« Le goût de Dieu » – 5e dimanche de l’Année, Année A

« Vous êtes le sel de la terre. » (Matthieu 5, 13-16)

L’Esprit-Saint nous donne le goût de Dieu. Pas un goût doucereux, qui fait de nous des béni-oui-oui.  Pas un goût amère, qui fait de nous d’éternels frustrés. Pas un goût fade, qui fait de nous des êtres apathiques. Mais bien un goût pimenté. Un goût qui réveille. Un goût qui éveille à la vie, au sens de Dieu et à l’amour des hommes.

Les chrétiens sont moins nombreux aujourd’hui ? Indéniablement – mais nul besoin de mettre beaucoup de sel sur les aliments. Une petite pincée suffit. A condition que ce sel ait du goût, car « si le sel se dénature, comment redeviendra-t-il du sel ? Il n’est plus bon à rien ».          

« Lumière des nations » – Présentation du Seigneur

« Mes yeux ont vu le salut, que tu as préparé à la face des peuples. » (Luc 2, 22-40)

Quarante jours après la Nativité, l’Eglise célèbre la présentation de l’enfant Jésus au temple. Ce faisant, Marie et Joseph se conforment à l’usage qui voulait que les parents offrent leur premier-né au Seigneur, puis le rachètent par un don symbolique (pour les couples au revenu modeste : un couple de tourterelles ou deux petites colombes)

Cet épisode est chargé de sens : Voici que le Christ – présence de Dieu sur terre – rentre dans le temple, qui en Israël est la demeure de Dieu. Avec la présentation de l’Enfant-Dieu au temple, la première alliance – scellée avec le peuple élu – rencontre l’alliance nouvelle et éternelle pour toute l’humanité. Les bougies que nous portons en procession en cette fête, célèbrent l’Enfant qui illumine le monde : « lumière pour éclairer les nations païennes et gloire d’Israël ». Au temple, ce sont deux vieillards qui jubilent en annonçant l’accomplissement de la promesse. Tout en avertissant que l’aube nouvelle passera par la nuit du Golgotha : « Vois, ton Fils qui est là, provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division. Et, toi-même, ton cœur sera transpercé par une épée. »     

#Brexit- Quand Winston #Churchill répond à @Nigel_Farage

« Nous aimons l’Europe, mais haïssons l’Union européenne ». Ainsi, scanda Nigel Farage avec toute sa gouaille, lors de son discours d’adieu au parlement européen« Et nous lancerons un débat à travers le continent, pour que d’autres pays suivent le Brexit… C’est la lutte du populisme contre le globalisme »….  Voilà un langage qui doit faire rougir de plaisir tous les empires – déclinants ou émergeants – qui rêvent de diviser l’Europe pour mieux y régner. 

Qu’il me soit permis de lui répondre avec les mots de la figure tutélaire de tant de Brexiters, soit Winston Churchill himself. Car – oui – le grand homme fut le père du rêve européen. Sans cependant jamais y inclure le Royaume-Uni. 

Le 19 septembre 1946, c’est dans un continent en ruines qu’il prononça à Zurich un discours, traçant les lignes du destin européen : « Ce continent magnifique, qui comprend les parties les plus belles et les plus civilisées de la terre, qui a un climat tempéré et agréable et qui est la patrie de tous les grands peuples apparentés du monde occidental. L’Europe est aussi le berceau du christianisme et de la morale chrétienne. Elle est à l’origine de la plus grande partie de la culture, des arts, de la philosophie et de la science du passé et du présent. Si l’Europe pouvait s’unir pour jouir de cet héritage commun, il n’y aurait pas de limite à son bonheur, à sa prospérité, à sa gloire, dont jouiraient ses 300 ou 400 millions d’habitants. En revanche, c’est aussi d’Europe qu’est partie cette série de guerres nationalistes épouvantables (…) Ces horreurs, Messieurs, peuvent encore se répéter. Mais il y a un remède (…) Il consiste à reconstituer la famille européenne, ou tout au moins la plus grande partie possible de la famille européenne,  puis de dresser un cadre de telle manière qu’elle puisse se développer dans la paix, la sécurité et la liberté. Nous devons ériger quelque chose comme les États-Unis d’Europe. (…) J’en viens maintenant à une déclaration qui va vous étonner. Le premier pas vers une nouvelle formation de la famille européenne doit consister à faire de la France et de l’Allemagne des partenaires. (…) Mais j’aimerais lancer un avertissement. Nous n’avons pas beaucoup de temps devant nous. Nous vivons aujourd’hui un moment de répit. Les canons ont cessé de cracher la mitraille et le combat a pris fin, mais les dangers n’ont pas disparu. Si nous voulons créer les États-Unis d’Europe, ou quelque nom qu’on leur donne, il nous faut commencer maintenant. »  

