écrit sur mon blog, JAMAIS je n’ai assimilé la députée Rohonyi à des forces non démocratiques. J’ai simplement signalé que le mode de raisonnement qu’elle maniait par rapport aux évêques sur l’avortement, était symétrique à celui qu’utilise l’ultra droite quand des responsables catholiques parlent d’immigration: « ceci n’est pas un problème éthique. Vous n’avez donc pas à vous en mêler ». Mon propos n’était donc pas de faire l’amalgame, mais d’interpeller un parti démocratique que je respecte, sur son mode de communication.
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– François dit que je communique de façon « finement jésuite », ce qui dans sa bouche ne doit pas être un compliment.  Puis, il déclare qu’il n’est « pas reproché aux évêques de s’exprimer, mais bien d’interférer ». Euh?… Quelqu’un peut décoder cette réponse d’une clarté… modérée ? En quoi, les évêques « interfèrent » quand ils s’expriment sur un sujet de société ? Si ce n’est qu’ils ne sont pas d’accord avec la position de Défi. Est-ce cela, qui ne va pas?
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Ma chronique de ce samedi 6 mai se veut une réponse sur le fond, bien au-delà de la polémique du jour: qu’est-ce que la laïcité politique?
Ici, je ne vise plus personne en particulier, mais bien une question de principe sur laquelle je ne transigerai jamais: chaque instance de la société civile a voix au chapitre dans un débat démocratique. Vouloir en exclure des représentants d’un culte (et pas ceux qui représentent la laïcité philosophique) n’est pas compatible avec la liberté d’opinion.
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Merci à La Libre de m’offrir cet espace d’expression.

Couronnement – Charles III face à deux enfants. 

Il m’a été donné de commenter ce jour, en compagnie du chanoine Jack Mc Donald (président de la Communion anglicane de Belgique) et quelques experts, le couronnement de Charles III sur les antennes de LN24.

Voilà une cérémonie qui remonte du fond des âges et mélange allègrement éléments de l’ancien testament, traditions saxonnes, liturgie moyenâgeuse et… modernité (place des femmes, des personnes de toutes origines et de la société méritocratique).
On aime, ou on n’aime pas. Personnellement, j’ai été touché par cette grande solennité, paradoxalement matinée de sobriété.
Il y a un génie du symbole chez les Britanniques, comme chez les Japonais: deux îles qui furent des empires. Deux pays qui inventèrent la plupart des sports et arts martiaux de la planète. Deux royaumes avec une symbolique hors du temps: tout en faste pour Albion, tout en retenue au pays du soleil levant.
Dans ces deux îles, le monarque a tous les honneurs, mais aucun pouvoir. Par contre, le premier ministre britannique – un des politiciens les plus puissants de la planète – n’a pas le droit de s’asseoir quand le roi ouvre la session parlementaire. Le pouvoir réel est rabaissé, alors que le pouvoir symbolique est rehaussé.

Deux enfants m’ont frappé à l’occasion de ce couronnement :
D’abord Samuel, le jeune page de la chapelle royale, qui accueillit le roi à l’abbaye de Westminster par ses mots : « Votre Majesté, comme enfants du Royaume de Dieu, soyez la bienvenue au nom du Roi des rois. » Et Charles III de répondre: « En Son nom et à Son exemple, je viens – non pas pour être servi – mais pour servir ».  Tant de bons sentiments pourraient faire sourire. Moi, cela m’a touché.
Ensuite, il y eut le jeune prince Louis, cadet des princes de Galles. La presse sourit à ses facéties. Elle reproduit une fois de plus l’opposition entre l’aîné sage (Georges) et le cadet rebelle. Après le déchéance d’Andrew et l’exil d’Harry, cela devrait inviter à la prudence.
Comme tout système, la monarchie porte en elle des talons d’Achille et la place des cadets (surtout masculins) en fait partie.
Ces gens ne sont pas plaindre, car ils ont tout ce dont rêve tant de leurs concitoyens. Oui, mais voilà, parfois – « avoir tout » ne suffit pas, si on ne trouve pas sa place.
Cette place existe pourtant: un prince cadet pourrait exercer un rôle sociétal de premier plan et défendre de nobles causes, avec une liberté dont ne jouit pas l’héritier du trône. Souhaitons pareil avenir au jeune prince Louis.

«  Le miroir et l’icône » – 5° dimanche de Pâques, Année A

« Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie… Qui Me voit, voit le Père » (Jean 14, 1-12)

Nous ressemblons tous un peu à la belle-mère de Blanche-Neige, obsédés par notre image (notre look, disent les jeunes) : « Miroir, miroir – dis-moi si je suis le plus beau, la plus belle ? » Chercher à se rassurer en comblant notre besoin narcissique de plaire, est un des puissants ressorts de la société de consommation. Les publicités jouent à fond sur ce mécanisme : « Portez ces vêtements de marque… Roulez avec telle voiture… Votre look en sera amélioré. » Si nous n’y prenons garde, même Dieu en est réduit à devenir un miroir idéalisé. Les catholiques conservateurs prient un Dieu de l’ordre établi.  Les chrétiens progressistes invoquent un Jésus guérillero. Bref, dans les deux cas, une image du divin qui renforce les besoins narcissiques.

