Qu’elle est la portée exacte des actuels remous politico-médiatiques autour du fils cadet du Roi des Belges ? Sont-ils la preuve que la monarchie constitutionnelle est un système suranné ? La plupart des démocrates se sentent républicains quand ils vivent en république et monarchistes quand ils habitent un royaume. Autant dire que la différence entre les deux régimes constitutionnels est vécue paisiblement par la majorité de nos concitoyens. Ceci étant dit, le choix entre les deux systèmes – monarchie constitutionnelle ou république – n’est pas totalement anodin. La monarchie place l’attachement émotionnel à une famille au sommet de l’Etat, là où la république privilégie l’arithmétique électorale et donc le domaine de la raison.
Selon moi, les deux archétypes de ces régimes sont, d’une part la monarchie britannique et de l’autre, la république américaine. Au Royaume-Uni, toute la pompe officielle va à la famille royale, qui pourtant n’exerce pas la moindre once de pouvoir politique. Son rayonnement est du domaine de l’émotion. Le mariage de William et Kate sera un peu celui de tant d’autres jeunes britanniques qui osent, aujourd’hui encore, l’aventure du couple; tout comme le douloureux divorce de Charles et Diana fut vécu comme la vitrine publique du naufrage de tant d’autres mariages. Par équilibre, le vrai pouvoir politique britannique est – quant à lui – rabaissé symboliquement : la demeure du premier-ministre ressemble à une vulgaire maison de notaire et le chef du gouvernement n’a même pas le droit de s’asseoir quand le souverain fait son discours au parlement. Tout autre est la situation aux Etats-Unis : la sobre rationalité électorale joue jusqu’au sommet de l’Etat. Les élections présidentielles sont très dures, mais désignent un vrai « chef ». Ce dernier n’a d’ailleurs droit qu’à deux mandats, afin d’éviter toute forme de « dictature à vie ». Le chef est reconnu par tous, mais reste l’homme d’un seul camp : demandez à de nombreux républicains ce qu’ils pensent de leur président démocrate et vous aurez souvent la même réponse que celle de nombreux démocrates, alors que le président était républicain…
Bref, choisir entre la monarchie constitutionnelle et la république, c’est un peu comme choisir entre le monde de Tintin et celui de Largo Winch. Tintin, c’est « la ligne claire » : un dessin simple et des personnages typés. Tout lecteur sait bien que l’histoire contée n’est pas « réaliste » et pourtant il se dégage de l’ensemble une émotion qui fait toucher au « plus-que-réel ». Il en va de même en monarchie : tout le monde sait bien que les Windsor ou les Saxe-Cobourg sont des gens comme les autres, mais le principe monarchique investit une dynastie du poids émotionnel de représenter toute une nation. La république, elle, c’est plutôt le monde de Largo Winch : un univers réaliste qui se calque froidement sur la réalité telle qu’elle est. De même, la république reproduit l’arène politique jusqu’au plus haut sommets de l’Etat. Un des deux systèmes est-il supérieur à l’autre? Tout est une question de choix et de préférence subjective… Quand le couple impérial japonais s’incline devant les victimes du Tsunami, chacun sent bien confusément que c’est tout le Japon qui s’agenouille devant la détresse de ses concitoyens. Essayez donc de symboliser cela avec autant de force en république. Je vous donne à parier une boîte de biscuit « choco-prince de Beukelaer » que vous n’y arriverez pas. Ceci étant dit, comme tout système, la monarchie constitutionnelle a son talon d’Achille : un président peut tomber sans que le pays vacille, mais quand c’est la famille royale qui est mise en cause, la crise de régime n’est jamais loin. On n’en est pas là avec l’actualité du jour, mais ceci explique qu’une affaire politiquement mineure, prenne soudainement une telle place sur la scène politico-médiatique. Parce qu’ils touchent à l’émotion, les symboles sont puissants mais aussi explosifs. Voilà pourquoi je porte la famille royale de mon pays dans la prière, tout comme je prie pour nos politiciens. Les premiers sont là par naissance et les second par choix du peuple. Mais tous sont au service du bien commun.
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Super-salaires : et pendant ce temps-là, à Versailles…
Le fait est assez rare pour être souligné : les édito’s du Soir et de La Libre (lire ci-dessous) traitaient ce matin du même sujet – les super-salaires de nos super-patrons. La question mérite réflexion, car elle touche de près aux trois grandes dimensions qui structurent la vie en société : l’avoir (dimension économique), le pouvoir (dimension politique) et le valoir (dimension morale).
L’avoir, tout d’abord… La première raison qui me fait penser que des super-salaires ne sont pas opportuns, est bassement économique. Il est normal qu’un patron – surtout compétent – soit mieux, voire bien mieux, payé que ses employés. Mais quand le salaire du « boss » n’a plus rien de commun avec celui de ses collaborateurs, alors un fossé psychologique se creuse et celui-ci est fatal pour – employons un terme bien marketing – le « team spirit ». Comment, en effet, sentir qu’on fait partie de la même entreprise, quand il y a d’une part les demi-dieux qui ne circulent qu’en hélicoptère et passent leurs vacances sur leur super-yacht et puis, de l’autre, la masse des gens normaux qui ont de bêtes petits soucis de gens normaux ? A l’armée, les troupes d’élites sont celles dont les officiers sont proches de leurs hommes. Dans l’Eglise, les diocèses les plus dynamiques ont à leur tête un évêque qui ne s’isole pas des fidèles, mais a un coeur de pasteur. Il en va de même dans le monde de l’entreprise. J’ai quelques grands patrons parmi mes amis et connaissances. Ceux que j’apprécie sont des hommes d’une grande simplicité et humanité, qui méritent la reconnaissance sociale. Mais je sais également que certains « derniers étages » des sièges sociaux de nos grandes entreprises reflètent la mégalomanie de leurs occupants et que ceci explique pour part les mauvais résultats financiers et, surtout, la mauvaise ambiance qui règne dans les murs. Je suis sûr que les mouvements sociaux dans une entreprise seraient diminués de moitié si, quand un plan d’austérité est annoncé, le patron montrait l’exemple en réduisant son salaire en proportion de l’effort demandé.
