Eglise et abus sexuels : trois considérations pour contribuer au débat (Nederlandstalige versie, hierboven)

2010 – annus horribilis pour l’Eglise de Belgique ? Indéniablement. Ou alors annus mirabilis, comme l’exprime Mgr Léonard (Humo, 18 janvier)? Tout autant. La démission de l’ancien évêque de Bruges fut l’électrochoc qui permit de prendre conscience de l’ampleur des abus sexuels commis, à une époque pas si éloignée, par des membres du clergé. Une mémoire ancienne se réveilla chez nombre de victimes et – par ricochet – auprès des responsables politiques, judiciaires et ecclésiaux. Ceci enclencha un exercice de vérité douloureux, mais libérateur.
Pareil exercice est loin d’être achevé. Pour contribuer au débat et au terme de plus de six mois de relative discrétion médiatique, je reviens à mon tour – quelques jours avant la fête de Pâques – sur le dossier « abus sexuel » par trois considérations. La première traite de vérités refoulées, la deuxième se penche sur notre culture du zapping et la troisième annoncé l’avènement d’une identité catholique pacifiée. Qu’il soit bien clair que je m’exprime ici à titre personnel. Ceci est d’autant plus vrai que je suis déchargé de tous mandats au service de la conférence épiscopale. Evidemment, ceci n’empêche que je reste un témoin engagé et même impliqué. Mais si tous ceux qui se sentent impliqués par le drame des abus sexuels doivent se taire, plus personne ne s’exprimerait.

Actualités : Commission parlementaire et sanction vaticane
Mon propos ne se veut pas avant tout une réaction à l’actualité récente. Je commente néanmoins rapidement celle-ci, afin de ne pas être soupçonné de vouloir esquiver les questions chaudes du moment :
J’ai lu le rapport de la Commission Parlementaire « abus sexuels » et je l’ai trouvé bien documenté et nuancé dans ses conclusions. Je salue donc le travail de nos élus. Ceci étant dit, je reste avec un regret et une interrogation.
Le regret : Je regrette que tous les évêques furent auditionnés par la Commission à quelques jours de la fête de Noël. Sans doute était-ce un hasard de calendrier, mais celui-ci fut symboliquement malheureux. Mettre l’Eglise sur la sellette dans le cadre de la protection de l’enfance à quelques jours de Noël, c’est un peu comme auditionner un parti de gauche pour de graves délits contre le droit des travailleurs à quelques jours du 1er mai. Cela fait doublement et inutilement mal.
L’interrogation : Je m’interroge sur le sens et la portée exacte de la recommandation n°4 de la Commission parlementaire: « La commission spéciale recommande donc, à l’avenir, de ne pas recourir à des documents qui, quel que soit l’intitulé qu’on leur donne, pourraient apparaître comme des accords passés avec des personnes de droit privé auxquelles seraient déléguées des missions essentielles, concernant l’exercice de l’action publique et l’opportunité des poursuites, que la Constitution et la loi réservent au ministère public ». Je ne vois pas bien comment pareille recommandation pourrait s’appliquer dans le monde de l’assistance psychologique et sociale, qui passe sans cesse ce genre d’accords – écrits ou tacites – avec le monde judiciaire. En effet, ces professionnels de la santé et du bien-être doivent connaître les critères qui séparent le traitement en interne du dépôt de plainte. Ici, je pense que la Commission parlementaire adopte un point de vue trop tranché, qui tranche singulièrement avec la proposition par ailleurs faite à l’Eglise de consentir à la création d’un tribunal arbitral. Ce faisant, la Commission ne propose-t-elle pas aussi quelque part « un accord passé avec des personnes de droit privé auxquelles seraient déléguées des missions essentielles, concernant l’exercice de l’action publique et l’opportunité des poursuites, que la Constitution et la loi réservent au ministère public » ?
Ce regret et cette interrogation étant énoncés, je réitère mon appréciation du travail en profondeur fait par les élus du peuple.

Par ailleurs – et comme beaucoup d’observateurs – j’ai été surpris par la sanction que le Vatican a infligée à l’ancien évêque de Bruges. Beaucoup en ont conclu que ceci était bien la preuve que le Vatican restait sourd à la colère populaire. Il est vrai que si le rôle d’une sanction est de punir symboliquement l’auteur d’un scandale, il aurait fallu trouver autre chose que cette forme d’exil sous surveillance. Mais si le rôle d’une sanction est d’être adaptée pour ramener celui qui a gravement chuté dans le droit chemin (en droit canon, on parle de « peine médicinale »), je fais confiance à l’enquête du Vatican et à ses conclusions. La question ici posée n’est donc pas de savoir si le Vatican protège ou non l’ancien évêque de Bruges. En acceptant le vendredi 23 avril 2010 – alors qu’ils n’étaient informés que depuis trois jours – et pourtant, sans l’ombre d’une hésitation, la démission de l’ancien prélat, le Vatican a fait la preuve de sa volonté de transparence. Non, la question ici posée, est de savoir s’il fallait appliquer une peine médicinale ou une sanction disciplinaire exemplaire, car symbolique. Je n’ai pas d’avis tranché sur la question, car je trouve que la mise au ban par la société belge de l’ancien évêque, est déjà en soi une puissante sanction symbolique. (*Nous apprenons par ailleurs que sa punition n’est pas encore définitivement fixée).

Mon point de vue sur l’actualité étant précisé, je propose maintenant au lecteur de quitter mentalement les derniers développements, pour prendre un peu de recul et même – osons le mot – de hauteur. Les trois réflexions qui suivent ne se prétendent pas infaillibles, mais Dieu sait que j’ai y beaucoup réfléchi avant de les écrire :

