Dépénalisation de l’avortement…

Ainsi donc, tous les partis politiques francophones (ou presque) et une majorité de la population belge semblent plus ou moins acquis au fait qu’il faille retirer l’avortement du code pénal. Une campagne orchestrée depuis des années, en vue de gagner la bataille culturelle et puis la bataille politique (selon les termes du penseur Antonio Gramsci), porte ses fruits. Je pense qu’il leur faudra attendre un peu encore pour triompher, car le gouvernement fédéral belge ne veut pas entendre parler de majorité alternative. Mais à terme…
Pourtant, vous pouvez requalifier les choses comme vous voulez, l’avortement restera une transgression et donc une souffrance. Pourquoi? Parce que c’est une décision qui implique, non seulement la femme, mais aussi la vie à naître. Penser que l’effacer du code pénal changera la donne et limitera la souffrance (comme j’ai entendu répéter sur nos antennes ces dernières semaines), c’est vivre dans le déni. Simone Veil elle-même le rappela en 1974 à l’assemblée nationale française: «  Je voudrais tout d’abord vous faire partager une conviction de femme – je m’excuse de le faire devant cette Assemblée presque exclusivement composée d’hommes : aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l’avortement. Il suffit d’écouter les femmes. C’est toujours un drame et cela restera toujours un drame.. C’est pourquoi, si le projet qui vous est présenté tient compte de la situation de fait existante, s’il admet la possibilité d’une interruption de grossesse, c’est pour la contrôler et, autant que possible, en dissuader la femme. » 
Quitte à être davantage encore ringardisée, l’Eglise catholique continuera à lutter pour la dignité de la vie à naître et la défense de la fin de vie (va-t-on aussi passer d’une « dépénalisation de l’euthanasie » à un « droit à l’euthanasie » ?) Ceci, sans culpabiliser, ni rejeter qui que ce soit. (« Ne juge pas et tu ne seras pas jugé » a enseigné le Christ.) 
L’Eglise poursuit son plaidoyer, au nom de sa conception de la vie humaine. Cette même conception qui fait qu’elle invite à voir dans les réfugiés qui frappent à notre porte, autre chose que des illégaux. Ceux qui applaudissent son premier combat, sont souvent mal à l’aise avec le second… et vice versa. D’où le régulier sentiment que la voix catholique est une « voix qui crie dans le désert ».  Mais n’est-ce pas justement là, la place de l’Eglise? Le lieu d’où elle peut être authentiquement « intempestive », selon le souhait du président de la république française? Le fait que l’Eglise s’exprime sur un sujet, sans plus guère de relais dans le monde politique, peut être aussi vu comme une chance. En effet, cela souligne que cette voix catholique ne cherche pas le pouvoir (si c’était le cas, c’est plutôt raté depuis un demi-siècle de recul politique), mais bien à faire un appel aux consciences.   

32 réflexions sur « Dépénalisation de l’avortement… »

  1. Mon Révérend Père ,
    En novembre j’ai été opéré d’un cancer orusophage-estomac a 62 ans. Catholique et défavorable à l’avortement et l’euthanasie, j’ai pourtant, en janvier de cette année, suite à des complications post opératoires et vu la souffrance surtout morales (plus de sommeil jour et nuit- perte de poids importante , je sombrais petit à petit. J’ai appelé Dieu au secours plusieurs fois en pleurant, j’ai crié et j’ai supplié la vierge Marie, en vain! J’ai alors demandé l’euthanasie à mes enfants (27 et 26) alors que je suis contre. J’etais Contre lorsque j’allais bien (jusqu’a 62 ans) mais après mon expérience je ne sais plus… Dieu a fini par s’occuper de moi et mon état s’est amélioré brusquement, phase par phase. Je quitte l’hopital Le 27 avril prochain.
    Je voulais vous exprimer mon impression et je ne voudrais jamais devoir prendre une décision de ce genre qui s’il ne faut pas la condamner doit être sévèrement encadrée pour ne pas apporter une cause supplémentaire à la destruction sociale et humaine des chretiens.

  2. Quel beau témoignage ! Merci .
    Je me hasarderai à vous comparer à ces bébés dont la naissance avait été hypothéquée par le chemin de croix du doute chez la maman – ou et – le papa….. bébés qui, par la suite firent le bonheur de leur maman , de leur papa, de leur entourage …..
    Que ce supplément de vie vous soit une renaissance. Que chaque jour de gagné soit comme un cadeau ( je sais de quoi je parle , sans traitement, je ne serais plus de ce monde ) . Mes prières vous accompagnent.