Le pouvoir, ensuite… La deuxième raison qui me fait penser que les super-salaires ne sont pas opportuns, est d’ordre politique. La démocratie se fonde sur une forme tacite de « contrat social ». Quand un nombre important de citoyens ne se reconnaît plus dans l’élite sociale qui la dirige, alors toutes les dérives sont possibles. En 1789, Versailles ne pesait que pour 4% dans le budget de la France… Mais le symbole de ce palais de rêve où une caste se réfugiait pendant que le peuple crevait de faim, fut un puissant moteur de colère populaire et donc de violence révolutionnaire. Tout autre est l’image d’une famille royale britannique et de leur premier-ministre qui, au cœur de l’enfer du blitz, vécurent les bombes et le rationnement au milieu de leur peuple. Le comportement de ces chefs, tout à la fois solidaires et courageux, explique pour une bonne part la force d’âme qui galvanisa la résistance anglo-saxonne dans un Londres en flammes. Les temps économiques qui s’annoncent sont sombres et n’ont plus rien à voir avec les trente glorieuses… Je vous le demande : De quel modèle nos capitaines d’industrie s’inspireront-ils pour piloter notre économie dans la tourmente ? Versailles-fin-18e ou Londres-sous-le-blitz ?
Le valoir, enfin… La dernière raison qui me fait penser que les super-salaires ne sont pas opportuns, est d’ordre « bêtement » morale. Celui dont le salaire mensuel passe de 1000 euro net à 2000 euro net, voit sa vie se transformer. Celui dont la rémunération mensuelle – boni oblige – passe de 100 000 euro à 200 000 euro ne sent aucune différence. Une société qui ne comprend pas qu’il y a là un souci… a des soucis à se faire. Une riche héritière déclarait récemment qu’il valait mieux une heure de honte par jour qu’une vie entière dans la pauvreté. Cela a le mérite de la franchise, mais oublie qu’entre la honte et la pauvreté, il existe une troisième voie : celle de la solidarité, voire – osons le gros mot – de la générosité.
Edito du Soir : Henry Ford, JP Morgan, réveillez-vous ! par PIERRE-HENRI THOMAS
Avec le printemps revient la floraison des rapports des sociétés cotées en Bourse. Ils contiennent le dernier état des rémunérations des grands patrons. Et évidemment, ces chiffres font débat. Au lendemain de la crise, alors que l’économie est encore largement sonnée et que les finances publiques sont dévastées, les rémunérations des top managers ne semblent pas être affectées. Et cela suscite un malaise certain : mardi, le commissaire européen Michel Barnier estimait ces bonus « inexplicables et injustifiables ». Et ce week-end, le nouveau directeur de la Banque nationale, Luc Coene, avait affirmé que tant qu’une banque est aidée par l’Etat, ses dirigeants ne devraient pas toucher de bonus. Ce qui choque n’est pas l’existence de ce qu’on appelle souvent à tort les « bonus », et qui sont en réalité la part variable du salaire, liée à la performance. Ce salaire variable que touchent les patrons, mais aussi les cadres moyens ou les commerciaux, n’a pas grand-chose à voir avec les bonus faramineux des traders. Ces derniers prennent un pourcentage des gains qu’ils réalisent sur des opérations risquées qu’ils effectuent avec l’argent des autres. Ces bonus-là s’apparentent, quand ils sont énormes, à une forme de prédation. Non, ce qui choque, c’est, tout simplement, la hauteur du salaire global (salaire fixe, variable, pension, stock-options…) que touche un club restreint de grands managers. Aux Etats-Unis et en Europe jusque dans les années 80, un chef d’entreprise, même à la tête d’une multinationale, ne gagnait pas plus de 20 à 40 fois le salaire de sa secrétaire. C’était d’ailleurs la norme que s’étaient fixée des figures emblématiques du capitalisme. Henry Ford et JP Morgan estimaient de 1 à 40 l’écart salarial maximal admissible. Et puis, le système a dérapé. Aujourd’hui, un grand patron belge ou français gagne en moyenne 2 à 3 millions d’euros par an, soit cent à cent cinquante fois plus que son employé le plus modeste. On a beau chercher, on ne voit pas ce qui pourrait justifier une telle disproportion. Et puisqu’en ces matières, l’autorégulation n’a pas l’air de fonctionner, il faudra bien, d’une manière ou d’une autre, qu’une loi vienne fixer des limites à l’avidité.
Edito La Libre : Indécent par YVES CAVALIER
Ne tournons pas autour
du pot : le versement
d’un bonus de
600 000 euros à Pierre Mariani,
le CEO de Dexia est
parfaitement indécent. Que
cela s’ajoute à une rémunération
fixe d’1 million d’euros et
à 200 000 euros de “prime de
fonction”, ne fait qu’ajouter
au sentiment d’iniquité. Des
voix se sont élevées ici et
ailleurs en Europe pour dénoncer
ces pratiques, en
particulier dans un secteur
qui a été sauvé de la noyade
par l’argent du contribuable.
Ce contribuable auquel on
demande par ailleurs d’envisager
de revoir le principe de
l’indexation automatique de
son salaire. Comment peuton
sereinement poursuivre un
débat sur l’impérieuse nécessité
de voir chacun participer
à l’effort d’assainissement du
pays lorsque les patrons de
certaines banques s’en mettent
plein les poches ? Certaines
en effet car toutes n’ont
pas eu cette témérité. On
pense à ING notamment, la
banque néerlandaise qui a
respecté les recommandations
du gouvernement local
en la matière. Le plus cocasse
dans cette affaire, c’est qu’à la
sortie du rapport annuel qui
publie ces chiffres, Dexia s’est
fendue d’un communiqué,
une sorte de justificatif.