1. Vérités refoulées
Tout le monde en convient : L’actuelle prise de conscience se doit d’être davantage que l’enterrement symbolique de notre passé catholique. Elle doit chercher à trouver des solutions structurelles permettant de mieux protéger l’intégrité sexuelle des mineurs. Pour ce faire, il s’agit d’ouvrir toute la boîte, afin d’en faire sortir nombre de vérités encore trop refoulées. Sans pour autant relancer une chasse aux sorcières. Simplement pour parvenir à un surcroît de lucidité. En écrivant cela, je ne cherche nullement à minimiser le scandale que représente les abus sexuels commis par des membres du clergé. Si une réalité sur cette terre aurait dû dénoncer l’ancienne culture du silence entourant les abus sur mineurs, c’est bien l’Eglise catholique qui se fonde sur la parole du Christ et dont le core business a toujours été la défense des petits et des faibles. La pédophilie a non seulement brisé des vies, elle a également souillé la relation de confiance qui reliait le prêtre à l’enfant. Et cela n’est pas anodin. Les enfants se trouvent au centre de l’Evangile. Depuis toujours, les adolescents désertent le chœur des sanctuaires avec les premiers émois de la puberté. Mais jamais les enfants ne se sont méfiés du sacré. Souvent, ils sont les premiers catéchistes de leurs parents avec leurs questions ingénues. Laisser le soupçon s’installer entre le berger et les agneaux fut une chose inouïe et terrible. Je ne puis donc que faire mienne la demande de pardon de nos évêques, exprimée dans leur lettre pastorale du 19 mai dernier : « Des abuseurs ont reçu une nouvelle chance, tandis que des victimes portaient en leur chair des blessures qui ne se cicatrisaient pas ou peu. A toutes les victimes d’abus sexuels nous demandons pardon, tant pour l’agression que pour le traitement inadéquat de celle-ci. (…) Nous remercions les victimes qui trouvent le courage de briser le mur du silence en racontant ce qui leur est arrivé. Nous espérons que leur parole contribue à ce qu’elles obtiennent la reconnaissance et la guérison auxquelles elles aspirent. En s’exprimant, elles rendent en outre possible un chemin de purification et de conversion au sein de l’Eglise ».
Ceci étant rappelé, notre société prompte à pointer du doigt les manquements bien réels de la hiérarchie catholique, semble ne pas encore pleinement affronter ses propres ambiguïtés. Je parle du flottement généralisé par rapport à la pédophilie quelque part entre 1960 et 1990. Exemple vécu : Le 12 septembre 1975, je n’avais pas encore 12 ans lorsque, assis devant ma télévision, je vis – éberlué – un écrivain en vue présenter dans l’émission littéraire Apostrophes, son livre « les moins de 16 ans ». L’ouvrage évoquait le plus naturellement du monde les aventures sexuelles de l’auteur avec des mineurs (une vidéo de l’émission circule encore sur internet). Ce n’était un dérapage isolé. « L’aventure pédophilique vient révéler quelle insupportable confiscation d’être et de sens pratiquent, à l’égard de l’enfant, les rôles contraints et les pouvoirs conjurés », écrivait un philosophe en vue le 9 juin 1978 dans le quotidien français Libération. En 1966, un livre pédophile reçoit dans notre pays le prix « Ark » de la parole libre. En 1973 un livre du même acabit est récompensé en France par le prix Médicis. Retour en Flandre, avec le musical « Snoepjes », une défense des adultes ayant des relations sexuelles consentantes avec des mineurs. Bref, il était à l’époque socialement acceptable de se faire l’avocat de la « libération sexuelle des mineurs ». Notre société doit oser évoquer lucidement ces années de flottement, où un adulte pouvait impunément se vanter d’être pédophile. Vérités refoulées…
Mais ce n’est pas tout. Comment se fait-il qu’en cinq années d’études en théologie, la morale sexuelle n’ait pas occupé plus de cinq pour cent de mon temps, alors que durant mon mandat de porte-parole des évêques, elle mobilisa plus de quatre-vingt pour cent de mes énergies ? La faute exclusive au discours exigeant et à contre-courant de l’Eglise? Ou également pour partie le symptôme que l’Occident vit un rapport à la sexualité plus problématique qu’il n’ose se l’avouer ? Vérités refoulées… Les années de libération sexuelle eurent parmi leurs inspirateurs la pensée « rousseauiste » du psychanalyste Wilhelm Reich : la sexualité de l’homme serait naturellement harmonieuse et pacifique ; seule la répression morale de la société aliénerait et rendrait les comportements pathologiques. Un demi-siècle de libérations – parfois, mais non systématiquement, bienvenues – plus tard, la sexualité occidentale n’est pas plus pacifiée. Bien au contraire. Le nombre de délinquants sexuels peuplant nos prisons est impressionnant. Et, à en croire le professeur en psychologie clinique de Gand, Paul Verhaeghe, notre société de consommation n’améliore pas les choses (Het Laatste Nieuws 15 janvier) : « Le sexe, l’amour, le désir, ce sont tous devenus des produits qui sont mis sur le marché. Il nous les faut – et tout de suite – toujours plus, toujours plus « hard » et ainsi de suite. Un effet collatéral de notre société néolibérale est qu’elle a délité les liens sociaux. Il n’y a pas que la famille classique qui a disparu, mais bien d’autres formes de socialisation sont mises en danger. L’individu est roi et sa jouissance centrale ». En lisant cela, un drame humain me revient à l’esprit. Celui de cette mère célibataire qui me confia que son enfant de moins de dix ans avait été abusé, plusieurs années durant, par un voisin adolescent. Telle est la réalité : Porteuse de tant de beauté, la sexualité n’en reste pas moins une matière hautement explosive. Parce qu’ils sont faibles, les mineurs d’âges en sont souvent la proie. Pour mieux les protéger, la prise de conscience que la pédophilie ne peut être justifiée, ne doit pas se limiter à l’Eglise. C’est la vérité sur notre sexualité que chacun de nous doit apprendre à regarder droit dans les yeux.

2. Culture du zapping
Si la mémoire ancienne de nos contemporains a été réactivée par la démission de l’évêque de Bruges, je n’en dirai pas autant de leur mémoire récente. Sous l’effet de la culture du zapping, de nombreux acteurs sociaux réagissent à l’actualité du jour, sans trop essayer de la mettre en perspective avec ce qui se passa quelques semaines plus tôt. En entendant ces derniers mois nombre d’observateurs regretter que les évêques ne proposent aucune forme concrète d’indemnisation des victimes, je constate en effet que nous vivons dans une société à la mémoire courte. Lorsque les premières affaires d’abus sexuels au sein du clergé ont éclaté à la suite de l’affaire Dutroux, la pression populaire enjoignait les évêques à prendre le problème à bras le corps. C’est ainsi que fut créé le point de contact en 1997. Et comme ce point de contact fut jugé insuffisant, la Commission interdiocésaine vit le jour. L’instrument n’était sans doute pas parfait (personnellement, plutôt que de créer une instance nouvelle, j’aurais fait appel aux tribunaux canoniques déjà existants), mais il permettait aux évêques et responsables religieux de pouvoir se reposer sur un organe compétent qui instruise les dossiers de façon indépendante et les conseille adéquatement sur le suivi à y donner. Jamais cette initiative ne fut conçue comme une concurrence à la justice. Elle se voulait complémentaire, afin d’aider là où les tribunaux s’avéraient impuissants, soit parce que des victimes ne voulaient pas ester en justice, soit et surtout – parce que le délai de prescription les en empêchait. Bien que la mise sur pied de cette Commission n’était qu’une application du droit constitutionnel de l’Eglise catholique à librement organiser sa discipline interne, des voix commencèrent à s’indigner contre cette « justice privée », ce « tribunal parallèle », cette « manœuvre de détournement et d’étouffement ». Mémoire courte – culture du zapping – car ce furent souvent les mêmes voix qui, un peu plus tôt, réclamaient à corps et à cris une initiative ecclésiale.
Quand le choc de la démission de l’évêque de Bruges, suivi de l’appel de l’archevêque aux victimes, fit en sorte que les plaintes affluèrent vers la Commission, celle-ci voulut s’assurer que son champ d’action ne fasse pas concurrence à la souveraineté du pouvoir judiciaire. D’où cette note méthodologique – connue sous le nom de « protocole » – qui précisait le mode de travail à suivre par la Commission Adriaenssens dans ses rapports avec les parquets. Ce qui était supposé déminer les problèmes et n’entachait en rien la souveraineté de la justice, ne fit qu’accroître les suspicions et critiques : « Voilà que la puissance publique bénit ce tribunal de caste ! » entendit-on s’indigner. Survint alors l’opération « Calice » et les perquisitions dans les locaux de la Commission Adriaenssens, dont les enquêteurs emportèrent tous les dossiers. Foudroyée en plein vol par cet acte de défiance publique, la Commission prit la seule décision possible : démissionner. Quand son président publia néanmoins un rapport d’activité, ce furent souvent les mêmes voix que l’on entendait un peu plus tôt railler l’indépendance de ses travaux, qui se drapèrent désormais dans ses conclusions pour s’indigner de plus belle contre l’Eglise. Rares furent ceux qui saluèrent le courage des évêques, qui avaient osé mettre sur pied un instrument capable de pareille opération vérité. Mémoire courte, ici encore, culture du zapping.
Le sabordage de la Commission laissa les évêques une nouvelle fois démunis face aux plaintes judiciairement prescrites. Aujourd’hui, ils en sont momentanément réduits à conseiller à ces victimes de s’adresser à des centres publics d’aide sociale pour l’écoute, ou encore d’introduire une action judiciaire au civil ou devant un tribunal canonique. Vint encore la suggestion de création d’un fonds commun de solidarité. Et ces mêmes voix qui applaudirent la mise à mort de la Commission Adriaenssens – commission qui à juste titre n’avait pas fait du dédommagement pécuniaire sa priorité, mais ne l’excluait nullement là où cela s’avérait nécessaire – de s’indigner de ce que les évêques ne proposent pas, dès maintenant, des mesures plus concrètes. Mémoire courte, toujours, culture du zapping encore. Certains objecteront que les évêques ne sont pas ce qu’on appelle d’exemplaires « managers de crise » : le 13 septembre ils annonçaient une nouvelle initiative et quelques mois plus tard, ils en sont toujours au stade de la réflexion. Ce n’est pas faux. Mais il n’est pas demandé à un évêque d’être manager. Bien d’être pasteur. La Commission Adriaenssens avait justement été créée par ces pasteurs pour les aider à aborder le scandale de la pédophilie de façon plus professionnelle. Initiative qui fut donc brutalement torpillée par les perquisitions, parce que – comme l’écrit Yves Desmet (De Morgen 4 janvier) : « Quelque soit la noblesse de ses intentions, la Commission travaillait au nom de l’Eglise et ne pouvait donc – d’après les enquêteurs – être indépendante ». Méfiance de principe. Un parti-pris qui – quand il se généralise – signe la faillite de toute société démocratique multi-convictionnelle. Heureusement, la Commission parlementaire reconnut – elle – l’indépendance de la Commission Adriaenssens : « Le rapport de cette commission, paru le 10 septembre 2010, a profondément touché notre pays, et fut à l’origine de la commission spéciale de la Chambre: en tout le rapport fait état de 327 plaintes de victimes masculines de 161 plaintes de victimes féminines ». (rapport Commission parlementaire p.100) Oui, je trouve donc qu’ils sont rares ceux qui s’interrogent sur les effets néfastes de cette perquisition dans les locaux de la Commission Adriaenssens. Perquisition fatale et aujourd’hui déclarée illégale. Mémoire courte, culture du zapping….

