« Nouvel An » – Sainte Marie, Mère de Dieu

« Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur ». (Luc 2, 16-21)

Une année se clôture avec son lot de joies et de peines. Un nouvel an débute. Nul ne sait de quoi il sera fait. Sans vouloir gâcher le réveillon, permettez-moi la réflexion suivante. Quand je me promène dans un cimetière, je scrute les dates sous le nom des défunts : date de naissance et de décès. Et je ne manque jamais de me dire en moi-même : « ma date de naissance, je la connais… mais l’autre – quelle sera-t-elle ? » Mis à part les personnes en maladie terminale, nul ne peut répondre.

La quantité de durée d’une vie, personne n’en décide. Pas plus que de la qualité des années qui passent (bonne ou mauvaise santé ? chance ou revers de fortune ?) Seule l’intensité d’une existence dépend de nos choix. Vais-je me laisser aller et me replier sur moi-même, ou prendre ma vie en main en faisant – chaque fois que cela est possible – des choix sous le signe de l’amour, la joie, la paix, la patience, la bienveillance, la bonté, la douceur, la maîtrise de soi et la fidélité ? Tels sont les fruits de l’Esprit.

Ce n’est donc pas par hasard que l’Eglise place le Nouvel An sous le patronage de Notre-Dame.  Durant sa vie terrestre, elle ne fit rien « d’extraordinaire », mais chaque instant se vécut avec une pleine intensité d’amour. En effet, la Mère de Dieu avait rendu son existence transparente à l’Esprit. Et face aux imprévus, jamais elle ne se cabre, mais vit chaque chose de l’intérieur : « Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur ».

Minorités chrétiennes en terre d’islam : attention, danger d’extinction

Il m’arrive de méditer le testament de Dom Christian de Chergé, le prieur assassiné des moines de Tibhirine. En voici un extrait : « Je sais aussi les caricatures de l’Islam qu’encourage un certain idéalisme. Il est trop facile de se donner bonne conscience en identifiant cette voie religieuse avec les intégrismes de ses extrémistes. L’Algérie et l’Islam, pour moi, c’est autre chose, c’est un corps et une âme. Je l’ai assez proclamé, je crois, au vu et au su de ce que j’en ai reçu, y retrouvant si souvent ce droit fil conducteur de l’Évangile appris aux genoux de ma mère, ma toute première Église, précisément en Algérie, et déjà, dans le respect des croyants musulmans ».

Je fais mienne cette confiance en la coexistence pacifique entre musulmans et chrétiens. Mais inutile de se voiler la face. De puissants mouvements néo-fondamentalistes n’en veulent pas. Ils considèrent les minorités chrétiennes en terre d’islam – parfois pourtant bien plus anciens occupants de ces pays qu’eux-mêmes – comme des intrus et œuvrent dans l’ombre pour les chasser par toutes voies de fait. Ci-dessous l’édito du jour (1.), paru dans le quotidien bruxellois « le Soir », peu suspect d’être à la solde de lobbys chrétiens. Pour ceux qui lisent l’anglais, je fais le lien entre son analyse et le récit reçu, il y a peu d’une connaissance en voyage chez les chrétiens d’Irak. Parfait exemple du civil servant européen, ce témoin n’a rien d’un islamophobe. Ce qu’il écrit – j’en publie ici des extraits (2.)  – n’en est que plus poignant. Il est temps que l’opinion publique occidentale – en ce compris musulmane – prenne conscience de ce drame et fasse savoir par toutes voies politiques et diplomatiques que le sort des minorités chrétiennes ne leur est pas indifférent.  Si les minorités chrétiennes disparaissent de ces pays qu’elles occupent, parfois depuis l’origine du christianisme, personne en Occident ne pourra prétendre « qu’il ne savait pas ».