Comme pour anticiper cette
indignation, la banque explique
que c’est 200 000 euros
de moins que l’année précédente,
que c’est inférieur à la
“médiane” du secteur, qu’ils
seront versés par tranches qui
pourraient être rabotées au
cas où les résultats ne suivraient
pas… Et dire que tout
cela est avalisé par le président
du conseil d’administration
qui n’est autre que JeanLuc
Dehaene, cet exPremier
ministre qui nous a donné des
leçons d’austérité…
Mgr Léonard entarté : le grand courage citoyen…
Le débat « Concilier science et foi : est-ce bien raisonnable ? » de hier soir méritait le détour, comme le soulignait l’assistance fournie. Face à l’archevêque se trouvait le professeur Jean Bricmont, auquel il faut reconnaître le courage de ses opinions. Loin de faire partie des nombreux « agnostiques anonymes », le physicien de l’UCL revendique et assume un athéisme paisible et radical. C’est donc l’occasion choisie par des ( ?) étudiants pour entarter Mgr Léonard. Raison de ce vengeur « attentat pâtissier » ? « Franchement, pour tous les homosexuels qui n’osent pas le dire à leurs parents, pour toutes les jeunes filles qui veulent avorter, il le méritait amplement », a déclaré un des entarteurs. Edifiante justification. Comme prêtre, je pense avoir recueilli les confidences de pas mal de jeunes homosexuel(le)s ou filles vivant une grossesse non-désirée. Comme André-Joseph Léonard, jamais je n’ai transigé sur mes convictions, mais toujours dans le respect intégral des personnes, quelques soient leurs choix. En effet, le premier commandement du Christ est celui de l’amour inconditionnel, sans oublier aussi la phrase que le Seigneur lança aux bienpensants de son époque: « que celui d’entre vous qui est sans péché, jette la première pierre » (Jean 8,7). Certains ou certaines des jeunes ainsi rencontrés, vivaient les choses sereinement. D’autres beaucoup moins : blocage dans la famille, peur de l’environnement, questions de conscience,… Souvent, un peu de tout à la fois. Jamais pourtant, je ne perçus que la cause profonde de leur mal-être était… Mgr Léonard. Mais sans doute est-ce parce que comme prêtre « je ne suis pas assez en phase avec mon époque » (soupir). Plus sérieusement, autant j’avais prévenu l’archevêque – alors que j’étais encore en fonction comme porte-parole – qu’il se ferait un jour entarter… ce qu’il prit avec bonhommie ; autant je suis consterné d’entendre ces mêmes « justiciers » déclarer « qu’il pouvait à tout moment être à nouveau la cible de tartes à la crème ». Cela me fait penser à ces gamins de rue qui sonnent aux portes et puis s’enfuient. Une fois, ça va, mais à la longue… Evidemment, si à chaque reprise, pareil non-événement – signe d’un très grand courage citoyen – va jusqu’à faire la première page d’un de nos principaux quotidiens, il y a, comme qui dirait, une petite prime d’encouragement. La presse flamande s’était ainsi jadis distinguée en soulignant, l’une après l’autre, les nombreuses « frasques citoyennes » de Jean-Pierre Van Rossem. Puis, les rédactions décidèrent que cela devenait ridicule et que le meilleur service à rendre à l’information, était de ne plus en parler. En quelques semaines, Van Rossem disparut des écrans. Une même sagesse va-t-elle ici prévaloir ?
Blog : premier bilan/een eerste bilan
Blog : premier bilan
Ce blog a été ouvert le 11 mars. Depuis, j’ai reçu 1467 visites et 2383 pages ont été vues. La grande majorité de visiteurs (57%) viennent par Facebook. Près de 1200 visites viennent de Belgique, 153 de France ; suivent ensuite l’Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l’Italie et même les Etats-Unis. Merci à tous pour votre intérêt. N’hésitez pas à laisser un commentaire sur ce blog. Jusqu’au mardi 5 avril, je serai à l’étranger. Mes « posts » ne reprendront qu’à ce moment-là. Ce dimanche 3 avril, je serai uni spirituellement à l’archevêché de Malines-Bruxelles et prierai tout particulièrement pour les 3 nouveaux évêques auxiliaires qui seront ordonnés à son service.
Une dernière pensée pour la route : Il est frappant de voir dans nos médias le conflit au sein de l’administration communale de Charleroi prendre le pas sur la situation incontrôlée à Fukushima. Pourquoi ? Le premier événement est proche et palpable. Le second est éloigné et invisible. Comme les conséquences de la radioactivité font fait peur, sans doute essaie-t-on aussi inconsciemment de tenir ce drame à distance, ou plutôt… nous apprenons à vivre avec lui. Un peu, comme on apprend à vivre avec une maladie grave.
Blog : een eerste bilan
Deze blog is op 11 maart van start gegaan. Tot nu toe kreeg ik 1467 bezoeken en 2383 pagina’s werden ingekeken. De meeste bezoekers vonden hun weg naar de blog via Facebook (57%). Ongeveer 1200 bezoekers komen uit België, 153 uit Frankrijk ; volgen dan Duitsland, het Verenigd Koningrijk, Nederland, Italië en zelfs de Verenigde Staten. Dank aan allen voor jullie interesse. Aarzel niet om op deze blog een commentaar achter te laten. Tem. dinsdag 5 april zal ik in het buitenland zijn. Pas daarna komen er nieuwe ‘posts’. Zondag a.s. zal ik ook heel speciaal bidden voor het aartsbisdom Mechelen Brussel en de drie hulpbisschoppen die er gewijd zullen zijn.
