Quand la France se réveilla…

Les p’tits Belges, dont je fais partie, sont coincés entre les trois grands d’Europe : l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France. D’aucuns ont une préférence pour la sobre efficacité germanique. D’autres – dont je suis – pour le pragmatisme flegmatique des British. Mais il y a la France…

La France – pays de Voltaire et de Bernanos ; patrie de Louis IX et de Lafayette ; nation de Clémenceau et de de Gaulle… La France – quoi ! Peuple de gueulards, sans cesse à se disputer comme le village d’Astérix, mais tellement généreux. Pays de la mode et des idées. De Chanel et de Descartes. Du French Cancan et de Lourdes. Du savoir-vivre et de la politesse – de la cuisine, du cidre et du vin. De l’humour et du satire. De « La Croix » et de « Charlie Hebdo ».

Depuis quelques années, ce pays réputé ombrageux, voire orgueilleux – était saisi de doute. Le Frenchbashing avait le vent en poupe et les plus pessimistes annonçaient le suicide national. Et puis, trois pauvres types manipulés et fanatisés ont voulu « venger le prophète de l’islam », gommant dans le sang les dessins d’une bande de galopins irrévérencieux.

Et là – la France se réveille. A nouveau, elle émeut le monde. Et pour pleurer ces dessinateurs soixante-huitards – héritiers des cris « CRS-SS » – le peuple se met à applaudir ses policiers. Et pour répondre au défi du fondamentalisme, croyants et mécréants de toutes traditions se sont rassemblés. Et pour honorer des satiristes férocement anticléricaux, le glas de Notre-Dame s’est mis à sonner. Et pour rendre hommage à ces artistes non-croyants, d’autres athées ont déclaré : « de Là-Haut, ils doivent bien se marrer. »

Depuis mercredi, la France se réveille au cri de « Je suis Charlie ». Et Dieu sait que cela fait du bien. Car l’Europe a besoin de la France. Car le monde a besoin de la France. Car même les français ont besoin de la France. Alors oui – cocorico. Vive la France !

Et comme disait la maman de l’empereur Napoléon : « Pourvou qu’ça doure »

7 réflexions sur « Quand la France se réveilla… »

  1. Oui, la France a donné une leçon de dignité cet après-midi. Malheureusement, cela se gâte déjà dans la soirée avec l’émission de France 2, retransmise, entre autres, sur la RTBF. A côté de témoignages chaleureux et émouvants, commencent à poindre les attaques anti-religieuses… et pour certains, la revendication ultime : « le droit au blasphème » ! (ce n’est pas la 1e fois que je l’entends ces derniers jours !)… jusqu’à prévoir de faire signer aux responsables religieux (toutes religions confondues) un document autorisant le blasphème et le faire afficher à l’entrée des lieux de culte ! (dixit un certain Goupil, je pense).
    Dans un message diffusé à la radio, Philippe Geluck dit, je pense : « informer dans la liberté, le respect et la tolérance » (je cite de mémoire). Tout à fait d’accord, mais je ne pense pas que blasphémer soit respectueux ou tolérant.
    Voici donc le message que je viens d’envoyer à France 2. Je ne sais pas s’il sera pris en considération, mais ça soulage de s’exprimer « librement, dans le respect et la tolérance ».

    « Paix aux victimes et à leurs familles durement éprouvées par ce bain de sang atroce ! Je suis de tout coeur avec elles ! Bravo aussi pour cet élan de solidarité nationale et internationale ! Mais pas d’accord avec cette exigence de « droit au blasphème » !!! Quand les athées comprendront-ils qu’en attaquant Dieu, ils touchent les croyants en plein cœur et ne font qu’attiser la haine? Bien sûr, on peut discuter, mais dans le respect et la TOLERANCE. C’est une vertu républicaine, non ? « Liberté, Egalité, Fraternité » : la Liberté ne va pas sans la Fraternité, dans l’Egalité. Combattre l’extrémisme, oui, mais sans amalgame ! Merci à Jonathan Lambert, qui se dit athée, mais semble avoir avoir compris cela.
    PS : Même si certaines victimes n’étaient pas croyantes, je ne pense pas que des prières sincères leur feront du tort, qu’elles viennent de chrétiens, de musulmans ou de juifs. C’est un acte de « fraternité », pas une récupération. »

    1. Bonne réaction. Mais notre RTBF n’est pas en reste quand elle peut manier l’amalgame. Le soir des faits qui nous occupent ici, François de Brigode annonçait dans le JT de 19 heures 30, contre toute évidence:  » Il pourrait aussi s’agir de catholiques proches de l’extrême-droite. Les recherches se poursuivent et aucune piste n’est écartée ». Il n’en croyait probablement pas un mot, mais le but était atteint: faire croire au bon peuple que cathos ou extrémistes musulmans, c’est à peu près la même chose puisqu’il s’agit d’extrémistes. Un vrai voltairien!