3. Identité pacifiée
Penser que l’Eglise catholique sortira indemne de l’actuelle tourmente est se faire illusion. Dans les colonnes du Soir du 8 janvier, un éminent professeur et philosophe – nullement rabique – déclarait rêver d’une Belgique tournant le dos aux religions et donc aussi à l’Eglise catholique « empêtrée dans de vilaines affaires de pédophilie ». Je ne partage bien évidemment pas ce rêve et le trouve même teinté d’ingratitude, car il efface d’un trait tous les apports du catholicisme à la société belge. Il n’est cependant pas inscrit dans les astres que le catholicisme se maintiendra in saecula saeculorum dans notre pays. Qu’il me soit cependant permis d’émettre une prophétie différente : Je pense que l’année 2010 restera gravée dans les livres d’histoire comme une date importante dans la métamorphose de l’Eglise de Belgique – évolution enclenchée en 1968. Je m’explique : De 1830 à 1968, à peu près tout le monde dans ce pays appartenait au moins formellement à l’ « Eglise » (99% de baptêmes en 1830 – encore 93% en 1968) et nulle part ailleurs n’avait-on un pilier institutionnel catholique aussi important et florissant. Cet état des choses explique le rôle prépondérant que notre petit pays joua lors du Concile Vatican II (1962-1965). L’Eglise catholique de Belgique était alors au sommet de sa puissance.
L’année 1968 marque le début d’un déclin. Cette année-là, le splitsing de l’Université Catholique de Louvain laisse un épiscopat meurtri et divisé, mai ’68 révèle une jeunesse frondeuse et l’encyclique humanae vitae – de par son évaluation négative de toute contraception artificielle – porte le débat jusque dans le lit conjugal. Tout ceci commença à éroder le quasi-monopole moral que l’Eglise exerçait jusque là sur les consciences. La contestation n’était plus l’apanage des seuls « mécréants » ; elle venait de ses propres rangs. Nombre de fidèles se mirent à adopter des comportements décalés par rapport à la doctrine officielle. La pratique dominicale régulière devint l’exception, le recours à la pilule contraceptive se fit généralisé et les confessionnaux furent recyclés en armoires à balais. Ceci engendra chez le commun une identité catholique – non plus soumise – mais conflictuelle. Aujourd’hui encore, quand le Belge moyen dit « je suis catholique », il se sent généralement obligé d’y ajouter, comme pour s’excuser ou se dédouaner : « mais… ».
Plus d’un demi-siècle après 1968, soit deux générations plus tard, cette évolution sociale est parachevée. L’Eglise catholique de Belgique a perdu son emprise sur les âmes. Mis à part quelques anciens combattants du laïcisme, il n’y a plus grand monde qui la considère encore comme une « puissance » sociale. Tout au plus comme un parasite suranné qui coûte trop cher à la société. En 2010, la démission de l’ancien évêque de Bruges a fait en sorte que l’institution est définitivement tombée de son piédestal. Plus personne ne fonde son identité catholique sur le comportement « exemplaire » de ses chefs. Si le scandale de Bruges a une vertu pédagogique, c’est bien celui d’illustrer avec éclat que prêtres et évêques restent des pécheurs et que d’aucuns peuvent même commettre l’innommable. Dans leur lettre pastorale du 19 mai dernier, les évêques reconnurent même que ce piédestal avait pu faciliter les abus sexuels : « Nous ne voulons pas ignorer, non plus, que la racine de ces abus ne se réduit pas à des individus problématiques. La question des abus dans l’Eglise touche également au mode d’exercice de l’autorité ».
Que reste-t-il donc à l’Eglise catholique de Belgique en 2011 ? L’Essentiel. La personne du Christ, la puissance de son Esprit et la beauté d’une vie inspirée de l’Evangile. C’est ici que la théologie du « peuple de Dieu » – la grande intuition du Concile Vatican II – retrouve une seconde jeunesse. Trop souvent, cette intuition fut interprétée de façon politique et cléricale : Vatican II aurait accordé aux laïcs leur part du « pouvoir » dans l’Eglise et une voix au chapitre quant aux décisions éthiques. C’est donc les questions de partage du pouvoir et la mise en cause de sa morale qui alimentent le débat ecclésial depuis des décennies : ordination d’hommes mariés, place de la femme dans la hiérarchie, contraception, etc. Je ne dis pas que ces questions sont sans importances. Je rappelle simplement qu’elles ne peuvent nous distraire de l’essentiel : La théologie du peuple de Dieu invite à ne pas diviser l’Eglise entre une superstructure-actrice et une base-consommatrice. Elle rappelle que tous les baptisés – du plus humble au Pontife romain – sont appelés à rencontrer spirituellement le Christ et à vivre de son Esprit.
Concrètement ? Il y plus de vingt ans – alors que j’étais encore jeune et séminariste – je fus un beau dimanche matin tiré de mon sommeil par deux braves dames qui sonnaient à la porte de la maison paternelle. Des témoins de Jéhovah. Pour entamer la conversation, alors que je leur ouvrais la porte revêtu d’un peignoir, elles me dirent : « Nous croyons qu’un jour le loup marchera avec l’agneau ». Dans un demi-sommeil comateux, je répondis : « Ca, c’est le livre d’Isaïe ». Stupeur des mes deux apôtres face à ce jeune gars mal rasé leur citant la Bible. Leur réaction fut : « Ah, vous êtes protestant ? » Tout était dit. Pour ces ex-paroissiennes, un jeune qui connaît l’Ecriture ne pouvait pas être catholique. Ici, se situe le défi à relever : permettre à tous les baptisés de rencontrer le Christ par l’annonce de sa parole, par l’apprentissage de la prière et par la découverte de la vie évangélique. En disant cela, je ne plaide pas pour le repli sur une petite Eglise de « purs ». Bien au contraire, je pense que le catholicisme continuera à inspirer une partie de la population belge, parmi laquelle il y aura – fort heureusement – quelques fidèles zélés et convaincus, mais aussi des non-pratiquants, des divorcés-remariés, des homosexuels, des hommes de gauche et de droite, des bons et des mauvais larrons, …. Qu’y aura-t-il de commun entre toutes ces personnes ? Non pas d’abord le fait d’aller ou non à la Messe ou un mode de conduite morale. Mais par-dessus tout, la référence au Christ et à son Evangile. Face à une Eglise qui ne sera plus perçue comme force d’imposition, mais bien comme foyer de proposition, leur identité spirituelle ne sera plus conflictuelle. Ce sera une identité pacifiée. Dans une récente interview, Mgr Léonard avait dit que 2010 n’était pas tant pour lui une annus horribilis qu’une annus mirabilis (Humo, 18 janvier). D’ici quelques années, peut-être se rendra-t-on compte qu’il avait raison. Car nombre de nos compatriotes pourront alors dire « je suis catholique », sans devoir y adjoindre un « mais… ».

