« Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ». (Marc 8, 27-35)
Jésus est entouré de disciples depuis plusieurs mois déjà. Autour d’eux, les ragots vont bon train : qui est ce rabbi qui parle et agit avec autorité et fait des guérisons surprenantes ? Une réincarnation de Jean le Baptiste ? d’Elie ? d’un des grands prophètes d’autrefois ? Alors le Maître les prend à l’écart et leur pose la question dans le blanc des yeux : « Pour vous qui suis-je ? » Pierre se fait le porte-parole des autres et proclame avec assurance : « Tu es le Messie ».
Bonne réponse…mais demie-vérité : de quel genre de messie s’agit-il ? A partir de ce moment-là, Jésus leur annonce sa passion. Là, Pierre n’est plus d’accord. Si Dieu est tout-puissant, son Elu ne peut être que victorieux. Le prenant à part, le futur prince des apôtres « se mit à lui faire de vifs reproches ». En clair: il engueule Jésus. Alors le Maître le remet publiquement à sa place : « Passe derrière moi tentateur ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ».
Rien n’a vraiment changé : les foules rêvent d’un Messie « Superman » qui change le monde, alors que Dieu envoie son Fils convertir les cœurs. Le Christ ne promet pas des lendemains qui chantent, mais une vie digne des enfants de Dieu. Chemin exigeant, s’il en est : « Si quelqu’un veut marcher derrière moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive ».
L’embêtant, c’est qu’a contrario, on pourrait rétorquer que l’Eglise a fait de Jésus aussi un superman! Que son enseignement au lieu de se contenter d’une catéchèse « d’allégories » utiles à mieux vivre personnellement et communautairement s’appuie encore et toujours sur une vérité bien contestable des faits et gestes d’une personne dite divine devenue homme… Pas certain non plus que prendre sa croix est de nature à changer le monde! Notre croix n’est-elle pas celle que nous imposent encore les puissants? Accepter l’enfer sur terre en espérant un paradis très hypothétique dans un ciel ou un ailleurs après la mort n’est pas un programme très réjouissant!