Le Christ, Lui, invite à une conversion – un renversement des perspectives. Si nous croisons Son regard en Esprit et Vérité, nous n’y verrons pas un miroir, mais une icône: « Qui Me voit, voit le Père ». Accepter de cheminer sous ce Regard de feu, c’est se décentrer de ses petites certitudes narcissiques, pour se recentrer sur notre Vérité profonde – celle d’enfant du Père. Et naître à la vie spirituelle : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ».

La tentation de la démocrature soft – suite et pas fin 😉

Bon, bon… Pour ce qui est de passer un premier mai au calme, c’est plutôt raté.
Quelle foire d’empoigne suite à mon article sur le blog.
Et ça continue, encore et encore, sur les réseaux sociaux.
Et dire qu’il y a des gens qui ne font que cela toute la journée.
Je les plains, car moi – je suis déjà saturé.
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Résumons le florilège des réactions les plus critiques :
Il y a ceux qui trouvent mes propos « abjects »… Voilà pour la nuance.
Il y a ce professeur de droit qui signale que je pourrais être pénalisé aux termes de l’article 268 du code pénal. Je suis juriste et… je n’ai pas compris. Il ajouta que, comme les ministres du culte sont payés par l’Etat, ils devraient se taire… Alors que les ministres de la laïcité seraient donc payés par l’Etat pour parler? Je n’ai pas compris, non plus.
Certains me reprochent d’avoir soupçonné la députée Sophie Rohonyi d’appartenir à l’ultra-droite. Alors que – relisez ce que j’ai écrit –  j’ai simplement signalé que « dénier voix au chapitre aux évêques dans un débat de société », ressemblait à la réaction de l’ultra-droite quand l’Eglise parle d’immigration. Si je fais cette comparaison, c’est justement parce que la députée Rohonyi n’a rien de commun avec l’ultra-droite. Ce fut donc une façon d’avertir de l’inconséquence démocratique de pareille attitude.
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La députée Rohonyi, elle-même, a publié une réaction en signalant que l’avis « unanime » des experts universitaires transformait une fois pour toute le débat sur l’avortement en débat de santé publique, sans lien (je la cite) avec une « faute morale ».
C’est elle qui parle de « faute ». Pas moi.
J’ai simplement rappelé – et je le maintiens – que tous les avis universitaires n’enlèveront pas au débat sur l’avortement sa dimension éthique. (Plusieurs professeurs de médecine m’ont écrit pour me remercier de l’avoir rappelé.)
Le simple fait que des « limites légales » continuent à exister dans tous les pays, démontre à suffisance que la balance entre le choix d’une femme enceinte et la défense de la vie à naître, est un délicat exercice.
Si la science a son mot à dire dans ce débat, l’éthique enrobe ce dossier de part en part.
Toutes les femmes le savent bien. Aucune ne juge l’avortement comme un acte banal.
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Il y a enfin tous ceux qui m’ont objecté que les curés devaient rester dans leur sacristie et ne pas se mêler de débats de société.
Ce sont les mêmes qui applaudissaient quand le cardinal Danneels co-signa avec le président du Centre d’Action Laïque, un appel pour des critères de régularisation pour les sans-papiers.
Cherchez la logique.
Ceux-là donnent un droit illimité à la parole à la laïcité (réputée rationnelle) et pas au cultes (réputés obscurantistes).
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La laïcité politique à laquelle j’adhère, signifie qu’aucune conviction ne peut  supplanter la majorité démocratique, mais que chacune peut – et même doit – pouvoir s’exprimer. Jamais je n’accepterai de vivre en devant restreindre mon droit à la liberté d’opinion… Et la critique qui l’accompagne.
Je récuse donc une laïcité « dogmatique » qui fait taire les convictions spirituelles et ne ne donne voix qu’au libre examen.
Je le répète: je ne suis pas un citoyen de seconde zone et – comme toute instance représentative d’une communauté – les responsables d’un culte ont voix au chapitre dans tous les débats de société.
Après, c’est le parlement qui tranche. Telle est la démocratie.
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La partie la plus inquiétante du débat du jour s’est d’ailleurs déroulée en néerlandais.
Où des déçus de la démocratie m’ont écrit qu’il serait temps que je réalisé que le débat démocratique est de la blague.
Que tout n’est que conflit – que l’on gagne ou l’on perd.
Je leur ai répondu que je restais viscéralement démocrate et que je préférais perdre un débat en démocratie que de le gagner par la contrainte.
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Suite et pas fin. J’ai demandé à François De Smet, président de Défi, de participer au débat, vu qu’il est philosophe. Je lui ai soumis deux questions: 1. l’avortement est-il un débat avec une dimension éthique? 2. une instance philosophique/spirituelle comme les évêques de Belgique a-t-elle un droit démocratique à s’exprimer publiquement dans pareil débat, quitte à être contredite ensuite par d’autres ?
Il m’a promis sa réponse d’ici quelques jours. 
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A suivre donc. 
D’ici là, moi je vais me coucher.