Secret professionnel, secret médical, secret de la confession (Forum de Midi)

En radio RTBF – la Première ce lundi 11.04.2011 entre 12h et 13h.
Un échange d’idées et d’informations, en direct, avec Fabienne Vande Meerssche et les acteurs du sujet du jour.

Ecoutez le podcast: http://www.rtbf.be/radio/player/lapremiere?id=929293&e

Les médecins, les avocats, les prêtres peuvent-ils dévoiler les confidences qu’ils ont recueillies dans l’exercice de leur fonction ?
Dans quels cas le secret professionnel – secret médical, secret de la confession – peut-il être levé ?
Dans quels cas doit-il l’être impérativement ?

Nos invités :

Olivier Martins, avocat au barreau de Bruxelles, spécialiste Droit Pénal

Eric de Beukelaer, informateur religieux, responsable du Séminaire St Paul

Jean-Claude Hariga, médecin généraliste

Affaire Vangheluwe : entre vérité et voyeurisme, notre cœur balance

D’après un quotidien flamand, l’ancien évêque de Bruges aurait été hébergé quelques temps à la Nonciature de Belgique. (J’utilise le conditionnel, car je n’ai aucune confirmation de la chose) Ci-dessous le commentaire de Jurek Kuczkiewicz, paru ce samedi sur le site du Soir. Comme souvent, je trouve son analyse intelligente et nuancée. Je peux donc comprendre quand il écrit : « Entre laisser l’évêque pédophile dans la rue – le contraire de la charité – et l’héberger dans un palais diplomatique, peut-être aussi pour le garder « sous contrôle », il est difficile de penser qu’il n’y avait pas une solution plus défendable. Il en reste, une fois de plus, l’impression que l’Eglise n’est jamais regardante quant aux trésors d’ingéniosité déployés pour protéger ses clercs ».
Je pose cependant un autre regard sur l’événement. Il y a quelques jours, je donnais une interview à un journaliste judiciaire de la presse flamande. L’homme m’interrogeait – à l’approche du 1er anniversaire de sa démission – sur les circonstances précises qui ont entouré la chute de l’ancien évêque de Bruges. A la fin, mon intervieweur me demande : « A propos, savez-vous où se trouve Roger Vangheluwe ? » Je lui réponds que je n’en ai aucune idée et que je ne vois pas bien l’intérêt de la question. En effet, tout ce que l’ancien prélat avait à dire à la justice ou à l’Eglise, il l’a fait et chacun sait bien que la presse n’apprendrait rien de plus de sa bouche. Ce journaliste me lance alors avec un petit sourire : « Vous avez raison, mais dans la presse au nord du pays, c’est devenu un sport d’essayer de débusquer l’endroit où il se cache ». Et de fait, depuis son départ de l’abbaye de Westvleteren, une certaine presse a cherché en vain à retrouver la trace de l’ancien prélat. A intervalles régulières, des articles paraissaient où – tel le furet du joli bois – on écrivait qu’il était passé par ici et puis par là. Ici, je m’interroge : Cette traque journalistique fait-elle partie du devoir d’information ou assouvit-elle nos bas instincts de voyeurisme ? Il y a bientôt un an, j’ai été un des acteurs de la démission de l’ancien évêque de Bruges. Comme responsable de presse, je me trouvais au service des évêques de Belgique et du professeur Adriaenssens. Tous étaient unanimes dans leur volonté de communiquer au plus vite l’entière vérité sur cette affaire. Et je crois pouvoir dire que la conférence de presse du 23 avril 2010 – annonçant la démission de l’ancien évêque – n’a pas déçu la presse de ce point de vue-là. Cependant, il ne nous semblait pas nécessaire pour ce faire, d’exhiber le prélat déchu comme un gibier de foire. La justice civile et la discipline de l’Eglise devaient faire leur travail et cela suffisait. Je puis donc comprendre que la Vatican ait veillé à ce que l’ancien évêque de Bruges reçoive un lieu de retraite discret durant les enquêtes judiciaires. Que désormais, Rome juge bon de l’exiler. Ce samedi soir au JT de RTL, Madame Lalieux, Présidente de la Commission parlementaire « abus sexuels », déclarait craindre que cette mesure ne le soustraie à d’éventuelles futures poursuites judiciaires. Je pense qu’elle se trompe. Si convocation il y a, je suis persuadé que Roger Vangheluwe se présentera – comme il l’a fait jusqu’ici. Rien ne doit entraver le travail de la justice dans une démocratie populaire. Cependant, populaire ne veut pas dire populiste. Et là, je pense qu’une certaine traque médiatique de Roger Vangheluwe, flirte avec la justice de rue.

Le commentaire de JUREK KUCZKIEWICZ:

Vangheluwe abrité à l’ambassade du Saint-Siège
L’ex-évêque de Bruges Roger Vangheluwe, écarté pour des faits de pédophilie, a trouvé asile à l’ambassade du Saint-Siège à Woluwe-Saint-Pierre.
Suite à une dénonciation publique et à ses propres aveux, l’ex-évêque de Bruges faisait l’objet d’une enquête du parquet de Bruges sur des abus sexuels qu’il a commis autrefois sur un membre de sa famille alors mineur d’âge. Selon des informations récentes, mais encore non officielles, le procureur de Bruges devrait prochainement établir la prescription couvrant ces faits.
Commentaire Pourquoi est-ce dans les locaux confortables d’un quartier luxueux de Bruxelles, de surcroît protégés par l’immunité diplomatique, que l’Eglise aurait -si l’information est vraie- choisi de faire loger l’évêque pédophile ? La nonciature, approchée par Het Laatste Nieuws, a refusé tout commentaire à ce sujet. On peut postuler que l’hébergement de l’ex-évêque avait constitué un sérieux casse-tête pour l’Eglise : tout établissement ecclésiastique, abbaye, évêché ou autre, aurait fini par être découvert, amenant à l’établissement en question le même opprobre qu’aux moines de Westvleteren. Un logement privé temporaire aurait, quant à lui, obligé Roger Vangheluwe à sortir quotidiennement au risque d’être repéré et reconnu. Sauf à disposer d’une aide ou de services domestiques compliqués voire onéreux à mettre en place. D’un autre côté, l’hébergement du pédophile dans une ambassade confortable et protégée par l’immunité ne manquera pas d’alimenter la controverse et la critique à l’encontre de l’Eglise, et du Vatican, accusés de tolérance coupable à l’égard des pédophiles qui ont sévi pendant tant d’années dans leurs rangs. Entre laisser l’évêque pédophile dans la rue – le contraire de la charité – et l’héberger dans un palais diplomatique, peut-être aussi pour le garder « sous contrôle », il est difficile de penser qu’il n’y avait pas une solution plus défendable. Il en reste, une fois de plus, l’impression que l’Eglise n’est jamais regardante quant aux trésors d’ingéniosité déployés pour protéger ses clercs. Depuis l’éclatement du scandale, Roger Vangheluwe s’était d’abord réfugié à l’abbaye de Westvleteren. Mais, reconnu par des paroissiens alors qu’il y participait à des offices, il avait dû quitter l’abbaye pour un autre endroit moins exposé. Selon nos collègues du Het Laatste Nieuws, il s’agit donc de la nonciature du Saint-Siège à Bruxelles, autrement dit l’ambassade de l’Etat du Vatican dans notre pays. Il est probable que, dès que la décision quant à la prescription des faits sera officialisée par la Justice belge, l’ancien évêque sera envoyé par le Vatican à l’étranger dans un endroit monastique reculé où il mènera une vie de pénitence. Formellement, la justice vaticane doit encore, comme l’avait annoncé il y a quelques mois son porte-parole Federico Lombardi, prononcer un jugement canonique à l’endroit de Roger Vangheluwe.