Een laatste bedenking voor de onderbreking: Ik vond het merkwaardig dat de Franstalige media deze morgen meer aandacht besteedden aan het gekibbel bij de gemeente Charleroi dan aan Fukushima. Reden daartoe? De eerste gebeurtenis is ons naderbij en tevens tastbaar. De tweede is verwijderd en onzichtbaar. Aangezien mensen bang zijn voor de gevolgen van radioactiviteit, proberen ze waarschijnlijk ook onbewust deze ramp mentaal op een afstand te houden. Of anders gezegd, ze proberen ermee te leven, een beetje zoals me leert leven met een zware ziekte.
Mardi soir 29/03 en TV: « Mystères de la foi » Dans les yeux d’Olivier, France 2, 22h05.
J’ai pu regarder la seconde moitié. C’est une émission remarquable. Le parti-pris du journaliste – la bienveillance, plutôt que la critique – donne à l’ensemble une réelle fraicheur et aussi une profondeur: entre le téléspectateur et le sujet, il n’y a pas le filtre de l’écriture rédactionnelle. EdB
CHARLINE VANHOENACKER (le Soir 29/03 p.39)
Le look d’Olivier dépote
dans le paysage audiovisuel
généraliste. Type
« mec à la cool », le réalisateur
Olivier Delacroix se met en scène
dans son documentaire dans la
mesure où il apparaît à l’écran et,
oui, son film est subjectif, comme
l’indique le titre : Dans les yeux
d’Olivier. Nous sommes donc en
droit d’attendre de lui une approche
originale. Elle est surtout
très humaine. (…)
Le premier volet de cette série
est consacré aux « Mystères de la
foi ». Olivier Delacroix a été frappé
par le pardon accordé par des
parents à l’assassin de leur fils,
Martin, tué de sang-froid. Ces parents
expliquent que c’est Dieu, à
travers eux, qui a pardonné.
« Les yeux d’Olivier » suivent ensuite
un jeune séminariste à la
veille de son ordination, ou le
quotidien d’une congrégation de
soeurs moniales. ■
Secret professionnel des prêtres et secret de confession : réalité et phantasme/Beroepsgeheim en biechtgeheim : realiteit en verbeelding
Secret professionnel des prêtres et secret de confession : réalité et phantasme.
Dans la presse sont apparus ce matin différents articles concernant le secret professionnel qui lie les prêtres et le secret de confession. La confusion est grande et le « comique » veut que dans une société où mêmes de nombreux catholiques ne se confessent plus (lire article du sénateur Rik Torfs ci-dessous), certains font du « secret de la confession » – inspirés en cela par les films hollywoodiens – le sujet du jour dans la lutte contre les abus sexuels sur mineurs. Mais par-delà les phantasmes, quelle est la réalité ? En fait, dans 99% des cas, le prêtre était tenu au même type de secret qu’un médecin, un avocat, un psychiatre : ne pas dévoiler les confidences, sauf en des cas limites (danger pour tiers) qui sont alors laissés à son appréciation. Ainsi, si quelqu’un confie à un prêtre des difficultés de couple, il est normal que ce dernier n’aille pas tout raconter au conjoint ou aux enfants de l’intéressé. Autre chose est si cette confidence met en péril des tiers (par exemple des enfants abusés sexuellement). Tout comme le médecin ou le psychiatre, le prêtre peut alors choisir de se libérer de son devoir de discrétion sous une forme ou une autre. Il ne peut en tout cas laisser sans assistance les personnes en détresse. Reste la confession, qui en Belgique concerne un petit pourcent des confidences faites à un prêtre et ceci, dans le cadre strict du sacrement du pardon. De par son caractère sacramentel, ce secret est absolu. Cependant, ceci ne signifie pas le pardon à bon marché. Ainsi, un pénitent qui viendrait s’accuser d’abus sexuels (chose rare et que je n’ai jamais rencontrée en 20 années de prêtrise), le pénitent ne recevrait l’absolution que si il va d’abord se remettre entre les mains de la justice (une confession valide implique le remords et le remords implique un début la réparation). Ceci étant dit, sans secret absolu, pas de confession possible… Tout prêtre que l’on voudrait forcer à briser cela, devrait répondre « non possumus » en conscience. D’ailleurs, si la confession se fait dans un confessionnal, l’anonymat du pénitent est garanti. S’il frappe l’imagination populaire, le secret de confession ne concerne donc que très marginalement le combat contre les abus sexuels sur mineurs.
Beroepsgeheim en biechtgeheim : realiteit en verbeelding.