1.    « Silence, on tue des chrétiens ». Edito paru dans « le Soir » du 27 décembre 2011 par MAROUN LABAKI  « Le nord-est du Nigeria, c’est loin. On ne peut le nier. Mais les minorités chrétiennes d’autres régions ou pays majoritairement musulmans, à tous égards plus proches, sont également la cible d’attaques meurtrières. Des violences de plus en plus fréquentes? L’Histoire en dressera le bilan. Ce qui est sûr, en tout cas, c’est que les malheurs des minorités chrétiennes continuent à être accueillis avec une certaine indifférence dans les pays occidentaux. Il n’est en réalité que la vieille droite, voire l’extrême droite, pour s’en émouvoir. La gauche et les laïques sont largement aux abonnés absents. Comme si ces chrétiens isolés étaient foncièrement suspects, tous des adorateurs de Dieu, de Pétain et d’autres reliques poussiéreuses. Sans doute la Realpolitik – qui n’a, comme on sait, pas de couleur politique – est-elle aussi pour quelque chose dans cette indifférence. La protection des minorités, également au sein des systèmes démocratiques, est un enjeu universel, crucial, imposant. Et la responsabilité de les protéger ne doit souffrir aucune exception. En l’occurrence, les minorités chrétiennes sont des confettis de notre monde, mâtinés d’autres riches influences et éparpillés par les bourrasques du temps. Ce sont les dépositaires de nos valeurs autant que des ponts jetés vers d’autres cultures – si précieux à l’heure où l’enthousiasme qui avait salué le Printemps arabe fait place au doute. Certes, il est arrivé que les minorités chrétiennes, en terre d’Orient principalement, se fourvoient, qu’elles se trompent d’alliés. C’est toujours le cas en Syrie, par exemple, où nombre de chrétiens défendent à présent le régime finissant de Bachar el-Assad, qui est l’émanation d’une autre minorité, les Alaouites. Choquant ? Sans doute. Mais tellement compréhensible ! Les chrétiens de Syrie ont peur des islamistes, qui ont partout autour d’eux le vent en poupe – et qui ne sont hélas ! pas tous « modérés ». Ils savent que les crucifix ne suffisent pas, qu’ils n’ont jamais empêché les croix de se dresser dans les cimetières. C’est la panique, le sauve-qui-peut… Nous devons apporter une réponse crédible à leur vulnérabilité, répondre à leurs regards implorants ».

