Carême de paix – 1er dimanche de Carême, Année C

« Il fut conduit par l’Esprit à travers le désert » (Luc 4, 1-13)

Carême… A la suite du Christ, l’Esprit nous conduit 40 jours au désert. Le désert est retour à l’essentiel : Qu’est-ce qui me rend plus vivant ? Le désert est aussi le lieu où la tentation reçoit son vrai visage : « Ordonne à ses pierres de devenir du pain ». Vais-je vivre pour les biens matériels, plutôt que spirituels ? Tentation de l’avoir. « Prosterne-toi devant moi et je te donnerai les royaumes de la terre » Vais-je vivre en m’asservissant à la logique du prince de ce monde ? Tentation du pouvoir. « Jette-toi en bas du pinacle du temple et les anges viendront pour te porter ». Vais-je vivre en cherchant à séduire la galerie ? Tentation du valoir.

Carême…  Prions pour la paix et la justice dans le monde et surtout en Ukraine. Si le Carême est le temps du recentrage chrétien – par le jeûne, le partage et la prière – il est, bien davantage encore, une temps de recherche de la paix des cœurs.

Ukraine – le temps des diplomates 

Emphase réthorique
Il est tentant d’aborder les récents événements qui ont secoué la planète depuis le bureau ovale, avec des formules chocs et une emphase réthorique. La sidération créant l’angoisse, beaucoup cèdent à cette douce tentation, pour se donner une contenance alors que le  sol des repères se dérobe sous nos pieds. Il est cependant nécessaire que les opinions publiques bien vite se ressaisissent pour accompagner leurs décideurs dans les actions cruciales à prendre en ces temps incertains.

Non verba sed res
Il y a au moins un reproche que personne ne fera au président Trump, c’est celui de dissimuler ce qu’il pense derrière une politesse de façade. Avantage: le reste du monde sait exactement à quoi s’en tenir. Quels sont les motifs de sa politique de ruptures brutales avec la tradition américaine depuis la fin de la seconde guerre mondiale ? Est-il un agent de Moscou, un président-promoteur immobilier, un produit de la télé-réalité, un isolationniste, ou un opportuniste? Chacun répondra avec ses dosages propres, mais la seule certitude est qu’il est le président démocratiquement élu des États-Unis d’Amérique. Aux doctes analyses doit donc succéder une réponse adéquate. Ce qui semble clair, c’est que l’intérêt des Etats-Unis passe désormais devant la défense de valeurs. Cela fut toujours un peu le cas, mais est désormais assumé ouvertement. Comment les alliés traditionnels de l’Amérique doivent-ils réagir? Nos démocraties européennes ont la réputation de beaucoup parler et peu agir. ‘Non verba sed res’: pas de paroles, mais des actes. Agissons donc. Mais comment? Il y a deux paroles du président US que nous ne devons pas oublier: (1) « L’union européenne a été créée pour entuber (‘screw’) les Etats-Unis » Le président est donc hostile aux ensembles politiques, surtout alliés, qui peuvent faire de l’ombre à la machine économique américaine. A l’Union européenne de lui prouver le contraire: l’Europe unie est un allié, non un rival. (2) (à Zelensky) « Vous jouez aux cartes avec peu d’atouts » (en anglais, les atouts, s’appellent… ’Trump cards’). Si nous voulons ne pas subir les événements avec rage et impuissance, il s’agit de jouer nos cartes en connaissant avec exactitude nos forces et faiblesses. Pour ne pas rester incantatoires, nos idéaux doivent se fonder sur une froide lucidité. 