    Nous, chrétiens avons une morale basée sur l’ amour du prochain. Nous ne commettons pas d’ adultère parce que nous aimons ( ou essayons d’aimer avec l’aide de Dieu ), notre conjoint. Nous n’interrompons pas la grossesse parceque nous aimons ( ou essayons d’aimer avec l’ aide de Dieu ), l’ enfant à naître et sa maman . Nous accueillons l’ étranger parceque nous aimons ( ou essayons d’aimer ) celui qui est dans une situation precaire etc … à l’infini comme l’ Amour de Dieu est infini.
    C’est ce qui rend le dialogue si difficile .
    Courage, Constance. Nous prions pour toi.

  3. Sortir l’avortement du code pénal suppose, si j’ai bien compris, que les conditions mises, au départ, n’existeraient plus et donc plus le terme de 12 semaines (déjà discutable). Tout cela m’amène à penser que, ai cela passe, nous irons vers une société de plus en plus déshumanisée ou les plus faibles, les enfants à naître, les handicapés et les malades pourraient bien n’être plus qu’une « gêne » et un poids financier insupportable. J’ai entendu, par rapport à mon propre enfant handicapé (aujourd’hui décédé) que « ça coûtait cher à la société », sous-entendu « que n’avez-vous avorté ma brave dame » et aussi cette remarque péremptoire « mais comment est-ce encore possible de nos jours » ! J’ai dû lutter pour rester calme ….

    1. Bonjour,
      L’idée est d’abord de ne plus considérer l’avortement comme un délit (actuellement: « crime ou délit contre l’ordre des familles et la morale publique »), mais de le considérer comme acte médical. Évidemment, cet acte médical resterait soumis à une série de conditions, notamment de délai. Il est aussi proposé de considérer comme un délit un avortement non consenti par des violences.
      Thierry

  4. A Thierry Marique ,
    Le pire c’est qu’il n’ y aura plus ces 6 jours de réflexion . ( En pratique ce temps n’était déjà pas respecté mais passons …
    Une bonne décision , une fois prise, donne un sentiment de paix durable …
    Dès lors comment savoir, s’ il n’ y a pas ce temps de réflexion ?
    Avant de se faire opérer, avant d’entreprendre un traitement avec effets secondaires , on peut demander un deuxième avis.
    Quand on achète une maison, on a 10 jours, à partir de la date du compromis de vente , pour reprendre sa signature.
    Or une maison peut être revendue à n’importe quel moment.
    L’ avortement c’est pour toujours.
    Les effets secondaires ont été très peu étudiés . Leur diffusion est limitée.
    Un rappeur ( Colonel X …j’ ai oublié son nom ) fut harcelé dans certains medias et sur les réseaux sociaux parce qu’il aurait écrit une chanson anti- avortement . Je dis  » aurait  » parce que , simplement , cette chanson éclairait le drame de l’ avortement sous un autre angle que l’ angle habituel des medias.
    Des organisations comme  » le souffle de vie  » trouvent peu d’echo dans les medias.

    1. PS :supprimer le délai de réflexion de 6 jours est criminel .(Et je pèse mes mots ) Entr’ autre pour toutes les raisons ci dessus.
      Et parce que le film  » Dear Mom « a été interdit d’ antenne.

  5. A thierry Marique,
    Qu’entendez vous par  » avortement non consenti avec violences  » . A t-on interrogé les parents en attente d’un enfant handicapé sur les pressions morales, médicales et sociétales subies ? Existe t -il des statistiques ?
    Je ne connais pas le mot français qui rend l’image mais notre vivre ensemble, notre société n’est pas  » handicapvriendelijk « . ( voir le témoignage précieux de Marie Madeleine, ci dessus ).

    1. A priori, cela doit concerner le cas d’une femme enceinte battue afin de provoquer une fausse couche. Nous serons tous bien d’accord que là nous sommes dans l’acte criminel.

  6. ( suite ) . La chanson s’appelle  » Aurélie  » ( colonel Reyel.
    A propos de délit : j’ ai déjà vu des jeunes prier le Rosaire, à 50 m d’un centre de Planning pratiquant l’ avortement. Est ce un délit ? Si oui , de quel ordre ? Ils étaient en pourparlers avec la police .