2.    A journey amongst Christians in Iraq: (…) Up to 2003 it seems christians had not fled the war and chaos in any greater numbers than muslims or other groups. Since then all is changed. At least one third, and probably up to half of iraqs christians have left the country in less than a decade, having been here since the dawn of christianity and long before islam arrived on the scene in the 7th century. The continuing presence of americans in iraq after 2003 served as a magnet for the more extreme islamists, including al qaeda. As the country degenerated into sectarian violence between sunni and shia, the christians were caught in the middle of a country that has become increasingly intolerant towards minorities after decades of enforced secularism under saddam Hussein. Up until now the mainly-kurdish north of the country proved a relatively safe haven for Christians. Firstly because the areas controlled by the kurdistan regional government have been largely spared the violence of the south, running their own affairs since the kurdish uprising of 1991 at the end of the first gulf war when america declared this part of the country a safe haven, but also because this is the historical homeland of Christian Iraq. So when the country started to descend into chaos after 2003, many of the christians in baghdad and other cities in the arabic south of the country fled north to kurdistan where they mostly still had family or clan links. I have met a number of priests here who told me that they had previously worked in baghdad but that their church is now closed because the whole congregation has either moved north or left the country entirely. (…) Fear has now started to take hold among the christians in the north too. On my second day here we visited the town of zakho where only 2 weeks earlier a pogrom had taken place following Friday prayers. All fired up by angry imams, muslim youths poured out of the mosques and headed for the christian districts where they proceded to smash up and burn the businesses of the ‘infidel’ Christians. The main targets were hairdressing salons and liquor stores. A Chaldean sisters set about filming the violence on her mobile phone to collect evidence. I watched the clips on her phone and was just astounded at the wanton violence of up to 100 youths as they smashed up two shops, but equally amazed at how this sister had the courage to just stand there filming it all. She explained it as if the youths were zombies who had been programmed (or paid) to mindlessly carry out one deed  so they were not even aware of her presence. (…) An even more sinister side to the pogrom was the flyers that were scattered in the broken-up shops. The sister gave me a copy of one she had collected and read it for me. Written in Kurdish it warned the owners of the shops that if they were to open up their business again, the next time they would be killed. (…)  A Christian spiritual leader invited us into his home and told us that the violence was not spontaneous but planned and part of an orchestrated campaign to try to force all Christians to leave Iraq. Since 2003 the strict wahabi strain of sunni islam has been exported by Saudi Arabia to Iraq. According to that source, the Saudis pay for the construction of mosques and madrassas (coranic schools) as well as providing other social services. All the while promoting their intolerant brand of islam that preaches the presence of christians on muslim soil is an abomination which all good Muslims must end. As proof of his conspiracy theory, he told us that any attempt to contact the police, mayor or other authorities on the day of the pogrom were met with switched-off mobile phones. When he did manage to get through to one police chief, he was told that the crowd was too big for the police to manage so they were staying away. The Christians then decided to protect themselves and by calling around got together a group of young men armed with Kalashnikovs. By firing into the air they were able to disperse most of the violent thugs. It was only when some of the muslims then came back with their own guns that the police finally arrived (about 7 hours after the violence had started) to calm the situation and prevent a complete bloodbath. When we visited the Chaldean monastery, the prior told us of further episodes of the ongoing persecution of Christians in Iraq. During the past summer the monastery received 100 families fleeing from Baghdad. He was critical of European countries in particular. Christians here feel neglected, abandoned by their brothers and sisters in Europe, he said. From watching European media he gets no sense that there is any realisation of what is going on so he understands that ordinary people in europe are ignorant of the fact even that there are Christians in Iraq at all. But the political class must be aware of what is going on but does nothing.(…)

Le Dieu « looser » (La Libre 24/12 p.61).

Ce 24 décembre ma chronique de Noël a été publiée en p.61 dans le quotidien la Libre. Vous pouvez la lire en cliquant sur le lien suivant :  Le Dieu « looser ».
Je remercie, une fois de plus, la rédaction de La Libre de m’offrir cet espace d’expression.

Sainte fête de la Nativité à toutes et tous.

« Noël dans la joie et dans la peine » – Nativité du Seigneur, Année B

« Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’il aime » (Luc 2, 1-14)

Toutes les mamans le savent : une naissance peut être douloureuse. La raison en est que le petit d’homme naît avec une boîte crânienne fort développée, qui – en quittant le sein maternel – fait souffrir sa maman bien plus que cela n’arrive dans le monde animal. Et pourtant, rien de plus joyeux qu’une naissance. Même si… les parents savent que les épreuves ne font que commencer. Mettre un enfant au monde, c’est l’accompagner des années durant, dans les rires comme dans les pleurs.

Joie et souffrance… Il y a un peu des deux dans la fête de la Nativité. Il y a la joie de la naissance du Sauveur. Le Verbe de Dieu se fait petit enfant : par Marie, le Sauveur est mis au monde pour porter l’Amour divin aux hommes. Comme le proclament les anges : « Voici que je viens vous annoncer une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple : aujourd’hui vous est né un Sauveur ». Une joie réelle, donc, mais qui n’immunise pas de la souffrance. Les icônes orthodoxes de la Nativité nous le rappellent avec leurs crèches en forme de sépulture : la mise au monde du Sauveur n’esquive pas les épreuves et les croix.

Voilà pourquoi, la fête de Noël s’adresse tant aux personnes qui sont dans la joie qu’à celles qui vivent dans la peine. Et cette année, comment ne pas penser tout particulièrement aux parents des jeunes victimes de la place S. Lambert ? Oui, même pour eux résonne en ce jour le chœur des anges : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’il aime ».

