Ce 13 novembre, ma chronique du mois a été publiée en p.55 du quotidien La Libre. Pour lire celle-ci, cliquez sur le lien suivant: « L’autre Pape du Concile ».
Merci à la rédaction de « La Libre » de m’offrir cet espace d’expression.
Ce 13 novembre, ma chronique du mois a été publiée en p.55 du quotidien La Libre. Pour lire celle-ci, cliquez sur le lien suivant: « L’autre Pape du Concile ».
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Cher Père,
Vous avez l’âge de mon petit frère et je me sens votre aîné de douze ans. Je n’ai donc pas tout à fait la même vision. Je sens toujours une différence entre la demie génération catholique qui nous sépare… Ma mère me disait aussi que nous n’avons pas reçu la même chose mon frère et moi… Vous êtes entrés dans l’adolescence après effondrement des structures de Contre Réforme du XVIème siècle qui avaient de beaux restes de mon temps (sous Pie XII et même un peu après). C’est comme de juger de la guerre en âge adulte ou pas en 1939 ou 1945, Deux mondes différents.
« …ce Pape humaniste, cet homme inquiet et timide, avait crié son désarroi à la face du monde. »
La Renaissance, la Réforme et la Révolution les trois R. Difficile pour un pape de protéger l’humanisme sans être débordé par le paganisme, l’hérésie et la révolution.
Je lis en ce moment mgr Delassus, qui y voit les trois démarches de la conjuration antichrétienne. Il écrit en 1910, cela me plait de prendre 102 ans de recul. Oui pape humaniste donc faible face à la maçonnerie… Victime ou coupable, un peu ou beaucoup des deux. Louis XVI avec le bonnet phrygien. L’un en perdant sa couronne perd sa tête, l’autre perd sa tiare et sa crosse. … J’imagine Joseph de Maistre écrivant sur Vatican II…
« Quant à ces catholiques pour qui – tels les salafistes – seule une religion figée est une religion fidèle, ils eurent beau jeu d’y voir un aveu de faillite de la part de l’Eglise conciliaire. »
Je me sens salafiste, si l’expression sert d’alternative à intégriste, sans être assez fidèle. Une religion qui est fixée dans ses dogmes sans être figée dans sa vie. Dieu ne change pas car il est parfait. J’aime à dire que l’intégralité des dogmes (mot hai) et des vérités connexes à la Révélation sont immuables, non réformables et non négociables pour cause de perfection divine. Car si Jésus est Dieu son enseignement est parfait. Dites cela pour provoquer en milieu conciliaire réformé… Oui la faillite est là, mais n’accusons pas la « Nouvelle Pentecôte », l’horizon indépassable de la pensée moderne…
« Vatican II aurait donc dû s’ouvrir trois bonnes décennies plus tôt, achevant ainsi les ébauches du concile Vatican I – interrompu par la perte des états pontificaux. Mais deux guerres mondiales empêchèrent l’aggiornamento. La candeur audacieuse de Jean XXIII permit enfin l’aventure. L’intelligence et la sensibilité de Paul VI la menèrent à bien. Mais à quel prix. Vatican II enleva le couvercle de la marmite. Mai 68 décupla la pression. Et Paul VI prit le bouillonnement en pleine figure. »
Vous êtes gentil…
La forteresse assiégée.
C’est vrai, je relis Vatican I et sa constitution Dei Filius, et surtout ses anathèmes qui la clotûrent. Anathèmes, qui font contraste avec les bienveillances universelles de Vatican II. Nous sommes en continuité avec la Tradition officiellement.
Pie IX -Paul VI même combat, je veux bien… Je ne suis pas sûr que cette ligne de Benoit XVI dure 50 ans de plus, mais vous êtes plus jeune vous devriez vivre plus d’évolution que votre serviteur.
Je n’ai jamais été enthousiaste pour la fête de la fédération , mais j’attends gentiment que Rome bouge insensiblement les lignes.
Cordialement
Olivarus
Cher Olivarus,
« L’Eglise change pour rester la même », disait le Bienheureux Newman. C’est comme tout être vivant: le patrimoine génétique ne peut être altéré, mais tout le reste est développement – du bébé à l’adulte. Le développement n’est donc pas une altération du dogme. C’est la sclérose du dogme qui est sa trahison. En plus, par certains côtés, Vatican II est le concile le plus tradi. de l’histoire: à force de chercher son inspiration dans l’Eglise des origines. Enfin, ce n’est pas le nombre d’anathèmes qui indique le niveau d’orthodoxie. Sinon, devenons tous pour de bon salafistes et tout devient simple: il y a le « halal » et le « haram ».
Fraternellement,
Eric
Je vous aime bien, vous défendez votre mère , même quand elle est malade.
Mouais, vous voulez être gentil. Moi aussi, ce que je vous écris, je ne l’ai jamais dit au clergé fidèle par amour pour la famille. Ni à mes frères et soeurs pour ne pas les offusquer.
Mgr Schneider, évêque d’un diocèse d’asie centrale propose un nouveau syllabus des erreurs qui ont triomphé après Vatican II. Cela me réveille du long désintérêt pour beaucoup de textes bisounours. Il est gentil lui aussi, il parle des erreurs qui ont triomphé après Vatican II pas à Vatican II. Il est religieusement correct.
Je mourrai avant la contre réforme inéluctable.