  7. Je suis triste de voir que ces questions ne donnent pas lieu à de vrais débats mais seulement une série d’arguments fallacieux :
    – avortement = droit de la femme à disposer de son corps (jamais plus n’évoque-t-on le droit de vivre du fœtus)
    – avortement = progrès (être contre l’avortement est à la limite de l’obscurantisme)
    – avortement = avancée éthique
    – les pays alentours le font donc c’est bien
    – la majorité des gens est pour donc c’est bien
    – égalité hommes-femmes implique droit à l’avortement

    Ceux qui militent en faveur de l’avortement peuvent-ils expliquer en quoi consiste le droit de vivre du fœtus? Quand et pourquoi ce droit doit s’estomper face au droit de la femme à disposer de son corps?

    1. Le débat philosophique de fond est de décider si il s’agit d’un crime ou d’un acte médical. Ainsi que de décider à partir de quel stade un embryon est considéré comme un être humain, ce qui a énormément varié depuis l’antiquité.

      1. A Thierry Marique,
        Je ne suis pas philosophe mais dois avouer avoir été assez soufflée par l’ argumentaire du Pr Mercier de l’UCL. Qu’allait on pouvoir lui répondre , philosophiquement ?
        Eh! bien, ce fut assez court et en rien,philosophique . Je résume :  » en Belgique, on a le droit d’ avorter, la loi c’est la loi, nous ne voulons aucune remise en question de cette loi, voici votre C4 … .

        Vous comprendrez que depuis je me méfie des débats philosophiques en matière d’ avortement.

        Mais l’ ultime espoir du Professeur Mercier n’ était pas de gagner un match de philo. A la fin de l’ argumentaire il dit ( je cite de mémoire) :  » Si par cet argumentaire je pouvais faire changer d’avis une seule maman, un seul papa, je n’ aurais pas perdu mon temps…..

        Alors moi aussi , malgré mon absence totale de notoriété, je m’ accroche à ce délai de 6 jours, à la
        défense des trisomiques face au complexe de supériorité des bisomiques, a l’ aide aux mamans , à des évidences comme  » Nos enfants sont ce que nous avons de plus précieux ….. A des chansons, des textes qui disent la souffrance d’ avorter …. A ce que Simone Veil a vraiment dit ….

        1. Le problème en l’occurrence était justement que ce qui devait être un cours de philo avait été détourné en tribune dogmatique. Pour ce qui est de votre point de vue je le comprends bien mais n’ai simplement pas le même.

          1. Un étudiant de 1 ère année ( ! ) a eu le courage d ‘ expliquer sur un plateau de telévision que, oui, contrairement à ce que disaient les medias, le Pr Mercier était ouvert à tout contr’ argument, remise en question , réfutation …. de son cours . D’ autres étudiants allèrent dans le même sens, bravant l’université.
            Je crains que les dogmatiques ne soient du côté de ceux qui interdisent le film Dear Mom, harcèlent un chanteur, ont peur d’un délai de réflexion ou d’un centre qui aiderait les femmes enceintes en difficulté ….

        2. Muriel, connaissez-vous cette magnifique chanson de Linda Lemay « ceux que l’on met au monde » ? Chaque fois que je l’écoute, je suis bouleversée. Elle décrit tellement bien la souffrance mais aussi l’amour pour l’enfant handicapé, ce déchirement entre « tout faire pour lui » mais aussi « je donnerais ma vie pour qu’il soit comme les autres » !

          1. Merci pour l’info, Marie Madeleine. C’est une chanson tellement profonde que j’ en lirai et en relirai les paroles. Je me sens un peu concernée, recevant régulièrment la visite de 2 personnes handicapées dont l’une a déjà perdu ses parents tandis que l’ autre avait une maman mentalement incapable de s’en occupper. Ces parents sont très présents dans mon coeur.

      2. Crime ou acte médical ? Mais pourquoi en arriver là ? « de mon temps » une bonne part des enfants pouvaient être conçus « par accident » mais aujourd’hui, l’éducation sexuelle est dispensée partout (Dieu sait !) et les moyens de contraception sont connus… Alors, à part certains cas malheureux et dramatiques, la question de l’avortement ne devrait même plus se poser. Pour moi, c’est là qu’on devrait oeuvrer, c’est là que serait le « progrès » !