Liège – l’esprit de Noël

Les médias nous l’ont dit : ce dernier WE avant « les fêtes » a été bon pour les commerçants. Je suis content pour eux et pour toutes ces personnes qui préparent la fête en famille, avec un bon repas et des cadeaux. Mais quand j’entends dire que ceci est l’esprit des « fêtes de fin d’année » (dans certains médias, le mot « Noël » devient presque gênant) – alors, je soupire.

L’esprit de Noël, je l’ai senti souffler ce samedi au milieu de la « marche blanche », place Saint-Lambert. Beaucoup de « petites gens ». Beaucoup d’enfants. Une crèche vivante – en quelque sorte. Et une émotion palpable. Sorte de liturgie populaire. Sans effort, j’ai sorti mon chapelet et me suis mis à prier au milieu de la foule.

L’esprit de Noël, je le retrouve également dans les mots de l’abbé Jean-Pierre Pire – curé du « village de Noël » et mon confrère doyen pour la rive droite de la ville – prononcés à l’occasion de l’hommage des commerçants de la place Saint-Lambert de dimanche matin : « (…) Jésus ne s’est pas laissé submerger par la haine. Sur la croix, il relève la tête. Inexplicablement, il continue, envers et contre tout, à croire en l’homme… (…) C’est pourquoi, chers Liégeois et Liégeoises, quelles que soient vos convictions religieuses et philosophiques, je vous invite à relever la tête. D’abord, en utilisant toute notre intelligence, en prenant et en soutenant toutes les mesures qui s’imposent pour réduire au minimum le risque de pareil carnage. Mais, vous le savez aussi bien que moi, l’intelligence à elle seule ne suffit pas. L’intelligence, c’est comme le soleil d’hiver qui illumine, mais sous les rayons duquel on peut mourir glacé ! Il faut aussi réchauffer notre ville, notre province, notre communauté, notre région, notre pays, notre continent – l’Europe–, notre planète par le seul chemin qui ouvre un avenir: l’amour. En mémoire de saint Lambert, assassiné sur cette place il y a plus de 1300 ans, en mémoire de Gabriel, Medhdi, Pierre, Antoinette, Claudette et de tous les innocents massacrés, relevons la tête, comme nos ancêtres : là où il y a de la violence, mettons-y un trop-plein d’amour : c’est cela le vrai sens de la fête de Noël! »

L’esprit de Noël, je l’ai encore croisé ce dimanche, place cathédrale, où des jeunes de la communauté de l’Emmanuel ont chanté et dansé Noël sous les regards étonnés de passants profitant d’un dimanche « commerces ouverts » pour faire leurs achats. Ou encore en l’église Sainte Catherine où se déroulait un des nombreux concerts de Noël, ou à la halle des viandes où se trouvait une touchante crèche vivante, avec d’autres concerts. Ou encore…

Bref, à Liège ou ailleurs – tant mieux si nous avons les moyens de donner corps à Noël par une belle fête. Mais qu’est-ce qu’un  corps sans esprit ? Un cadavre froid.
Un Enfant nous est donné : Il porte l’Amour à notre monde en souffrance. Accueillons-Le. Imitons-Le. Partageons-Le. Et si nous ne connaissons pas cet Enfant – tout le monde n’est pas chrétien – accueillons les petits que nous connaissons. C’est cela, l’esprit de Noël.

« Fiat » – 4e dimanche de l’Avent, Année B

« Que tout se passe pour moi selon ta parole » (Luc 1, 26-38)