J’aime Rome malgré sa réforme en laquelle je ne crois pas. Je ne saurai comme Gros Jean en remontrer à mon curé, donc je suis contraint à un effacement sans esclandre. L’amour est forcément silencieux.
Le clergé jureur à des excuses et le tradi risque de finir comme les non jureurs dans la petite église. Le concordat ne sera pas forcément accepté.
L’Eglise est surnaturelle, le pouvoir occulte qui croit avoir pris le dessus, le découvrira de plus en plus avec horreur.
Dieu permet les tribulations.
Cordialement
Deux hommes s’en furent à l’église pour prier ; l’un était « fidèle à la Tradition catholique », l’autre « en recherche ». Le Fidèle, debout, priait ainsi en lui-même : « Mon Dieu je te rends grâce que je ne suis pas comme ces chrétiens post-conciliaires, qui trahissent le dépôt sacré, détruisent la sainte liturgie, suivent l’esprit du monde, ou bien encore comme ce malapris qui ne s’agenouille même pas pendant la consécration et communie dans la main ; moi je jeûne deux fois par semaine (le mercredi et le vendredi), je dis mon chapelet tous les jours et je donne volontiers aux fraternités sacerdotales traditionnelles.
Le chrétien en recherche, se tenant à distance, n’osait même pas lever les yeux au ciel, mais il se frappait la poitrine en disant : « Mon Dieu, aie pitié du pécheur que je suis ! Je fais le mal que je ne veux pas faire et je ne fais pas le bien que je voudrais faire ! »
La traditionnaliste est un pharisien, le conciliaire un publicain.
Pourquoi pas ? C’est vrai qu’il y a une sociologie des idées religieuses.
Je me sens donc pharisien. Le conciliaire est donc un pauvre publicain.
Cela ne vole pas très haut. Le moins que l’on puisse dire c’est que le tradi avec tous ses défauts ne cherche pas l’avancement facile dans le système actuel. c’est une bonne leçon productive de grâces.
Même le conciliaire modéré qui ferait un pas vers la liturgie traditionnelle sait qu’il ne facilite pas son avancement. Mon évêque que j’aime bien, me donne l’impression de transgresser un tabou majeur par sa timidité évidente quand il vient célébrer les confirmations au milieu des pestiférés de mon espèce. Je me garde bien de dire quoi que soit. Je me contente de remplir les verres et de distribuer les petits fours. On sait le terrorisme intellectuel du milieu. Il faut tenir compte de l’égarement des esprits.
Normalement j’étais un indien à parquer dans une réserve avec de l’alcool frelaté en attente d’extermination. La réforme s’est faite sur une intolérance radicale de ce qui était traditionnel, il y a encore de beaux restes de totalitarisme chez les réformateurs. Un désarroi aussi, car si le succès était au rendez vous l’opposition serait le fait de vieux débris charmants mais désuets, mais l’échec universel de la réforme avoué par les réformateurs eux-mêmes rend agressifs les plus engagés et courtois les autres plus pondérés. J’en conclus d’ailleurs que si un jour ma tendance venait à l’emporter, je déconseillerai à mes amis d’opposer la terreur blanche à la terreur rouge mais la charité et la réconciliation. Mais effectivement je suis un pharisien mondain jouissant d’une situation sociale éminemment favorable qui ne peut que développer une hypocrisie religieuse.
Soit, merci mon frère dans la foi de m’éclairer et de me ramener à l’humilité.
Vous avez en partie raison.
Cordialement
Deux hommes s’en furent à l’église pour prier ; l’un était « dans l’esprit du Concile », l’autre « fidèle à la Tradition ». Le conciliaire, debout, priait ainsi en lui-même : « Mon Dieu je te rends grâce que je ne suis pas comme ces chrétiens sclérosés, qui n’ont plus bougé depuis le concile de Trente, s’accrochent à des symboles dépassés, moralisent à tout crin et fuient la révolution permanente qu’est l’Evangile ; merci aussi de n’être pas comme ce tradi en loden, accroché à son latin, perdu dans son moyen âge spirituel ; moi je donne le catéchisme deux fois par semaine, je dirige l’équipe liturgique, je suis visiteur de malades, je suis une formation permanente à l’évêché, je suis membre actif d’Amnesty international…
Le chrétien tradi, se tenant à distance, n’osait même pas lever les yeux au ciel, mais il se frappait la poitrine en disant : « Mon Dieu, aie pitié du pécheur que je suis, et sauve ton Eglise ! Je fais le mal que je ne veux pas faire et je ne fais pas le bien que je voudrais faire ! »
Pierre René
Phari-publicain.
Olivarus
Publi-pharisien.
« Frère homme, hypocrite, mon frère. » Le poète.
Ni phari-publicain, ni publi-pharisien. Juste baptisé.
Dans l’Eau.
Et dans le Sang.
Oui, vous avez raison.
Le discours sur l’hypocrisie est très subtil car nous ne sommes pas tout d’un bloc.
Le meilleur c’est le pauvre et saint curé d’Ars, car on sait après sa mort qu’il brûlait dans son poële les lettres de compliments qui lui arrivaient de toute la France et qu’il transmettait à son évêque les lettres de reproches et de récrimination en les appuyant et en s’accusant de ses insuffisances.
Le saint transcende notre comédie humaine.
Vous avez raison (avec le Christ) : soyons juste des saints, tendus vers la perfection, vers Dieu notre Père (tellement tellement tellement patient), vers nos frères tellement imparfaits…