  8. ….et autant que possible à en dissuader la femme  » . Citation complète voir ci- dessus , l’ article du Père de Beukelaer.
    Cette fin de citation est à apprendre par coeur : elle peut sauver une mère et son enfant.

    1. Un autre point qui pose problème c’est cette obstination à refuser que l’enfant mort-né soit reconnu comme enfant, avec les droits que cela suppose pour les parents de, par exemple, l’inscrire dans le carnet de famille, de lui donner une sépulture, etc … C’est pourtant une mesure qui n’enlève rien à personne !

      1. C’est évidemment un point clé. Aller dans ce sens reviendrait à accorder à l’embryon le statut d’être humain dès la conception, plutôt que lorsqu’il devient viable ou est accepté par la mère. Ce qui bloquerait de fait toute possibilité de sortir l’avortement de son statut pénal, voire même de le permettre sous le statut actuel. Donc si, cela enlèverait à beaucoup.
        Je suis par contre en faveur de permettre un maximum de mesures permettant de faire son deuil dans ces difficiles circonstances, mais sans aller jusqu’à la reconnaissance légale de l’existence d’un enfant qui n’aura (malheureusement) pas pu aller jusqu’à naître et exister.

        1. Il ne s’agit pas du « foetus » de moins de douze semaines mais de l’enfant mort-né pendant la gestation. A quelques jours près, cet enfant naissait « prématuré » mais quelques jours trop tôt, ce n’est pas un enfant « reconnu », on ne peut ni lui donner un nom ni l’enterrer dignement ! J’ai connu divers cas et je peux vous dire que c’est ajouter le deuil au deuil ! Pendant tous ces mois, la maman a porté un enfant dont elle connaissait le sexe, à qui elle avait déjà donné un nom et puis tout à coup … il ne serait plus rien ? Inadmissible pour moi.

        2. J’ ai compris : reconnaître l’ enfant mort -né ( lui donner un nom, une sépulture ) ne serait pas un bien, ne serait pas pas un progrès parce que ça empécherait l  » amélioration ultime  » de la loi sur l’ avortement càd , sa dépénalisation.
          Qu’entendez vous par  » bien » ,  » progrès » ?

  9. Ils ont tout de même bien de la chance, ceux et celles qui militent en faveur de l’avortement, car si le droit à celui-ci avait existé du temps de nos grands-parents, ils ne seraient peut-être pas nés!

      1. Thierry,
        malgré nos désaccords (et tout en vous respectant), peut-être nous retrouverons-nous sur un point non religieux: le fait que l’Ardenne (où j’ai la chance de vivre) est belle, très belle même. Elle est notre montagne (avec son col du Haussire, du Rosier ou du maquisard) que beaucoup de skieurs apprécient.

          1. Oui, superbe flore, tels les genêts, la bruyère, la mousse qui par endroits ressemblent à un terrain de glofe, les épilobes, les myrtilles, et les airelles. Savez-vous que 4,2% du territoire belge est répertorié zone de montagne pas la commission européenne? Si cela vous dit, Thierry, j’ai réalisé un petit montage (avec fond musical) qu’on peut voir sur you tube en tapant: Jean-Pierre Snyers cap sur la Baraque de Fraiture. Habitant à environ 20 Km de là, Chaque hiver, je me rend presque tous les jours sur cette piste de ski alpin, qui, pour beaucoup, est la première avant celles des Vosges. Ambiance montagne assurée. Et puis, pour ne rien vous cacher, étant fan des épicéas (et des sapins en général), ces paysages me passionnent. Un regret cependant: le fait qu’on ne protège pas assez le patrimoine ancien et qu’on laisse construire des habitations (la plupart en briques) qui n’ont rien à faire en ces lieux. C’est votre avis aussi? Très bonne journée

  10. A Thierry Marique,
    Je m’informe sur  » l ‘avortement, acte médical  » et tombe sur le scoop des médecins italiens. Celà fait des années qu’ils résistent ( comme si le Professeur Mercier les avait persuadés ). Le mépris qu’ils essuient des feministes est comparable au mépris des bisomiques envers les trisomiques. Les pourcentages se recoupent ( aux alentours de 80 %)…..

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