Les deuxième et troisième dimanches de l’Avent, Jean le Baptiste est le personnage au centre des passages d’Evangile, lus au cours des eucharisties dominicales. Le quatrième et dernier dimanche avant la Nativité, il s’agit de Notre-Dame. Pour expliquer la place de Marie dans l’histoire du salut, prenons un exemple : seul l’eau peut désaltérer, mais sans un réceptacle (bouteille, verre, mains,…), impossible de boire. Il en va de même pour l’œuvre de Dieu : seul l’Esprit de Dieu régénère le monde, mais comment pourrait-il le faire si personne ne lui ouvre son cœur ? Et comment l’Esprit pourrait-il totalement se donner, si quelqu’un ne l’accueille pas en plénitude et sans aucune réserve mentale ou arrière-pensée? Hélas – de par le péché – le « oui » des hommes est bien fragile : si souvent, nous disons « oui, mais… », « oui, sauf si… », « oui, à moins que… », « oui, à condition que… ».  Rien de tel chez Marie. Le « oui » de la Vierge de Nazareth est libre, clair et limpide. Il ouvre grand les portes à l’Esprit de Dieu. « Le Saint Esprit viendra sur toi, et la puissance du Très Haut te couvrira de son ombre. C’est pourquoi le saint enfant qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu ». Alors la Vierge dit : « Fiat ! Je suis la servante du Seigneur; que tout se passe pour moi selon ta parole. »


Liège – le temps du recueillement

Après le choc et l’émotion, voici que Liège entre dans le temps du deuil et du recueillement.
Plusieurs initiatives ont été lancées :
Samedi 17 décembre à 13h, une « marche blanche » citoyenne débutera par un rassemblement sur les lieux du drame, place Saint-Lambert pour se rendre ensuite vers l’hôpital St-Joseph, où est décédé le petit Gabriel (17 mois).
Dimanche 18 décembre à 11h, une cérémonie pluri-convictionnelle se tiendra au cœur du Village de Noël, place Saint-Lambert. L’aumônier du village, le doyen Jean-Pierre Pire y prendra notamment la parole.
Mardi 20 décembre à 12h30, il y aura l’hommage officiel de la Ville sur la dalle Saint-Lambert. Celle-ci se déroulera en présence des autorités du pays, notamment le Premier Ministre, Elio Di Rupo.

Pour éviter de démultiplier les démarches, la communauté catholique de Liège n’organisera pas de son côté de commémoration  particulière. Elle propose à ses fidèles de se joindre à une ou plusieurs de ces manifestations.
Elle invite également à prier pour toutes les personnes que ce drame a atteintes A cet effet, trois intentions rédigées par l’évêque de Liège, seront lues ce dimanche dans toutes les églises du diocèse :
–          Pour les victimes de la fusillade et leurs proches : que le Seigneur accueille dans sa paix définitive ceux qui sont morts et qu’à ceux qui souffrent, il donne de trouver la paix.
–          Pour les habitants de la ville de Liège : que leur cœur accueille les pensées de paix et de justice que le Seigneur leur inspire.
–          Pour les membres des services d’ordre et de secours : qu’ils trouvent apaisement et réconfort après tout ce qu’ils ont dû vivre.

Liège – lendemain de veille

Hier soir, en me rendant à la prière pour les victimes – organisée par la communauté de Sant’Egidio – je longeai la Meuse et suis passé sous le pont des Arches. En levant la tête, je vis que – d’une rive à l’autre – sur ce pont était garé un chapelet de camions-émetteurs de presse, venus de tous pays. Bien malgré elle, Liège était devenue le centre d’attention du monde entier. Comme d’autres, je reçus d’ailleurs plusieurs messages inquiets – ou paroles de soutien – de personnes habitant par-delà les océans.

Et pourtant, tout cela gardait quelque chose d’irréel pour ceux, qui – comme moi – avaient vécu le drame à quelques rues de distance. J’avais été témoin de l’agitation et avais vu les policiers courir dans les rues, mais guère plus. Il m’était difficile de me dire que cette ville meurtrie – dont la presse était pleine, frisant par moment le trop-plein – était celle où je vivais. Jusqu’au moment où je reçus un mail m’annonçant qu’une des jeunes victimes était le fils de voisins d’une connaissance. Un gamin poli et aimable, parti le matin pour réussir un examen et qui ne rentrerait pas. Alors seulement, la tragédie reçut un prénom et un visage.