 
Euro-commonwealth
Une nouvelle carte géostratégique se dessine. Elle rapproche Royaume-Uni, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, Union européenne et Turquie. Avec Londres et son Premier Ministre dans le rôle de pont entre les deux rives de l’Atlantique. Il a raison de ne pas vouloir couper le dialogue avec Washington, car sans la puissance américaine, les démocraties sont militairement démunies. Avec Paris et son président comme moteur d’une relance de l’Europe de la défense. Macron propose même d’étendre le parapluie nucléaire français à l’Union européenne (… cependant, aussitôt contredit par Marine Le Pen). Avec le Commonwealth anglo-saxon (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande) qui se rapproche de ce pôle mondial des démocraties. Avec la Turquie qui saisit qu’en cas de victoire russe, elle sera bientôt en tension avec Moscou. Avec l’Inde qui se profile en partenaire commercial privilégié. Développer ensemble une politique étrangère cohérente et construire une industrie de la défense commune, devient urgent et vital. Le ministre de la défense belge défendait il y a deux jours la commande d’avions américains F35, comme étant bien plus performants que l’Eurofighter britannique et le Rafale français. Je me suis permis de réagir à sa communication en signalant que la vraie question était de savoir si tous les Européens (en ce compris britanniques) étaient disposés à ensemble mettre au point un chasseur de 6° génération, le jour où il faudra remplacer les F35. Ce projet pourrait inclure le Commonwealth anglo-saxon. Il ne s’agit pas de rejeter l’alliance avec les Américains, mais bien – dans un monde multipolaire – de ne plus vivre en dépendant de leur protection. Ecoutons ce que répètent ces derniers jours les dirigeants polonais, scandinaves et baltes, si géographiquement proches du conflit ukrainien : il ne disent pas autre chose. 
 
La paix et la justice
Le pape François n’a de cesse de répéter ce que chacun sait: toute guerre est une défaite de l’humanité. Une paix durable en Ukraine reste l’objectif à poursuivre. Sans perte de souveraineté, mais en prenant en compte les intérêts des russophones habitant l’est du pays. Au-delà de son enjeu moral, une défaite de l’Ukraine nous impacterait directement, car elle serait un signal de faiblesse de la part de l’Europe et aiguiserait les appétits des faucons de Moscou. Le plan présenté par Keir Starmer avec Macron va dans la bonne direction. Il démontre que notre continent prend ses responsabilités. Le Royaume-Uni jouit des faveurs de Donald Trump, qui a une maman écossaise. Son Premier Ministre joue pleinement ce rôle avec l’aide de Charles III, qui invite le président américain à Balmoral et reçoit le président Ukrainien à Sandringham. L’Union européenne prend sa part avec la France et son président en tête. Espérons que l’Allemagne reviendra bientôt pleinement dans le jeu avec un nouveau chancelier. Sans oublier la Pologne, l’Italie et toutes les autres capitales. C’est le temps des diplomates pour conjurer la guerre. Et bâtir une paix qui ne signifierait pas le naufrage de la justice. 

«  Les yeux du cœur » – 8e dimanche de l’Année, Année C

«Un aveugle peut-il guider un autre aveugle ? »  (Luc 6, 39-45)

En ce dimanche de Carnaval, le folklore invite à mettre des masques. Ceci appelle à se moquer de tous les masques que la vie nous fait porter. Et qui, souvent, nous collent à la peau.

Le regard est ce sens humain qui permet de voir au-delà des apparence, afin de sonder le cœur des choses. Et, pourtant, si régulièrement, nos yeux restent englués dans le faux-semblant des apparences.

Convertissons donc notre regard, afin de regarder le monde et nos frères avec les yeux du Christ.

Ce mercredi, les chrétiens entrent en carême : 40 jours de jeûne, de partage et de prière pour décoller nos masques et purifier notre regard.

«  La folie de la Croix » – 7e dimanche de l’Année, Année C

« Aimez ceux qui vous haïssent. Souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent (…) Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés ; ne condamnez pas et vous ne serez pas condamnés. »  (Luc 6, 27-38)

Petit test : combien de temps par jour, beaucoup d’entre nous passent-ils à dire du mal de leur prochain ? Surtout de ceux à qui nous en voulons, parfois bien légitimement. Avec pour excuse : « tout le monde fait ainsi ». De fait, le phénomène est universellement humain. Est-il, pour autant, chrétien ? Relisons l’Évangile de ce dimanche avant de répondre.