Waarom aartsbisschop Léonard geen taart verdient WALTER PAULI (De Morgen p.12)

Waarom Walter Pauli volle respect verdient, wanneer hij durft schrijven :

Jolijt alom, want de vermaledijde aartsbisschop Léonard kreeg zowaar viér taarten in zijn gezicht. ‘s Lands laatste anarchisten leven in de overtuiging dat ze de nieuwe Robin Hoods zijn. En in die bevinding werden ze versterkt door de gretige en bepaald niet onsympathieke media-coverage van hun heldendaad. Het enige medelijden met de prelaat kwam van katholieke vrouwtjes die machteloos « mais enfin » jammerden toen monseigneur ingesmeerd werd met zijn eerste vlaai. De rest van het land keek, en grijnsde.
Op het eerste zicht lijkt het natuurlijk ‘maar’ een streek van sympathieke schelmen. Dat is nochtans niet zo. Wat grappig lijkt, is eigenlijk barbaars. Het is een daad die ingaat tegen een paar afspraken die sinds de Verlichting tot de beschaving horen. Eén: wij nemen het recht niet meer in eigen handen. Twee: er is geen publieke schandpaal meer voor mensen met afwijkende en volstrekt ongeschikt geachte inzichten en uitspraken over seksualiteit en moraliteit.
Het is geen kwestie van voor of tegen Léonard. Wie tegen de aartsbisschop is, beroept er zich doorgaans toch op dat de man niets begrepen heeft van een moderne, tolerante samenleving? Welaan, dat men hem dan met argumenten bekampt, eventueel (omdat hij zou aanzetten tot discriminatie) met gerechtelijke stappen. Maar niet nooit door hem naar eigen goeddunken fysiek te belagen.
En, met alle respect, veel dapperheid is er niet meer nodig voor het entarteren van Léonard, een man die al maanden weggehoond wordt door 80 procent van de publieke opinie. Dat bewijst ook de reactie van de goegemeente op die ‘aanslag’. Niemand roept schande tegen de actievoerders. Men staat erbij, kijkt ernaar. Zwijgt, of grijnst.
Om eens echt te provoceren: er zijn parallellen tussen de gestenigde vrouwen uit Afghanistan en Léonard. Ook de vrouwen worden aangepakt door een paar hardhandige ‘durvers’ die overtuigd zijn van hun morele superioriteit. Die zich ondanks hun daden veilig weten. Juist omdat ze weten dat het publiek geen kik geeft om het slachtoffer te beschermen. Immers, ze pikken er juist die uit die doen of zeggen wat afwijkt van de geldende norm.
Mijn maag draait er van om.

Monarchie et République : Tintin ou Largo Winch

Qu’elle est la portée exacte des actuels remous politico-médiatiques autour du fils cadet du Roi des Belges ? Sont-ils la preuve que la monarchie constitutionnelle est un système suranné ? La plupart des démocrates se sentent républicains quand ils vivent en république et monarchistes quand ils habitent un royaume. Autant dire que la différence entre les deux régimes constitutionnels est vécue paisiblement par la majorité de nos concitoyens. Ceci étant dit, le choix entre les deux systèmes – monarchie constitutionnelle ou république – n’est pas totalement anodin. La monarchie place l’attachement émotionnel à une famille au sommet de l’Etat, là où la république privilégie l’arithmétique électorale et donc le domaine de la raison.
Selon moi, les deux archétypes de ces régimes sont, d’une part la monarchie britannique et de l’autre, la république américaine. Au Royaume-Uni, toute la pompe officielle va à la famille royale, qui pourtant n’exerce pas la moindre once de pouvoir politique. Son rayonnement est du domaine de l’émotion. Le mariage de William et Kate sera un peu celui de tant d’autres jeunes britanniques qui osent, aujourd’hui encore, l’aventure du couple; tout comme le douloureux divorce de Charles et Diana fut vécu comme la vitrine publique du naufrage de tant d’autres mariages. Par équilibre, le vrai pouvoir politique britannique est – quant à lui – rabaissé symboliquement : la demeure du premier-ministre ressemble à une vulgaire maison de notaire et le chef du gouvernement n’a même pas le droit de s’asseoir quand le souverain fait son discours au parlement. Tout autre est la situation aux Etats-Unis : la sobre rationalité électorale joue jusqu’au sommet de l’Etat. Les élections présidentielles sont très dures, mais désignent un vrai « chef ». Ce dernier n’a d’ailleurs droit qu’à deux mandats, afin d’éviter toute forme de « dictature à vie ». Le chef est reconnu par tous, mais reste l’homme d’un seul camp : demandez à de nombreux républicains ce qu’ils pensent de leur président démocrate et vous aurez souvent la même réponse que celle de nombreux démocrates, alors que le président était républicain…
Bref, choisir entre la monarchie constitutionnelle et la république, c’est un peu comme choisir entre le monde de Tintin et celui de Largo Winch. Tintin, c’est « la ligne claire » : un dessin simple et des personnages typés. Tout lecteur sait bien que l’histoire contée n’est pas « réaliste » et pourtant il se dégage de l’ensemble une émotion qui fait toucher au « plus-que-réel ». Il en va de même en monarchie : tout le monde sait bien que les Windsor ou les Saxe-Cobourg sont des gens comme les autres, mais le principe monarchique investit une dynastie du poids émotionnel de représenter toute une nation. La république, elle, c’est plutôt le monde de Largo Winch : un univers réaliste qui se calque froidement sur la réalité telle qu’elle est. De même, la république reproduit l’arène politique jusqu’au plus haut sommets de l’Etat. Un des deux systèmes est-il supérieur à l’autre? Tout est une question de choix et de préférence subjective… Quand le couple impérial japonais s’incline devant les victimes du Tsunami, chacun sent bien confusément que c’est tout le Japon qui s’agenouille devant la détresse de ses concitoyens. Essayez donc de symboliser cela avec autant de force en république. Je vous donne à parier une boîte de biscuit « choco-prince de Beukelaer » que vous n’y arriverez pas. Ceci étant dit, comme tout système, la monarchie constitutionnelle a son talon d’Achille : un président peut tomber sans que le pays vacille, mais quand c’est la famille royale qui est mise en cause, la crise de régime n’est jamais loin. On n’en est pas là avec l’actualité du jour, mais ceci explique qu’une affaire politiquement mineure, prenne soudainement une telle place sur la scène politico-médiatique. Parce qu’ils touchent à l’émotion, les symboles sont puissants mais aussi explosifs. Voilà pourquoi je porte la famille royale de mon pays dans la prière, tout comme je prie pour nos politiciens. Les premiers sont là par naissance et les second par choix du peuple. Mais tous sont au service du bien commun.