In de pers verschenen er deze morgen verschillende artikels omtrent het beroepsgeheim van de priester en het biechtgeheim. De verwarring is groot en het ’komische’ is, dat in een maatschappij waar zelfs vele katholieken aan de biechtstoel verzaken (cfr. artikel senator Rik Torfs, hieronder), sommigen – mede onder invloed door de Hollywood filmcultuur – van het biechtgeheim ‘de’ topic van de dag maken, om kindermisbruik te bestrijden. Maar ver van de verbeelding, wat is de realiteit ? In feite is in 99% van de gevallen een priester gebonden door hetzelfde beroepsgeheim als een arts, een advocaat, of een psychiater : Wat hem wordt toevertrouwd, mag hij niet voortvertellen, behalve in grensgevallen (gevaar voor derden), waar hij dan ruimte krijgt om eventueel toch iemand te verwittigen. Als iemand bv. huwelijksproblemen aan een priester toevertrouwt, is het maar normaal dat hij er niet mee uitpakt voor levenspartner en kinderen van deze persoon. Iets anders is, als er gevaar bestaat voor derden (zoals misbruikte kinderen). Dan kan de priester, zoals de dokter of de psychiater, beslissen om op één of andere wijze afstand te nemen van zijn zwijgplicht. Hij mag in elk geval, zij die in gevaar verkeren, niet zonder een vorm van bijstand laten. Blijft er nog alleen maar het geval van de biecht, die in België maar een heel klein percentage inhoudt van wat men een priester toevertrouwt en dit in het strikte kader van de sacramentele biecht. Omwille van het sacrament is hier de zwijgplicht absoluut. Dit betekent wel niet dat er goedkoop vergiffenis wordt geschonken. Zou een zondaar zich van kindermisbruik komen beschuldigen (wat uiterst zelden voorkomt en ik, in elk geval, in 20 jaren priesterschap nooit ben tegengekomen), zou deze de absolutie pas krijgen als hij zich eerst gaat opgeven bij de politie (geldig biechten houdt berouw met zich mee, en berouw betekent ‘herstel’). Dit gezegd zijnde, is biecht niet mogelijk zonder absolute geheimhouding van wat er gebiecht werd…. Elke priester die men zou willen forceren dit te doorbreken, zou in geweten ‘non possumus’ moeten antwoorden. Trouwens, de biecht gebeurt meestal in een biechtstoel, waardoor het anonymaat van de biechteling gegarandeerd wordt. Al spreekt deze tot de verbeelding, dan nog heeft het biechtgeheim dus maar heel anekdotisch te maken met de strijd tegen kindermisbruik
Behandel de biechtvader als een professional (De Morgen 29/03 p.23)
Rik Torfs is professor kerkelijk recht aan de KU Leuven en CD&V-politicus.
In de lente van 1970 biechtte ik voor het laatst. Niet dat ik daarna met zondigen ben gestopt. Maar het sacrament van de biecht zoals dat door de kerk is georganiseerd, met een persoonlijke belijdenis tegenover een priester, is nooit mijn ding geweest. Ik kon in de godsdienstleraar of de collegedirecteur onvoldoende een vertegenwoordiger van God zien. En ik ben, mea culpa, geen meester in het belijden van mijn fouten. Toch niet zomaar in een biechtstoel, van aangezicht tot aangezicht, heel direct, waarbij je een kat een kat noemt. Edoch, het is niet omdat ikzelf mijn zonden verzwijg, dat het biechtgeheim onbelangrijk zou zijn. Terecht vindt de kerk dat het nooit mag worden prijsgegeven en dat de priester die het rechtstreeks schendt, van rechtswege wordt geëxcommuniceerd (canon 1388 §1 van het kerkelijk wetboek).
Waarom is het biechtgeheim belangrijk? Wie biecht, verkrijgt daardoor mentaal asiel. Feiten die het daglicht niet mogen zien, komen naar boven in een veilige omgeving die totale geheimhouding garandeert. Dat biedt de delinquent een unieke mogelijkheid om een medemens te zeggen wat anders voor altijd verborgen zou blijven. De kans dat een mens het volstrekt ongehoorde wat hij heeft gedaan met iemand anders kan delen, betekent bevrijding uit een gruwelijk isolement. Daarbij is de vergiffenis van de zonde niet het belangrijkste, maar de mogelijkheid om het onzegbare uit te spreken. Maar niet alleen voor de dader biedt de biecht mogelijkheden. Ook voor het slachtoffer rijst er hoop. Want de biechtvader heeft de plicht er de misdadiger toe aan te zetten zichzelf aan te geven en het berokkende kwaad in de mate van het mogelijke te herstellen. Er is geen vergiffenis zonder spijt. En er is geen spijt zonder de oprechte poging om het aangerichte kwaad te herstellen. Zichzelf aangeven kan daar een element van zijn.
Meteen wordt duidelijk hoe onzinnig de meldingsplicht is die sommige politici aan biechtvaders willen opleggen. Niemand is zo gek om zijn zonden te belijden wanneer hij weet dat hij verklikt kan worden. De seksuele delinquent zal dus de biechtstoel vermijden. Er bestaat immers altijd onzekerheid over wat de priester gaat doen. Zwijgen? Spreken? Ook de priester zelf komt in een benarde positie terecht. Als hij aan zijn meldingsplicht verzaakt, wordt hij door de profane wet gestraft. Als hij daarentegen het biechtgeheim schendt, zorgt het kerkelijk recht ervoor dat hij wordt geëxcommuniceerd. De biechtvader kan dus kiezen tussen twee straffen, maar gestraft wordt hij in ieder geval. De kans is groot dat hij, vanuit zijn roeping, voor de profane straf kiest en bereid zal zijn om in de gevangenis te gaan zitten voor zijn overtuiging. Dat siert hem. Er zijn nu eenmaal wetten die om de overtreding ervan vragen. Racistische wetten in de Verenigde Staten werden neergehaald dankzij de ongehoorzaamheid van dappere burgers die hun geweten lieten primeren op een onaanvaardbare regel.
Maar er is meer. Politici die vandaag de meldingsplicht willen laten primeren op het biechtgeheim, koesteren uiteraard niet de illusie dat daardoor nieuwe misdrijven aan het licht zullen komen. In ons land wordt immers nauwelijks nog gebiecht. Het is de voorstanders van de opheffing van het biechtgeheim veeleer te doen om een statement. Zij willen duidelijk maken dat priesters geen professionals zijn, anders dan artsen, psychologen of andere hulpverleners. Dat is een ideologische optie die laatdunkendheid verraadt tegenover het religieuze. Sommige mensen met moeilijkheden zullen soelaas zoeken bij medici en paramedici. Zij moeten worden beschermd. Anderen doen misschien liever een beroep op een priester. Ook zij verdienen beschutting. In onze doldraaiende wereld is er nood aan plekken die ruimte bieden voor mentaal asiel. Het is aan de individuele mens om de keuze te maken, niet aan politici met een zware ideologische agenda.
