Naufrage…

Les images du naufrage du Concordia sont troublantes. Outre le drame humain avec ses victimes et le risque environnemental, il y a quelque chose d’irréel à contempler ce seigneur des mers couché sur son flanc – et ce, tout près de côtes paradisiaques. Quand un avion se crashe, ne restent que des débris. C’est également des amas de tôles froissées et fumantes qui marquent un accident de voiture ou de train. Rien de tel avec le Concordia. Tout semble s’être passé « en douceur »… sans choc, ni violence. Simplement voilà : la ville flottante semblait invincible et puis – en quelques heures – la voilà devenue le jouet des flots.

Et le souvenir du Titanic nous revient en mémoire. J’ai affiché chez moi une grande photo du puissant navire quittant Southampton. Elle fut prise par le plus grand photographe marin de sa génération, Beken of Cowes. Le titan britannique semblait – lui aussi – insubmersible. Rien ne pourrait lui arriver. Puis, il y eut un banal iceberg. Aujourd’hui, ce naufrage nous apparaît comme une cruelle prophétie pour la vieille Europe, colonisant alors la terre entière et confit de confiance en sa supériorité culturelle – avant que deux guerres mondiales lui rappellent sa fragilité.

Pareillement, le naufrage du Concordia, ce géant des croisières touristiques, nous dit quelque chose sur la société de consommation. Cette société de loisirs semble éternelle. Mais il suffit d’une coupable imprudence et d’un rocher pour que les évidences apparemment insubmersibles fassent naufrage.
Mes pensées et prières vont tout naturellement vers les victimes de ce drame marin et vers leurs familles. Je pense surtout à ces familles qui vivent encore dans l’incertitude, car le corps de leur proche n’a pas été retrouvé. Mais, je ne puis non plus me détacher du symbole de ce naufrage. Puisse-t-il rappeler à notre société de consommation qu’elle est fragile et éphémère. Ce rappel ne sert pas à distiller la peur, mais à nous recentrer sur les valeurs non-périssables. Comme aimait à le répéter le Christ:  « Veillez ! » (Marc 13, 33)

2 réflexions sur « Naufrage… »

  1. Ecclésiaste 12, 1 et 6-8

    1 Et souviens-toi de ton créateur aux jours de ta jeunesse, avant que viennent les jours mauvais et qu’approchent les années dont tu diras: « Je n’y ai point de plaisir. »
    (…)
    6 .Avant que ne se rompe le cordon d’argent, que se brise l’ampoule d’or, que la cruche se casse à la fontaine, que la poulie se brise et roule dans la citerne;
    7 .Et que la poussière retourne à la terre, selon ce qu’elle était; et que l’esprit retourne à Dieu qui l’a donné.
    8 .Vanité des vanités, dit l’Écclésiaste, tout est vanité.

    Le mot « naufrage » (je suis allé voir l’étymologie ») est une crase de « navifragus », brisement de navire. Le brisement, la corrosion, la déliquescence sont des phénomènes que connaît la création et que nous ne pouvons pas négliger; nous luttons « contre » par de l’entretien, du renouvellement, mais le temps accomplit une oeuvre qu’il n’est pas possible de totalement contrer.

    Je suis également frappé par la grande fragilité qu’évoque ce naufrage – et par l’affront qu’il représente à l’orgueil humain- et partage votre vision de ne pas en concevoir ou en nourrir de la peur, mais d’en retirer encore un plus grand attachement aux valeurs non-périssables.

  2. La comparaison est intéressante mais il y a au moins 2 différences de taille. A la différence d’une croisière de luxe à laquelle il est tout à fait facultatif de participer, on ne peut guère faire autrement que d’être dans cette vieille Europe naguère si arrogante.
    Mais nous, à la différence des passagers d’un paquebot, on est sensé pouvoir élire nos capitaines.

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