Super-salaires : et pendant ce temps-là, à Versailles…

Le fait est assez rare pour être souligné : les édito’s du Soir et de La Libre (lire ci-dessous) traitaient ce matin du même sujet – les super-salaires de nos super-patrons. La question mérite réflexion, car elle touche de près aux trois grandes dimensions qui structurent la vie en société : l’avoir (dimension économique), le pouvoir (dimension politique) et le valoir (dimension morale).
L’avoir, tout d’abord… La première raison qui me fait penser que des super-salaires ne sont pas opportuns, est bassement économique. Il est normal qu’un patron – surtout compétent – soit mieux, voire bien mieux, payé que ses employés. Mais quand le salaire du « boss » n’a plus rien de commun avec celui de ses collaborateurs, alors un fossé psychologique se creuse et celui-ci est fatal pour – employons un terme bien marketing – le « team spirit ». Comment, en effet, sentir qu’on fait partie de la même entreprise, quand il y a d’une part les demi-dieux qui ne circulent qu’en hélicoptère et passent leurs vacances sur leur super-yacht et puis, de l’autre, la masse des gens normaux qui ont de bêtes petits soucis de gens normaux ? A l’armée, les troupes d’élites sont celles dont les officiers sont proches de leurs hommes. Dans l’Eglise, les diocèses les plus dynamiques ont à leur tête un évêque qui ne s’isole pas des fidèles, mais a un coeur de pasteur. Il en va de même dans le monde de l’entreprise. J’ai quelques grands patrons parmi mes amis et connaissances. Ceux que j’apprécie sont des hommes d’une grande simplicité et humanité, qui méritent la reconnaissance sociale. Mais je sais également que certains « derniers étages » des sièges sociaux de nos grandes entreprises reflètent la mégalomanie de leurs occupants et que ceci explique pour part les mauvais résultats financiers et, surtout, la mauvaise ambiance qui règne dans les murs. Je suis sûr que les mouvements sociaux dans une entreprise seraient diminués de moitié si, quand un plan d’austérité est annoncé, le patron montrait l’exemple en réduisant son salaire en proportion de l’effort demandé.
Le pouvoir, ensuite… La deuxième raison qui me fait penser que les super-salaires ne sont pas opportuns, est d’ordre politique. La démocratie se fonde sur une forme tacite de « contrat social ». Quand un nombre important de citoyens ne se reconnaît plus dans l’élite sociale qui la dirige, alors toutes les dérives sont possibles. En 1789, Versailles ne pesait que pour 4% dans le budget de la France… Mais le symbole de ce palais de rêve où une caste se réfugiait pendant que le peuple crevait de faim, fut un puissant moteur de colère populaire et donc de violence révolutionnaire. Tout autre est l’image d’une famille royale britannique et de leur premier-ministre qui, au cœur de l’enfer du blitz, vécurent les bombes et le rationnement au milieu de leur peuple. Le comportement de ces chefs, tout à la fois solidaires et courageux, explique pour une bonne part la force d’âme qui galvanisa la résistance anglo-saxonne dans un Londres en flammes. Les temps économiques qui s’annoncent sont sombres et n’ont plus rien à voir avec les trente glorieuses… Je vous le demande : De quel modèle nos capitaines d’industrie s’inspireront-ils pour piloter notre économie dans la tourmente ? Versailles-fin-18e ou Londres-sous-le-blitz ?
Le valoir, enfin… La dernière raison qui me fait penser que les super-salaires ne sont pas opportuns, est d’ordre « bêtement » morale. Celui dont le salaire mensuel passe de 1000 euro net à 2000 euro net, voit sa vie se transformer. Celui dont la rémunération mensuelle – boni oblige – passe de 100 000 euro à 200 000 euro ne sent aucune différence. Une société qui ne comprend pas qu’il y a là un souci… a des soucis à se faire. Une riche héritière déclarait récemment qu’il valait mieux une heure de honte par jour qu’une vie entière dans la pauvreté. Cela a le mérite de la franchise, mais oublie qu’entre la honte et la pauvreté, il existe une troisième voie : celle de la solidarité, voire – osons le gros mot – de la générosité.

Edito du Soir : Henry Ford, JP Morgan, réveillez-vous ! par PIERRE-HENRI THOMAS

Avec le printemps revient la floraison des rapports des sociétés cotées en Bourse. Ils contiennent le dernier état des rémunérations des grands patrons. Et évidemment, ces chiffres font débat. Au lendemain de la crise, alors que l’économie est encore largement sonnée et que les finances publiques sont dévastées, les rémunérations des top managers ne semblent pas être affectées. Et cela suscite un malaise certain : mardi, le commissaire européen Michel Barnier estimait ces bonus « inexplicables et injustifiables ». Et ce week-end, le nouveau directeur de la Banque nationale, Luc Coene, avait affirmé que tant qu’une banque est aidée par l’Etat, ses dirigeants ne devraient pas toucher de bonus. Ce qui choque n’est pas l’existence de ce qu’on appelle souvent à tort les « bonus », et qui sont en réalité la part variable du salaire, liée à la performance. Ce salaire variable que touchent les patrons, mais aussi les cadres moyens ou les commerciaux, n’a pas grand-chose à voir avec les bonus faramineux des traders. Ces derniers prennent un pourcentage des gains qu’ils réalisent sur des opérations risquées qu’ils effectuent avec l’argent des autres. Ces bonus-là s’apparentent, quand ils sont énormes, à une forme de prédation. Non, ce qui choque, c’est, tout simplement, la hauteur du salaire global (salaire fixe, variable, pension, stock-options…) que touche un club restreint de grands managers. Aux Etats-Unis et en Europe jusque dans les années 80, un chef d’entreprise, même à la tête d’une multinationale, ne gagnait pas plus de 20 à 40 fois le salaire de sa secrétaire. C’était d’ailleurs la norme que s’étaient fixée des figures emblématiques du capitalisme. Henry Ford et JP Morgan estimaient de 1 à 40 l’écart salarial maximal admissible. Et puis, le système a dérapé. Aujourd’hui, un grand patron belge ou français gagne en moyenne 2 à 3 millions d’euros par an, soit cent à cent cinquante fois plus que son employé le plus modeste. On a beau chercher, on ne voit pas ce qui pourrait justifier une telle disproportion. Et puisqu’en ces matières, l’autorégulation n’a pas l’air de fonctionner, il faudra bien, d’une manière ou d’une autre, qu’une loi vienne fixer des limites à l’avidité.

Edito La Libre : Indécent par YVES CAVALIER

Ne tournons pas autour
du pot : le versement
d’un bonus de
600 000 euros à Pierre Mariani,
le CEO de Dexia est
parfaitement indécent. Que
cela s’ajoute à une rémunération
fixe d’1 million d’euros et
à 200 000 euros de “prime de
fonction”, ne fait qu’ajouter
au sentiment d’iniquité. Des
voix se sont élevées ici et
ailleurs en Europe pour dénoncer
ces pratiques, en
particulier dans un secteur
qui a été sauvé de la noyade
par l’argent du contribuable.
Ce contribuable auquel on
demande par ailleurs d’envisager
de revoir le principe de
l’indexation automatique de
son salaire. Comment peut­on
sereinement poursuivre un
débat sur l’impérieuse nécessité
de voir chacun participer
à l’effort d’assainissement du
pays lorsque les patrons de
certaines banques s’en mettent
plein les poches ? Certaines
en effet car toutes n’ont
pas eu cette témérité. On
pense à ING notamment, la
banque néerlandaise qui a
respecté les recommandations
du gouvernement local
en la matière. Le plus cocasse
dans cette affaire, c’est qu’à la
sortie du rapport annuel qui
publie ces chiffres, Dexia s’est
fendue d’un communiqué,
une sorte de justificatif.
Comme pour anticiper cette
indignation, la banque explique
que c’est 200 000 euros
de moins que l’année précédente,
que c’est inférieur à la
“médiane” du secteur, qu’ils
seront versés par tranches qui
pourraient être rabotées au
cas où les résultats ne suivraient
pas… Et dire que tout
cela est avalisé par le président
du conseil d’administration
qui n’est autre que JeanLuc
Dehaene, cet ex­Premier
ministre qui nous a donné des
leçons d’austérité…