Tot de dood ons scheidt…
Zoals velen heb ik het bericht gelezen over dat koppeltje dat deze jongste dagen beslist heeft samen, dankzij euthanasie, uit het leven te stappen. Hij was 83 en zij 78. Beiden waren ernstig ziek. Geen kinderen. Hij vroeg om euthanasie en dan: ‘Dokter, ge gaat haar toch niet aandoen dat ze eerst nog achter mijn doodskist moet lopen? Dat ze dat verdriet nog moet meemaken voor ze zelf mag gaan?’
Het zal wellicht niemand verbazen dat ik geen voorstander ben van actieve euthanasie. Tevens voel ik me niet geroepen om als moraalridder door het leven te gaan en telkens weer als het enigszins kan, met een boos vingertje naar mijn medemens te wijzen. Trouwens, de liefde tussen die twee tot in de dood, heeft ook iets schoons. Neen, wat eerder bij mij opkomt als ik dat lees, is een bedenking over onze zgn. postmoderne maatschappij, die een meer collectieve vorm van samenleving vervangen heeft door de ‘kernfamilie’: man, vrouw en kinderen. Als er dus geen kinderen zijn en je echtgenoot stapt uit het leven, dan blijft er alleen maar nog de kale eenzaamheid over. Zelfs voor een sociabel echtpaar die al jaren woont in een gezellig klein Vlaams dorpje. En die eenzaamheid is erger dan de dood. ‘Dokter, ge gaat ons dat toch niet aandoen, zeker?’
Onze maatschappij mag dan ook uiterst ontwikkeld zijn, dat trekje is volgens mij geen stap in de richting van een meer menselijke beschaving. Maar wat die twee oude minnaars betreft, ze zullen zeker hun weg vinden tot bij de God van liefde en troost.
Marche pour la Vie : « Heureux les doux »
Environ 3000 participants ont marché cet après-midi à la « Marche pour la Vie ». J’y ai participé. Ce qui m’a le plus frappé, c’est son caractère paisible et serein. Nul anathème, ni condamnation parmi cette foule multicolore comptant de très nombreux jeunes. Cela m’a fait penser à la béatitude : « Bienheureux les doux ». En effet, la véritable autorité s’exprime – non pas par l’agressivité – mais dans la douceur. La douceur qui émane de celles et ceux qui vivent une conviction paisible. C’est ce que j’ai ressenti chez les jeunes organisateurs de cette deuxième « Marche pour la Vie ». Je leur tire mon chapeau. Et je rassure les 300 à 500 contremanifestants du jour. Comme le disait Roger Lallemand : « il ne s’agit pas de problème politique ». De fait, la vaste majorité de la population belge est actuellement pour le status quo quant au droit à l’avortement. Non, avant d’être un problème politique, il s’agit d’un problème de valeur. Et le simple fait que l’on puisse à nouveau paisiblement évoquer la question de la défense de la vie à naître, est une belle victoire pour la démocratie. Ce qui tue le débat citoyen, c’est la dictature du conformisme social qui voudrait qu’un état de fait ne puisse même pas être interrogé avec une ferme douceur. Bienheureux donc les doux…
Enseignement (le Soir p.17): Cours philosophiques ou cours de philosophie ? Débat. Modèle « patchwork »
Dans « le Soir » de ce 25 mars (p.17), Pierre Bouillon signe un article faisant le point sur une proposition de décret, qui reprend une idée, initiée en son temps par Hervé Hasquin.
Ci-dessous un résumé de l’article :
« En septembre 2009, quatre députés MR (dont Richard Miller) ont déposé une proposition de décret visant à créer un « cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions ». Ce cours serait organisé à hauteur d’une heure par semaine, au 3e degré du secondaire (les 5e et 6e années). Le projet vient d’être analysé par le Conseil consultatif supérieur des cours philosophiques. Créé en 2005, cet organe réunit des représentants des cours de religion, des syndicats, des réseaux, de l’inspection, etc. Son avis est négatif, même si certains membres du Conseil en question penchent en faveur du projet – c’est le cas de la CGSP ou de la Fapeo (les parents des élèves de l’enseignement officiel). Le Conseil consultatif relève que les cours philosophiques actuels (les traditionnels cours de religion/morale) « réservent une large place à des préoccupations comme l’exercice d’une citoyenneté critique et responsable, la réflexion épistémologique autour des savoirs et des différents types de discours, l’argumentation et la conceptualisation, l’intelligence du dialogue… » Richard Miller estime que le cours d’histoire qu’il propose aiderait à lutter contre les intégrismes. Le Conseil réplique : « Les responsables des cours de religion estiment d’expérience qu’on ne lutte pas contre les intégrismes convictionnels par un enseignement purement cognitif du fait religieux. Un tel enseignement ne pourrait prendre en compte les composantes psychoaffectives liées au radicalisme convictionnel. Il favoriserait au contraire leur radicalisation. » Le Conseil consultatif relève : « C’est avec la légitimité de celui qui partage une conviction et la vit qu’on lutte le plus efficacement contre les courants intégristes ; c’est parce que les enseignants partagent la même identité religieuse, les mêmes référents culturels et théologiques que leurs élèves, qu’ils peuvent se faire accepter par les plus radicaux d’entre eux pour les amener à nuancer leurs convictions et à prendre conscience de la légitime diversité convictionnelle. » (…) On tape sur le clou : « Se pose la question de la crédibilité d’un cours d’une heure par semaine qui n’aurait que très peu d’impact. » Par terre, Richard Miller ? Nullement. « Cet avis ne me surprend pas. Le Conseil regroupe les différents cours de religion et de