En ce Brexit Day, je souhaite sincèrement good luck à ce Royaume-Uni, dont je suis si proche de coeur. Dans une précédente chronique, j’ai expliqué pourquoi l’Union doit tout faire pour ne pas couper les amarres avec Albion. Cependant, je demande également aux Britanniques de ne pas chercher à saborder l’Union. Ils torpilleraient le rêve de Churchill, qui avait compris mieux que quiconque, que – sans un tel projet – le Continent retrouverait le chemin de la division et – je ne l’exclus nullement – de la guerre. 

Les « nonnes » et les machos – réponse amicale à un billet d’humeur

Voici le billet d’humeur de Marc Metdepenningen, paru en p.8 du quotidien « le Soir » de ce 29 janvier. Ma réponse lui fait suite:

Le burn-out des nonnes, témoin du machisme d’une Eglise hors des temps modernes

Les 649.000 religieuses de l’Eglise catholique qui travaillent dans des couvents ou des institutions à travers le monde sont des esclaves de prêtres et d’évêques pour lesquels elles effectuent des prestations ménagères non rémunérées et sans contrat d’emploi. Elles sont aussi parfois victimes d’abus sexuels que la honte leur impose de ne pas révéler.

Le magazine Femmes Eglises du monde , inséré dans L’Osservatore romano , l’organe officiel du Saint-Siège, rendait compte récemment de la situation dégradée et anachronique des nonnes, réputées être chacune épouse de Jésus (qui n’est pourtant pas réputé polygame). Elles sont aussi victimes de burn-out lié à l’amplification des tâches qui leur sont imposées. Les travaux ménagers dans les couvents ou au bénéfice des desservants mâles de l’Eglise se sont accrus en parallèle de la décroissance de leurs effectifs (-10 % au cours de la décennie écoulée et jusqu’à -21 % aux Etats-Unis). La distribution des tâches dévolues aux religieuses s’est amplifiée, à raison de l’appauvrissement des vocations. Elles sont en outre assumées par des nonnes de plus en plus âgées qui n’ont plus le même rendement.

Cette situation de burn-out et de stress amplifié, constatée récemment par l’Union internationale des supérieures générales qui chapeaute plus de 1.900 congrégations, réduit aussi à peau de chagrin la finalité des nonnes dont la vocation, certes volontaire, est celle de la prière ou de la médiation, supplantée de plus en plus par les services à rendre aux « hommes de l’Eglise », qui leur refusent par ailleurs l’accès à la plénitude de leur engagement religieux en leur refusant l’accès à la prêtrise.

Les « femmes de l’Eglise » sont des « sous-hommes ». Les vœux de pauvreté qu’elles formulent à leur entrée dans les congrégations les privent de salaire, de droits sociaux. Rome a pris conscience du problème. L’abandon de la vie religieuse laisse ces femmes sans droits à une existence sans ressources. Une maison pour religieuses défroquées a été ouverte par le Vatican. Des ex-nonnes ont été contraintes à des pratiques de « prostitution de survie », selon le cardinal Joao Braz de Aviz.

Le burn-out des nonnes révèle une fois de plus le déphasage total de l’Eglise en regard du siècle dans lequel elle se doit d’évoluer. Leur cause est aussi un défi social, comme un cri contre le machisme structurel qui persiste au sein d’une Eglise vieillotte et devenue incompréhensible dans son respect des droits fondamentaux.