Mgr Léonard entarté : le grand courage citoyen…

Le débat « Concilier science et foi : est-ce bien raisonnable ? » de hier soir méritait le détour, comme le soulignait l’assistance fournie. Face à l’archevêque se trouvait le professeur Jean Bricmont, auquel il faut reconnaître le courage de ses opinions. Loin de faire partie des nombreux « agnostiques anonymes », le physicien de l’UCL revendique et assume un athéisme paisible et radical. C’est donc l’occasion choisie par des ( ?) étudiants pour entarter Mgr Léonard. Raison de ce vengeur « attentat pâtissier » ? « Franchement, pour tous les homosexuels qui n’osent pas le dire à leurs parents, pour toutes les jeunes filles qui veulent avorter, il le méritait amplement », a déclaré un des entarteurs. Edifiante justification. Comme prêtre, je pense avoir recueilli les confidences de pas mal de jeunes homosexuel(le)s ou filles vivant une grossesse non-désirée. Comme André-Joseph Léonard, jamais je n’ai transigé sur mes convictions, mais toujours dans le respect intégral des personnes, quelques soient leurs choix. En effet, le premier commandement du Christ est celui de l’amour inconditionnel, sans oublier aussi la phrase que le Seigneur lança aux bienpensants de son époque: « que celui d’entre vous qui est sans péché, jette la première pierre » (Jean 8,7). Certains ou certaines des jeunes ainsi rencontrés, vivaient les choses sereinement. D’autres beaucoup moins : blocage dans la famille, peur de l’environnement, questions de conscience,… Souvent, un peu de tout à la fois. Jamais pourtant, je ne perçus que la cause profonde de leur mal-être était… Mgr Léonard. Mais sans doute est-ce parce que comme prêtre « je ne suis pas assez en phase avec mon époque » (soupir). Plus sérieusement, autant j’avais prévenu l’archevêque – alors que j’étais encore en fonction comme porte-parole – qu’il se ferait un jour entarter… ce qu’il prit avec bonhommie ; autant je suis consterné d’entendre ces mêmes « justiciers » déclarer « qu’il pouvait à tout moment être à nouveau la cible de tartes à la crème ». Cela me fait penser à ces gamins de rue qui sonnent aux portes et puis s’enfuient. Une fois, ça va, mais à la longue… Evidemment, si à chaque reprise, pareil non-événement – signe d’un très grand courage citoyen – va jusqu’à faire la première page d’un de nos principaux quotidiens, il y a, comme qui dirait, une petite prime d’encouragement. La presse flamande s’était ainsi jadis distinguée en soulignant, l’une après l’autre, les nombreuses « frasques citoyennes » de Jean-Pierre Van Rossem. Puis, les rédactions décidèrent que cela devenait ridicule et que le meilleur service à rendre à l’information, était de ne plus en parler. En quelques semaines, Van Rossem disparut des écrans. Une même sagesse va-t-elle ici prévaloir ?

Blog : premier bilan/een eerste bilan

Blog : premier bilan
Ce blog a été ouvert le 11 mars. Depuis, j’ai reçu 1467 visites et 2383 pages ont été vues. La grande majorité de visiteurs (57%) viennent par Facebook. Près de 1200 visites viennent de Belgique, 153 de France ; suivent ensuite l’Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l’Italie et même les Etats-Unis. Merci à tous pour votre intérêt. N’hésitez pas à laisser un commentaire sur ce blog. Jusqu’au mardi 5 avril, je serai à l’étranger. Mes « posts » ne reprendront qu’à ce moment-là. Ce dimanche 3 avril, je serai uni spirituellement à l’archevêché de Malines-Bruxelles et prierai tout particulièrement pour les 3 nouveaux évêques auxiliaires qui seront ordonnés à son service.
Une dernière pensée pour la route : Il est frappant de voir dans nos médias le conflit au sein de l’administration communale de Charleroi prendre le pas sur la situation incontrôlée à Fukushima. Pourquoi ? Le premier événement est proche et palpable. Le second est éloigné et invisible. Comme les conséquences de la radioactivité font fait peur, sans doute essaie-t-on aussi inconsciemment de tenir ce drame à distance, ou plutôt… nous apprenons à vivre avec lui. Un peu, comme on apprend à vivre avec une maladie grave.

Blog : een eerste bilan
Deze blog is op 11 maart van start gegaan. Tot nu toe kreeg ik 1467 bezoeken en 2383 pagina’s werden ingekeken. De meeste bezoekers vonden hun weg naar de blog via Facebook (57%). Ongeveer 1200 bezoekers komen uit België, 153 uit Frankrijk ; volgen dan Duitsland, het Verenigd Koningrijk, Nederland, Italië en zelfs de Verenigde Staten. Dank aan allen voor jullie interesse. Aarzel niet om op deze blog een commentaar achter te laten. Tem. dinsdag 5 april zal ik in het buitenland zijn. Pas daarna komen er nieuwe ‘posts’. Zondag a.s. zal ik ook heel speciaal bidden voor het aartsbisdom Mechelen Brussel en de drie hulpbisschoppen die er gewijd zullen zijn.
Een laatste bedenking voor de onderbreking: Ik vond het merkwaardig dat de Franstalige media deze morgen meer aandacht besteedden aan het gekibbel bij de gemeente Charleroi dan aan Fukushima. Reden daartoe? De eerste gebeurtenis is ons naderbij en tevens tastbaar. De tweede is verwijderd en onzichtbaar. Aangezien mensen bang zijn voor de gevolgen van radioactiviteit, proberen ze waarschijnlijk ook onbewust deze ramp mentaal op een afstand te houden. Of anders gezegd, ze proberen ermee te leven, een beetje zoals me leert leven met een zware ziekte.

Mardi soir 29/03 en TV: « Mystères de la foi » Dans les yeux d’Olivier, France 2, 22h05.

J’ai pu regarder la seconde moitié. C’est une émission remarquable. Le parti-pris du journaliste – la bienveillance, plutôt que la critique – donne à l’ensemble une réelle fraicheur et aussi une profondeur: entre le téléspectateur et le sujet, il n’y a pas le filtre de l’écriture rédactionnelle. EdB

CHARLINE VANHOENACKER (le Soir 29/03 p.39)

Le look d’Olivier dépote
dans le paysage audiovisuel
généraliste. Type
« mec à la cool », le réalisateur
Olivier Delacroix se met en scène
dans son documentaire dans la
mesure où il apparaît à l’écran et,
oui, son film est subjectif, comme
l’indique le titre : Dans les yeux
d’Olivier. Nous sommes donc en
droit d’attendre de lui une approche
originale. Elle est surtout
très humaine. (…)
Le premier volet de cette série
est consacré aux « Mystères de la
foi ». Olivier Delacroix a été frappé
par le pardon accordé par des
parents à l’assassin de leur fils,
Martin, tué de sang-froid. Ces parents
expliquent que c’est Dieu, à
travers eux, qui a pardonné.
« Les yeux d’Olivier » suivent ensuite
un jeune séminariste à la
veille de son ordination, ou le
quotidien d’une congrégation de
soeurs moniales. ■

Secret professionnel des prêtres et secret de confession : réalité et phantasme/Beroepsgeheim en biechtgeheim : realiteit en verbeelding

Secret professionnel des prêtres et secret de confession : réalité et phantasme.

Dans la presse sont apparus ce matin différents articles concernant le secret professionnel qui lie les prêtres et le secret de confession. La confusion est grande et le « comique » veut que dans une société où mêmes de nombreux catholiques ne se confessent plus (lire article du sénateur Rik Torfs ci-dessous), certains font du « secret de la confession » – inspirés en cela par les films hollywoodiens – le sujet du jour dans la lutte contre les abus sexuels sur mineurs. Mais par-delà les phantasmes, quelle est la réalité ? En fait, dans 99% des cas, le prêtre était tenu au même type de secret qu’un médecin, un avocat, un psychiatre : ne pas dévoiler les confidences, sauf en des cas limites (danger pour tiers) qui sont alors laissés à son appréciation. Ainsi, si quelqu’un confie à un prêtre des difficultés de couple, il est normal que ce dernier n’aille pas tout raconter au conjoint ou aux enfants de l’intéressé. Autre chose est si cette confidence met en péril des tiers (par exemple des enfants abusés sexuellement). Tout comme le médecin ou le psychiatre, le prêtre peut alors choisir de se libérer de son devoir de discrétion sous une forme ou une autre. Il ne peut en tout cas laisser sans assistance les personnes en détresse. Reste la confession, qui en Belgique concerne un petit pourcent des confidences faites à un prêtre et ceci, dans le cadre strict du sacrement du pardon. De par son caractère sacramentel, ce secret est absolu. Cependant, ceci ne signifie pas le pardon à bon marché. Ainsi, un pénitent qui viendrait s’accuser d’abus sexuels (chose rare et que je n’ai jamais rencontrée en 20 années de prêtrise), le pénitent ne recevrait l’absolution que si il va d’abord se remettre entre les mains de la justice (une confession valide implique le remords et le remords implique un début la réparation). Ceci étant dit, sans secret absolu, pas de confession possible… Tout prêtre que l’on voudrait forcer à briser cela, devrait répondre « non possumus » en conscience. D’ailleurs, si la confession se fait dans un confessionnal, l’anonymat du pénitent est garanti. S’il frappe l’imagination populaire, le secret de confession ne concerne donc que très marginalement le combat contre les abus sexuels sur mineurs.