morale, dont ma proposition trouble la quiétude. Le système sel protège. » (…) L’élu MR rappelle que le système actuel a été fondé dans les années 50, à l’occasion du Pacte scolaire. « Nous ne sommes plus du tout dans ce contexte-là. Je respecte les religions. Mais s’en tenir à une organisation où l’on sépare les enfants selon leurs convictions philosophiques, c’est les amener à penser que les croyances sont là pour diviser les gens. Moi, je veux un cours où tous les enfants sont réunis. Le modèle actuel n’est plus suffisant. » Maintenant que le Conseil consultatif a livré son avis, le texte MR va reprendre son cours. Le débat va ainsi s’entamer en commission enseignement du parlement de la Communauté française. « Je suis ouvert à tous les avis, pour améliorer le texte, à condition que l’on envisage un cours bien distinct. (…) Mais, aujourd’hui, nous voilà tous devant une grande responsabilité. Ou l’on se borne à organiser des cours de religion et morale qui séparent les enfants. Ou nous créons, parallèlement au système actuel, un cours qui donne aux enfants les outils intellectuels, culturels qui conditionnent le “vivre ensemble”. » ■
Existe-t-il une troisième voie ? A titre personnel, moi qui ai connu les deux réseaux scolaires, je proposerais encore autre chose, du moins dans le réseau officiel. (Mais ceci serait peut-être aussi applicable dans le réseau libre): Je garderais les cours convictionnels, car ils offrent des racines aux élèves, ce dont ils n’ont jamais eu tant besoin. Cependant, je ferais en sorte que durant le 3e degré du secondaire (les 5e et 6e années) un cours philosophique sur deux soit « collectif ». C’est-à-dire que les élèves des différents cours philosophiques se retrouveraient ensemble pour partager sur un sujet en commun et ceci – sous la modération collective de leurs différents professeurs. Ainsi, les élèves pourraient être invités à présenter aux autres un point particulier de leur tradition religieuse et/ou laïque, ou encore à envisager en commun certains enjeux moraux à partir des différents regards convictionnels. L’autre cours – « séparé » – permettrait à chaque courant d’évaluer la discussion commune et de relancer des idées pour la prochaine rencontre. Il ne faudrait surtout pas chercher à noyer les différences et éventuelles confrontations entre élèves au nom du « politiquement correct », mais bien insister sur l’apprentissage d’une culture du débat respectueux. Ainsi formerait-on les citoyens de demain pour notre démocratie plurielle. Pourquoi cette idée ? Parce que mon expérience personnelle (en 5° et 6° année de secondaire, je me trouvais dans un collège international qui pratiquais quelque chose de cela – voir www.uwc.be) m’a appris que le contact engagé et non pas « neutre » avec d’autres convictions, permet au jeune de se réapproprier ses racines propres, tout en l’immunisant contre la tentation fondamentaliste. Il ne s’agit donc pas de promouvoir un modèle « melting pot », qui voudrait gommer les différences, mais bien un modèle « patchwork » qui donne de comprendre par le concret de la rencontre que nos couleurs sont différentes, mais que – bien loin de constituer une menace – pareille diversité nous enrichit.
Marche pour la Vie : « Frappez sur le ballon. Pas sur les joueurs ! »
Dans un billet d’opinion publié ce jour dans la Libre (pp.54-55) en réaction à l’opinion du mardi (http://www.lalibre.be/debats/opinions/article/650175/marcher-pour-la-vie.html) , un collectif s’en prend à l’initiative de la deuxième « Marche pour la Vie » de dimanche : http://www.lalibre.be/debats/opinions/article/650799/qui-defend-vraiment-le-droit-a-la-vie.html. Sans doute est-ce dû à l’urgence de répondre avant ce WE au billet de mardi (parvenir à faire publier dès le vendredi une réponse à une opinion parue trois jours plus tôt, est – je le concède – un prouesse), mais je suis frappé par la faiblesse des arguments utilisés :
• D’abord, ce billet ne répond pas aux plaidoyer des organisateurs de la « Marche pour la Vie ». Ceux-ci regrettent la banalisation de l’avortement, acte grave qui met en jeu l’inviolabilité d’une vie à naître. Le billet, lui, dénonce la détresse sanitaire et médicale des femmes ayant eu jadis recours aux « faiseuses d’ange » pour avorter. Or, il serait possible de maintenir l’interdit social d’avorter au nom de la dignité de toute vie, tout en permettant aux femmes qui souhaitent le transgresser (ou qui vivent un de ces cas-limites qui sont régulièrement agités en guise d’argument), de vivre cela dans de bonnes conditions sanitaires. Ceci aussi donnerait la possibilité de mieux accompagner celles qui chercheraient d’autres voies : garder l’enfant à naître avec une aide de la collectivité, permettre son adoption,…
• Ensuite, ce billet rejette l’argument principal des marcheurs pour la vie… sans autre argument que de dire qu’il s’agit d’un « axiome ». Je les cite : « D’autre part, ils affirment que ce droit en menace un autre, plus important encore : celui de vivre. (… Cette affirmation) repose sur un axiome qui consiste à dire que l’embryon, dès sa conception, a qualité de personne humaine et que dans tout conflit d’intérêt, serait-ce avec la femme enceinte qui le porte, son existence ne peut en aucun cas être menacée ». Il ne s’agit pas d’un axiome. Il s’agit d’une question fondamentale en démocratie, qui s’applique à mille et une autres situations : La vie humaine est-elle totalement inviolable – ou seulement relativement inviolable ?