Marc Metdepenningen

Ma réponse à ce billet d’humeur:

J’ai de la sympathie pour Marc Metdepenningen, bon journaliste et intervenant régulier sur ma page FaceBook. Cependant – comme je le lui ai écrit – son billet d’humeur du jour dans le quotidien « le Soir » est tellement caricatural, qu’il en devient insignifiant. Et manque donc sa cible.  

Que l’Eglise – comme tant d’autres pans de la société – doive continuer à se guérir du patriarcat, je ne puis le contester. Que le statut des religieuses mérite une actualisation, est une réalité, régulièrement discutée dans le monde du droit canonique, auquel j’appartiens. Il s’agit, en effet, de traiter sur un total pied d’égalité, les consacrés masculins et féminins, sans que ces dernières vivent une forme de tutelle des premiers. Que via un mouvement #Meetoo dans l’Eglise, des religieuses commencent à secouer le cocotier de prélats dominants et indignes, est salutaire et à encourager. Que la précarité économique de certaines religieuses soit dénoncée, toujours d’accord. 

Cependant, parler de « déphasage total » de l’Eglise, est injuste. Il existe une évolution dans l’Eglise, quant à la place des femmes en général et des religieuses, en particulier. Exemple:  comme Vicaire épiscopal, membre du conseil de l’évêque, j’ai plusieurs collègues féminines. Impensable, il y a 25 ans.  Le chemin à parcourir est encore long – je suis d’accord… Mais cela ne vaut pas que pour l’Eglise. Le patriarcat a-t-il complètement disparu du monde de l’entreprise, de la politique, voire même de la presse? Le burn-out est-il propres aux religieuses? Ne le rencontre-t-on pas tout autant chez des prêtres, évêques, businessmen, journalistes, etc.  

Mais surtout – décrire les religieuses du monde entier comme des « esclaves de prêtres ou d’évêques etc. etc », est une insulte à toutes ces femmes consacrées, dont beaucoup vivent une vocation solaires et inspirantes, dignes héritières en cela des Hildegard von Bingen, Thérèse d’Avila, mère Theresa et soeur Emmanuelle. Réduire a priori toutes les « nonnes » au rang de victimes sans aucune prise sur leur choix de vie et épanouissement, me semble de la part de l’auteur de ce billet d’humeur, une attitude paradoxalement fort… machiste.  

« Hors-piste » – 3e dimanche de l’Année, Année A

« Galilée, toi le carrefour des païens : le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière. » (Matthieu 4, 12-23)

Dès le début de sa mission publique, Jésus quitte Nazareth et choisit de s’installer dans un lieu exposé à l’incroyance. Proche de régions non-juives et lieu d’échange commerciaux, la Galilée était taxée par l’élite religieuse de Jérusalem de « carrefour des païens ». A la suite de Jésus, les chrétiens sont invités à « sortir » de leurs églises. C’est ce que rappela le pape François lors de sa toute première audience générale : « Il faut  sortir à la rencontre des autres, nous rendre proches pour porter la lumière et la joie de notre foi . Toujours sortir!»

C’est en Galilée que Jésus appelle ses premiers disciples. Pour ce faire, il ne fréquente pas les écoles théologiques. C’est de quelques pécheurs du lac de Tibériade, qu’il fait des « pêcheurs d’hommes ». A sa manière, chaque baptisé – même sans formation religieuse particulière – est appelé à être un « pêcheur d’homme ». Cela signifie, comme le rappelle notre Pape, de sortir des églises pour annoncer l’Evangile sans avoir peur de notre société sécularisée – « carrefour des païens ».   

« Vue d’Esprit » – 2e dimanche de l’Année, Année A

« L’homme sur qui tu verras l’Esprit descendre et demeurer (…) C’est Lui le Fils de Dieu. » (Jean 1, 29-34)

Le temps de la Nativité se termine. Jusqu’au début du carême, nous entrons dans le cycle des dimanches, dits « ordinaires ». Les prêtres et diacres portent à cette occasion des vêtements liturgiques verts – couleur de l’espérance. 