Beroepsgeheim en biechtgeheim : realiteit en verbeelding.

In de pers verschenen er deze morgen verschillende artikels omtrent het beroepsgeheim van de priester en het biechtgeheim. De verwarring is groot en het ’komische’ is, dat in een maatschappij waar zelfs vele katholieken aan de biechtstoel verzaken (cfr. artikel senator Rik Torfs, hieronder), sommigen – mede onder invloed door de Hollywood filmcultuur – van het biechtgeheim ‘de’ topic van de dag maken, om kindermisbruik te bestrijden. Maar ver van de verbeelding, wat is de realiteit ? In feite is in 99% van de gevallen een priester gebonden door hetzelfde beroepsgeheim als een arts, een advocaat, of een psychiater : Wat hem wordt toevertrouwd, mag hij niet voortvertellen, behalve in grensgevallen (gevaar voor derden), waar hij dan ruimte krijgt om eventueel toch iemand te verwittigen. Als iemand bv. huwelijksproblemen aan een priester toevertrouwt, is het maar normaal dat hij er niet mee uitpakt voor levenspartner en kinderen van deze persoon. Iets anders is, als er gevaar bestaat voor derden (zoals misbruikte kinderen). Dan kan de priester, zoals de dokter of de psychiater, beslissen om op één of andere wijze afstand te nemen van zijn zwijgplicht. Hij mag in elk geval, zij die in gevaar verkeren, niet zonder een vorm van bijstand laten. Blijft er nog alleen maar het geval van de biecht, die in België maar een heel klein percentage inhoudt van wat men een priester toevertrouwt en dit in het strikte kader van de sacramentele biecht. Omwille van het sacrament is hier de zwijgplicht absoluut. Dit betekent wel niet dat er goedkoop vergiffenis wordt geschonken. Zou een zondaar zich van kindermisbruik komen beschuldigen (wat uiterst zelden voorkomt en ik, in elk geval, in 20 jaren priesterschap nooit ben tegengekomen), zou deze de absolutie pas krijgen als hij zich eerst gaat opgeven bij de politie (geldig biechten houdt berouw met zich mee, en berouw betekent ‘herstel’). Dit gezegd zijnde, is biecht niet mogelijk zonder absolute geheimhouding van wat er gebiecht werd…. Elke priester die men zou willen forceren dit te doorbreken, zou in geweten ‘non possumus’ moeten antwoorden. Trouwens, de biecht gebeurt meestal in een biechtstoel, waardoor het anonymaat van de biechteling gegarandeerd wordt. Al spreekt deze tot de verbeelding, dan nog heeft het biechtgeheim dus maar heel anekdotisch te maken met de strijd tegen kindermisbruik

Behandel de biechtvader als een professional (De Morgen 29/03 p.23)
Rik Torfs is professor kerkelijk recht aan de KU Leuven en CD&V-politicus.

In de lente van 1970 biechtte ik voor het laatst. Niet dat ik daarna met zondigen ben gestopt. Maar het sacrament van de biecht zoals dat door de kerk is georganiseerd, met een persoonlijke belijdenis tegenover een priester, is nooit mijn ding geweest. Ik kon in de godsdienstleraar of de collegedirecteur onvoldoende een vertegenwoordiger van God zien. En ik ben, mea culpa, geen meester in het belijden van mijn fouten. Toch niet zomaar in een biechtstoel, van aangezicht tot aangezicht, heel direct, waarbij je een kat een kat noemt. Edoch, het is niet omdat ikzelf mijn zonden verzwijg, dat het biechtgeheim onbelangrijk zou zijn. Terecht vindt de kerk dat het nooit mag worden prijsgegeven en dat de priester die het rechtstreeks schendt, van rechtswege wordt geëxcommuniceerd (canon 1388 §1 van het kerkelijk wetboek).
Waarom is het biechtgeheim belangrijk? Wie biecht, verkrijgt daardoor mentaal asiel. Feiten die het daglicht niet mogen zien, komen naar boven in een veilige omgeving die totale geheimhouding garandeert. Dat biedt de delinquent een unieke mogelijkheid om een medemens te zeggen wat anders voor altijd verborgen zou blijven. De kans dat een mens het volstrekt ongehoorde wat hij heeft gedaan met iemand anders kan delen, betekent bevrijding uit een gruwelijk isolement. Daarbij is de vergiffenis van de zonde niet het belangrijkste, maar de mogelijkheid om het onzegbare uit te spreken. Maar niet alleen voor de dader biedt de biecht mogelijkheden. Ook voor het slachtoffer rijst er hoop. Want de biechtvader heeft de plicht er de misdadiger toe aan te zetten zichzelf aan te geven en het berokkende kwaad in de mate van het mogelijke te herstellen. Er is geen vergiffenis zonder spijt. En er is geen spijt zonder de oprechte poging om het aangerichte kwaad te herstellen. Zichzelf aangeven kan daar een element van zijn.
Meteen wordt duidelijk hoe onzinnig de meldingsplicht is die sommige politici aan biechtvaders willen opleggen. Niemand is zo gek om zijn zonden te belijden wanneer hij weet dat hij verklikt kan worden. De seksuele delinquent zal dus de biechtstoel vermijden. Er bestaat immers altijd onzekerheid over wat de priester gaat doen. Zwijgen? Spreken? Ook de priester zelf komt in een benarde positie terecht. Als hij aan zijn meldingsplicht verzaakt, wordt hij door de profane wet gestraft. Als hij daarentegen het biechtgeheim schendt, zorgt het kerkelijk recht ervoor dat hij wordt geëxcommuniceerd. De biechtvader kan dus kiezen tussen twee straffen, maar gestraft wordt hij in ieder geval. De kans is groot dat hij, vanuit zijn roeping, voor de profane straf kiest en bereid zal zijn om in de gevangenis te gaan zitten voor zijn overtuiging. Dat siert hem. Er zijn nu eenmaal wetten die om de overtreding ervan vragen. Racistische wetten in de Verenigde Staten werden neergehaald dankzij de ongehoorzaamheid van dappere burgers die hun geweten lieten primeren op een onaanvaardbare regel.
Maar er is meer. Politici die vandaag de meldingsplicht willen laten primeren op het biechtgeheim, koesteren uiteraard niet de illusie dat daardoor nieuwe misdrijven aan het licht zullen komen. In ons land wordt immers nauwelijks nog gebiecht. Het is de voorstanders van de opheffing van het biechtgeheim veeleer te doen om een statement. Zij willen duidelijk maken dat priesters geen professionals zijn, anders dan artsen, psychologen of andere hulpverleners. Dat is een ideologische optie die laatdunkendheid verraadt tegenover het religieuze. Sommige mensen met moeilijkheden zullen soelaas zoeken bij medici en paramedici. Zij moeten worden beschermd. Anderen doen misschien liever een beroep op een priester. Ook zij verdienen beschutting. In onze doldraaiende wereld is er nood aan plekken die ruimte bieden voor mentaal asiel. Het is aan de individuele mens om de keuze te maken, niet aan politici met een zware ideologische agenda.