• Enfin et surtout, je regrette que cette opinion contradictoire oublie une des bases du débat démocratique constructif. Il existe un dicton en néerlandais qui dit : « de bal spelen, niet de man ». Traduction libre : « frappez sur le ballon, pas sur les joueurs ». C’est l’argumentation des faibles que de contredire leurs opposants en les décrédibilisant par la caricature et le cliché. Cela ne grandit pas les auteurs de l’opinion publiée en ce jour de parler sans plus d’ «argumentation fallacieuse des opposants à la légalisation de l’avortement ». C’est un peu facile, pour s’opposer aux jeunes universitaires qui organisent courageusement la deuxième « Marche pour la Vie », d’évoquer la sombre figure de Nicolae Ceaucescu.
Un débat serein et respectueux est-il donc possible sur la question de l’avortement? Je pense que oui. J’ai vécu cela dans l’ouvrage coécrit en joute amicale avec le professeur ULB Baudouin Decharneux : « Une cuillère d’eau bénite et un zeste de soufre » (éditions EME). Ci-dessous je reproduis une partie de nos argumentations respectives. Je ne partage pas le point de vue de mon contradicteur et ami. Cependant, il n’a pas besoin pour s’imposer de traiter mon propos de « fallacieux ». Du coup, son argumentation donne matière à réflexion. Je suggère aux défenseurs du « droit à l’avortement » de plutôt faire appel à des plumes de ce format pour réagir l’année prochaine à la troisième « Marche pour la Vie ».
« Une cuillère d’eau bénite et un zeste de soufre » (pp.22-25)
• Eric de BEUKELAER: « Avec l’avortement nous touchons à un des sujets les plus cruciaux du débat politique. Normal : Il s’agit d’un enjeu de vie ou de mort ; la question qui consiste à définir à partir de quand la vie humaine est inviolable et donc protégée par la loi. L’humanisme dont se réclament, avec d’autres, les catholiques ne tergiverse pas avec ce respect : Selon ses critères, la vie humaine est inviolable depuis son origine naturelle (conception) et ce, jusqu’à sa fin naturelle (mort). Limiter ce droit, c’est se lancer sur une pente glissante – slippery slope, disent les britanniques – pour l’état de droit : Quand la vie humaine devient « conditionnellement » inviolable (avant autant de semaines, la vie de l’embryon dépend de la volonté de sa mère à le garder ou non…), cette valeur centrale pour notre civilisation des droits de l’homme, perd son caractère « sacré » pour devenir relative à nos besoins du moment. J’accepte que d’autres citoyens ne partagent pas cet avis, mais je m’énerve quand ils dénaturent le plaidoyer qui est ici fait. Non, il ne s’agit pas d’imposer sa religion à des femmes enceintes – comme j’entends beaucoup trop souvent déclarer – mais bien de défendre l’inviolabilité de toute vie humaine au nom d’un humanisme sans concession. L’enjeu n’est donc pas religieux, mais philosophique et politique. C’est à ce niveau-là que doit se situer le débat, s’il se veut honnête. Je précise cependant qu’une conviction forte ne peut bannir le bon sens et l’humanité. Dans les chambres d’hôpital, des thérapeutes se trouvent souvent bien seuls face à tant de drames humains à gérer. Il faut de la retenue et beaucoup de pudeur avant de condamner ce qu’ils ont décidé de faire en âme et conscience. La défense de l’humain est un idéal avec lequel il n’y a pas à transiger. N’en faisons pas pour la cause un système sourd qui juge, sans entendre le cri des hommes. J’ai rencontré des millionnaires américains – catholiques bon teint – qui ne voulaient pas entendre parler d’avortement, mais n’imaginaient pas non plus, hélas, de financer une sécurité sociale un tant soit peu élaborée, pour aider les filles mères. A chacun – et donc à moi-même – s’adresse l’avertissement du Christ : « Sur la chaire de Moïse se sont assis les scribes et les Pharisiens : faites donc et observez tout ce qu’ils pourront vous dire, mais ne vous réglez pas sur leurs actes : car ils disent et ne font pas. Ils lient de pesants fardeaux et les imposent aux épaules des gens, mais eux-mêmes se refusent à les remuer du doigt. » (Matthieu 23, 2-4) (…)».
• Baudouin DECHARNEUX : « L’interruption volontaire de grossesse est certes un sujet sérieux. La question de la limite, ou plutôt de l’impossibilité de fixer la limite entre la vie et la mort, a toujours fait l’objet de grands débats. Il n’est aucune société durable qui ne pose la question des curseurs balisant les moments cruciaux de l’existence. De façon générale, les défenseurs du droit à l’interruption volontaire brandissent, comme je l’ai fait, la liberté des femmes à disposer de leurs corps. L’argument me semble irréfutable. Sauf, qu’en général, aucune société ne donne à ses ressortissants la liberté de disposer de leur corps… C’est vrai, il est difficile de tenir en toute logique une position qui oscille entre l’enfant-roi (voire l’embryon roi) et de l’autre revendiquer le droit à l’avortement. On est pas humain parce que les autres le décident… Les pourfendeurs de l’avortement brandissent, eux, le droit à la vie comme un absolu qui ne se négocie pas. C’est sans doute fort moral. Sauf qu’aucune société ne concède ce droit à ses concitoyens. Les adeptes du « tu ne tueras point » feraient bien de lire la Bible en hébreu, ils exhiberaient une autre maxime pour étayer leur injonction. Il est piquant de constater que les milieux les plus réactionnaires fustigeant les infâmes avorteurs, revendiquent la peine de mort créent des commandos anti-avortement parfois fort violents, adoptent des postures militaristes… J’en suis arrivé à penser que l’important réside plutôt dans la tension. Que diraient mes amis religieux si, d’un jour à l’autre, tous les laïques (à la Belge) s’exclamaient : « d’accord, vous avez raison. Cet impératif est non négociable ». Qu’est-ce qu’on fait de la légitime défense, des accidents de la route, des « bavures » militaro-policières, des guerres chirurgicales,… On en sait. La vie est un absolu. (…) »