    2. @sprynger
      Vous avez mentionné l’égalité en plus de la liberté et de la fraternité sans pour autant l’inclure dans votre argument. Comment voulez vous maintenir une égalité quand il n’y a pas droit au blasphème.

      Chacun est libre de déclarer toute sorte de croyances, idées ou actes comme essentiels, saints, intouchables ou que sais je.
      S’il est admis de revendiquer de tels immunités, quid de l’égalité? N’est ce pas celui qui crie le plus fort qui qura le plus de droits spéciaux?

  2. La loi contre le blasphème a fait grand tort, au Pakistan, ne l’oublions pas. A l’ONU les pays du monde musulman essayent en vain de promouvoir une résolution, je pense, condamnant le blasphème. Donc je comprends un petit peu le point de vue des « libertaires ». Ceci dit, et le crime étant condamné, le mode d’expression de Charlie Hebdo mais souvent plus que déplu et je n’ai pas voulu reprendre le fameux slogan identifiant à eux. Il y a un contraste criant entre l’appel universel au respect et l’expression de ce magazine, encore mis en évidence par le fait qu’un journaliste survivant « vomit » les soutiens que sa publication reçoit, notamment du pape.

    1. Je suis d’accord. Qu’est-ce qu’un blasphème? Les limites peuvent être variables en fonction de l’interprétation de chacun. Je ne suis pas plus pour une loi anti-blasphème que pour le droit au blasphème. Il est dangereux de légiférer sur ce sujet, mais de là à réclamer un « droit au blasphème »!!!! le respect de l’autre passe par le respect de ses croyances, ce qui n’interdit pas, au contraire, la discussion « fraternelle » ( mais là déjà , on commence a sortir le catho…).
      Une réflexion : notre societe bien-pensante condamne (à juste titre!) les propos racistes, anti-semites, anti-homo etc…. Et les croyants de bonne volonté dans tout cela?
      2ème réflexion : Pour paraphraser un président français , les religions n’ont pas le monopole du fanatisme sanglant. Que ceux qui en ont l’âge se rappellent les CCC (cellules communistes combattantes) et autres groupuscules similaires et les autres, les dictatures et autres régimes totalitaires athées.

      1. Pas besoin de créér une nouvelle loi explicite « droit au blasphème ». Par contre, plusieurs états en Europe ont encore des lois anti-blasphème que j’aimerais abroger.

        Pour celui qui est privilégié par le status quo, c’est évidemment facile de dire que le sujet est tellement sensible qu’il vaut mieux jamais rien changer.

        Pourquoi être croyant de bonne volonté donnera droit à des immunités spéciales? Qui définit ce que c’est une bonne volonté ou une croyance? Pourquoi le respect de l’autre passera-t-il par le respect de ses croyances? J’ai déjà dit à plusieurs personnes que je les respecte trop pour respecter leur croyances ridicules. (pour me rendre compte à chaque fois qu’ils prétendaient uniquement de les croire mais c’est une autre histoire)

        Puis, comme vous le mentionnez, il y a les communistes. Il vaudra donc peut être mieux d’interdire tout discours qui met en question le droit à la propriété individuelle. Maintenant que tout le monde est servi sauf moi, à moi de choisir. Ce n’est pas comme si il n’y avait rien qui me dérange. Je pourrais interdire la négation catégorique de l’évolution et du changement climatique.

        Une fois que l’état se mèle à la décision de ce qui est une opinion acceptable ou pas, il n’y a plus de fin. Je suis donc très sceptique par rapport à toutes ces exceptions que vous mentionnez.

        Jusqu’ici je parle biensur uniquement de la situation légale. Il est absolument permis et souhaité d’avoir des discussions respectueuses. Je ne trouve par contre pas qu’on devrait les décréter par la loi parce que de temps en temps, le ridicule a ses mérites aussi.

  3. n’idéalisons pas trop la France, pays qui vit dans le carcan de l’idéologie matérialiste et laïque militante. Cette « laïcité à la française » est perçue ailleurs comme une arrogance: nous Français nous détenons la vérité (Dieu est une construction humaine, seule la raison doit mener le monde), mais comme la France n’a pas les moyens d’imposer cette vision par la force la seule solution est d’insulter et de mépriser tous les fous (qu’on devrait enfermer en psychiatrie) qui croient en une transcendance.
    Regardez ce qui est arrivé à Jacqueline Kelen après son essai « impatience de l’absolu », dans lequel elle critiquait l’humanisme: elle devient quasi invisible dans les medias…
    Quant à ce qui se passe dans le monde, ce qui se passe aujourd’hui n’est qu’un début.

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