« Si ton frère a commis un péché, va lui parler » (Mt 18, 15-20)
Si le christianisme était un sport, il serait un sport collectif. C’est ensemble que les baptisés vivent du Christ et non pas chacun dans son coin – jouant à qui sera le meilleur chrétien de la classe. Ainsi, la parole que Dieu adresse au prophète Ezéchiel (1° lecture) : « Fils d’homme, je fais de toi un guetteur ».
En ce début de XXIe siècle, les progrès de la société n’ont pas libéré l’homme de sa conscience. Les mêmes questions qu’à l’époque d’Ezéchiel résonnent dans les cœurs : « Quel est le sens de l’existence ? Comment réussir sa vie ? Quel est le secret du bonheur ? » Les disciples du Christ se doivent donc d’être des « guetteurs » – des femmes et hommes capables de saisir l’enjeu spirituel des choses, d’avertir des impasses, d’inviter à une « conversion » – c’est-à-dire à un retournement de perspective.
« Si ton frère a commis un péché, va lui parler », enseigne l’Evangile. Mais attention à la caricature. Sans l’Esprit, le « guetteur » devient vite une éternelle belle-mère, un insupportable donneur de leçons,…. Vous savez, ces braves personnes qui ont à la bouche en toute circonstance, une parole assassine du genre : « Je te l’avais bien dit… » D’où l’avertissement de saint Paul dans son épitre aux Romains (2° lecture) : « L’accomplissement parfait de la Loi, c’est l’amour ».
Soyons des guetteurs de l’amour. Mettons-nous à l’école de l’Esprit. En ce temps de rentrée scolaire, voilà bien une école ouverte tous les jours et à tous les âges. Une école de la réussite – où les baptisés restent élèves à vie.
Autrement dit: avant de regarder la paille qui est dans l’oeil de l’autre, regarde d’abord la poutre qui est dans le tiens. Quand au sens de l’existence qu’évoque aussi Eric, comment pourrions-nous souscrire à ce mots de Bertrand Russel: « Le monde est une machine sans âme qui suit une trajectoire aveugle dans l’infini de l’espace et du temps »? Si une telle absurdité est la vérité il n’y a plus qu’une solution: le pistolet sur la tempe. Oui, en dehors de Celui qui est notre passé, notre présent et notre avenir, tout s’écroule et je ne comprends pas vraiment pourquoi ceux qui optent pour le non-sens restent encore en vie.
Monsieur Snyers,
Libre à vous d’appeler cette proposition de Russell une « absurdité ».
Il n’est plus là pour vous répondre.
Mais s’il l’était, sa réponse serait claire: l’absurdité est celle de la position philosophique qui présuppose un « créateur », position pour laquelle il n’existe aucune base scientifique.
Notez mon utilisation délibérée des guillemets: ce-ci afin d’éviter que l’on confonde des positions philosophiques de Russell et (très modestement, car qui serais-je pour me comparer à un géant comme Russell) ma propre opinion.
Mais il y a une deuxième considération: elle concerne le lien très simpliste que vous faites entre la position athée et le suicide.
C’est un propos que vous lancez à la légère et vous avez tort de le faire.
Ceux qui ont adopté une position agnostique ou athée sont parfaitement en état de construire une vie morale et un système de valeurs en dehors d’un cadre de religion.
A mon avis, la position de Russell n’est pas absurde. Mais l’absurdité levée ici ne concerne pas le propos ou la réflexion philosophique, mais plutôt l’image même d’un univers qui dériverait sans but ni sens. Russell montre ici avec intelligence, un monde idiot qui prive à toute existence, toute vie, la possibilité de se trouver un but. D’où l’absurde.
Dans un tel univers, l’homme sans Dieu serait obligé d’accepter deux solutions :
– l’absurde d’une vie dépourvue de sens et l’impossibilité d’en trouver. L’image un peu forte du pistolet sur la tempe illustre simplement la question : dans un tel monde, pourquoi vivre ? La vie est une mascarade.
– l’autre solution serait de se donner à lui-même un sens. Mais que serait ce sens sinon une illusion ? Quelle légitimité l’homme aurait-il pour se l’octroyer ? Quelle autorité ? Au nom de quoi ? Sur quelle base ? L’homme n’aurait que lui-même pour se donner un but. Mais on voit bien la supercherie. Dans aucun autre cas il ne semble acceptable qu’un individu soit son propre juge.
Le sens, la valeur, le but… ces mots n’ont aucune légitimité à moins de nous venir de quelque chose qui est leur source et qui peut prétendre à cette autorité.
Se l’octroyer à soi-même est invalide et hypocrite.
La question de la Foi rejoint la question du Sens ! Comment sommes-nous sur cette terre et qu’avons-nous à y faire, quel est notre but et que devons-nous en espérer. Lorsque la réponse est la Foi, le reste tombe de lui-même… Je ne sais pas quelle est la réponse du point de vue athée mais pour moi « Dieu donne sens à la vie » (personne n’est obligé de me croire ni d’y adhérer ! ;-) )