L’Evangile de ce dimanche part de l’expérience du baptême de Jésus avec le témoignage de Jean : « J’ai vu l’Esprit descendre du ciel (…) et demeurer sur Lui ». Ce passage nous invite à redécouvrir nos propre baptême. Vivre son baptême, c’est laisser l’Esprit demeurer concrètement au cœur de nos vies. Il s’agit donc de vivre nos joies et nos peines sous le regard de Dieu. Face à une épreuve, combien de fois ne nous enfermons-nous pas dans une réaction purement « mondaine » – avec colère, frustration, jalousie, orgueil… ? Quand cela nous arrive, arrêtons-nous un moment et prions l’Esprit. Il ne réglera pas notre problème, mais nous aidera à le vivre comme le Christ nous y invite – c’est-à-dire dans la paix intérieure et l’amour du prochain.  

En cette semaine de prière pour l’unité des chrétiens, souvenons-nous que ce qui rassemble catholiques, orientaux, orthodoxes, anglicans et protestants, est bien plus puissant que ce qui nous sépare : le Christ, notre Unité – dans la vie, la mort et la résurrection duquel nous sommes baptisés par la puissance de l’unique Esprit, pour vivre le Royaume en enfant du Père. 

En Lui, J’ai mis tout mon amour… – Baptême du Seigneur, Année A

« C’est moi qui ai besoin de me faire baptiser par toi, et c’est toi qui viens à moi ! » (Matthieu 3, 13-17)

Les premiers chrétiens étaient surpris d’apprendre que Jésus avait reçu le baptême de Jean. Comment s’expliquer que Celui qui est sans péché, reçoive un baptême de conversion – un baptême destiné aux pécheurs ? D’où la remarque du Baptiste : « C’est moi qui ai besoin de me faire baptiser par toi, et c’est toi qui viens à moi ! »  

Mais voilà – avant d’entamer Sa mission publique, le Christ se rend pleinement solidaire du destin des hommes. J’ai visité le lieu où – selon les Ecritures – Jean baptisait. Le fleuve y est boueux, car il charrie toutes les impuretés transportés depuis sa source. Celui qui est plongé dans le Jourdain à cet endroit, ressort de l’eau plein de boue – comme chargé du poids de péché des hommes. En demandant le baptême de Jean, c’est de cette boue humaine que le Christ se charge.

Jésus se rend solidaire de notre condition pécheresse pour nous rendre solidaire de son intimité avec le Père dans l’Esprit. Par notre baptême chrétien, nous sommes plongés dans la vie et la mort du Christ pour ressusciter avec Lui. Lui se charge de notre boue, afin que nous soyons revêtus de la lumière de Celui dont la Voix du ciel déclare: « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en Lui J’ai mis tout mon amour. »        

Epiphanie du Seigneur, Année A

« Les mages ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe ». (Matthieu 2, 1-12)

« Epiphanie » signifie en grec : « manifestation ». Dans le calendrier chrétien, cette fête est plus ancienne que celle de la Nativité (fixée en 354 par le pape Libère à la date du solstice d’hiver – soit le 25 décembre). Jusqu’au milieu du IVe siècle, se célébrait au cours de l’épiphanie toutes les manifestations du Christ sur terre : de sa naissance à son premier miracle, lors des noces de Cana. 

Aujourd’hui, l’Eglise latine fête l’Epiphanie avec le récit des mages : elle voit dans le périple de ces trois sages suivant l’étoile depuis fort loin, le signe de la manifestation de la lumière du Christ à toutes les nations. En ce dimanche de l’Epiphanie, prions donc spécialement avec nos frères chrétiens du monde entier. (Pensons tout particulièrement aux chrétiens d’Orient). Race, langue, culture nous séparent – mais le Christ est la grande lumière qui fait notre unité. Comme les mages, venons l’adorer et offrons-lui, avec cette année nouvelle –  toutes nos réussites (l’or, symbole de tout ce qui est précieux), tous nos échecs et souffrances (la myrrhe, une herbe amère) et toutes nos prières (l’encens, ce parfum dont la fumée monte vers le ciel). 

Oui, mettons-nous en route en 2020. Suivons l’étoile. Allons vers l’Enfant de la crèche, qui manifeste la lumière de l’amour de Dieu pour notre monde.