Ce matin encore, le visage des Liégeois était fermé. Tel celui qui a la gueule-de-bois, la Cité Ardente s’est réveillée sonnée par le coup de boutoir, reçu la veille. Petit à petit, pourtant, les rues se sont à nouveau animées. L’esprit ardent et bon-vivant des Principautaires reprend le dessus. Ceci, même sur les lieux du drame, où je suis passé ce mercredi midi. Mais Liège n’oublie pas. Sujets de conversations graves et regards chargés d’émotion. Liège se relève, mais n’oublie pas.

Merci à Serge Schoonbroodt de m’avoir signalé l’œuvre du photographe Jim Sumkay, en ajoutant pour unique commentaire : « Liège est meurtrie mais digne. Liège est belle, même lorsqu’elle souffre ! » http://www.museepla.ulg.ac.be/opera/sumkay/2011/1213.html http://www.museepla.ulg.ac.be/opera/sumkay/2011/1214.html

 

Attaque à Liège – Invitation à la prière

La communauté de Sant’Egidio invite à une prière spéciale pour se souvenir et prier pour les victimes de l’attaque qui s’est produite aujourd’hui Place Saint-Lambert. La prière a lieu ce mardi 13 décembre à 20 heures dans la Collégiale Saint-Barthélemy (place Saint-Barthélemy – 4000 Liège). Je suggère à chacun de s’y unir d’une façon ou d’une autre.

C’est arrivé près de chez nous…
Journée pluvieuse et venteuse sur Liège. Quelques rendez-vous et du travail en retard. A midi, je partage mon repas avec un homme aimable et cultivé. Nous parlons de choses et d’autres, quand la rue se remplit de policiers. Une rumeur s’élève des tables voisines. J’entends tomber les mots « grenades », « tirs », « morts », « blessés ». Dans le ciel, le vrombissement d’un hélicoptère. Je rallume mon portable. Plusieurs messages d’amis déjà, qui me contactent pour savoir si je vais bien. Je veux les rassurer, mais les réseaux sont saturés. Je rentre au presbytère et me place devant mon ordinateur. Twitter crépite. L’info se reconstitue à tâtons. Dans la rue, la sirène d’une ambulance hurle sur fond du carillon de la cathédrale. Au milieu de ce bruit, je pense au silence qui recouvrira bientôt ces victimes et leurs familles. Aujourd’hui, demain et après encore. Alors, j’arrête twitter et je me mets à prier.

« Bonjour, tristesse » – 3e dimanche de l’Avent, Année B

« Au milieu de vous, se tient Celui que vous ne connaissez pas » (Jean, 1, 6-8, 19-28)

Le troisième dimanche de l’Avent, est surnommé Gaudete – ce qui signifie en latin « dimanche de la joie ». N’est-il pas curieux de constater que, malgré l’augmentation du niveau de vie de nos populations, ce soit souvent la tristesse qui domine sur nos places et dans nos chaumières?
Un effet de la crise économique ? Pour ceux qui manquent de tout – sans nul doute. Voilà pourquoi, nous aurons ce dimanche l’occasion de nous montrer doublement généreux, au cours de la collecte de solidarité de l’Avent. Un peu de nos économies peut signifier beaucoup pour ceux qui – au milieu de nous – n’ont plus rien.

Cependant, si un minimum d’aisance matérielle octroie dignité et sécurité, la richesse ne procure pas la joie. Notre société matérialiste est habitée d’une tristesse diffuse et permanente. Ce qui manque ? L’Amour. « Bonjour tristesse » de Françoise Sagan – publié en 1954 – exprime assez bien ce sentiment de vide.
« Au milieu de vous, se tient Celui que vous ne connaissez pas », clame le Baptiste. Un Enfant vient à Noël. Il porte la joie au monde. Pas la joie fugace des séductions ou bulles de champagne, mais la joie profonde d’un Dieu qui – de son regard – nous révèle que nous sommes aimés – inconditionnellement.