Évidemment, ce n’est pas évident de prier pour celui qui vous pourrit la vie. Mais la prière, c’est accueillir le Souffle de l’Esprit et, seul l’Esprit nous donne de quitter nos logiques mondaines pour épouser celles du Royaume.

«  Jésus réveille » – 6e dimanche de l’Année, Année C

« Malheur pour vous qui êtes repus maintenant… » (Luc 6, 17-26)

La version des « béatitudes » chez Luc, est plus courte et aussi plus incisive. Jésus y déclare « heureux » ceux qui sont en détresse et « malheureux » ceux qui sont comblés par la vie.

Il ne s’agit pas d’une éloge masochiste de la souffrance, mais bien d’un appel à rester spirituellement en éveil. « Pauvres de nous » si nous vivons une petite vie bien pépère, en ne se préoccupant que de sa petite personne. Heureux celui qui connaît le poids d’une vie consacrée à la recherche de vérité intérieure et à l’aide au prochain, surtout le plus fragile.

La vie l’apprend : les personnes qui vivent en égoïstes ne sont pas heureuses et finissent souvent bien seules.

Mais qui est mon prochain? Quand le vieux monde répond au nouveau Vice-Président James D. Vance

Ce lundi 10 février est parue ma  chronique dans le quotidien La Libre en p.31.
Merci à La Libre de m’offrir cet espace d’expression.

«  Quand le pêcheur se reconnaît pécheur… » – 5e dimanche de l’Année, Année C

« Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur. » (Luc 5, 1-11)

L’évangile de Jean raconte que l’appel des premiers disciples se fit à partir de l’entourage de Jean le Baptiste. Cela correspond sans doute à la réalité historique.

Le récit des trois autres évangiles préfère, quant à lui, décrire un autre moment : celui qui fit passer ses hommes de leur vie professionnelle ordinaire au service du Royaume. Ce sont des pêcheurs. Ils s’en vont donc pêcher. Mais il n’y que peu de prises ce jour-là. Jusqu’au moment où Jésus s’en mêle. Alors, Simon-Pierre comprend qu’à travers Jésus, c’est le Très-Haut qui agit. Il est pris d’effroi et se reconnaît pécheur.

Jésus confirme son appel, ainsi que celui de ses compagnons : « Désormais, ce sont des hommes que tu prendras ». Malgré nos limites humaines, le Seigneur nous envoie comme témoins et comme apôtre du Royaume.

Reconnaissance du bouddhisme: la réponse d’André Lacroix à Carlo Luyckx

André Lacroix est un intellectuel qui anime le débat et je salue la chose.
Ci-joint sa réponse à Carlo Luyckx, président de l’Union des Bouddhistes de Belgique, qui est la figure emblématique de la demande des bouddhistes de Belgique à être reconnus comme « philosophie non confessionnelle », plutôt que comme « religion ». Ce qu’André Lacroix considère comme une pathétique « blague belge ». 
 
Sa lecture du traitement des Ouïghours ou du Tibet, n’est pas celle de nos démocraties occidentales, pour utiliser un euphémisme. S’il n’est pas d’accord avec moi sur ce constat, qu’il le dise.
 
Ceci explique sa vision pour le moins négative de toute religion. Je cite son petit courrier:  

«  Dans ma petite brochure, j’ai relevé pas moins de dix tares que le bouddhisme partage avec les autres religions et qui, à ma connaissance, ne concernent que très peu la franc-maçonnerie :

1) Prosélytisme allant parfois jusqu’à la violence contre les non-adhérents
2) Compagnonnage avec la droite et même l’extrême droite
3) Violences internes
4) Pratiques sexuelles aberrantes
5) Misogynie
6) Obsession de l’enfer et des châtiments post mortem
7) Récompenses promises après la mort contre espèces sonnantes et trébuchantes
8) Financement douteux
9) Prises de position rétrogrades, voire abjectes
10) Formalisme hypocrite. »

Ayant écrit un ouvrage sur les erreurs commises par l’Eglise catholique au cours de son histoire, je ne suis pas suspect de nier les failles de tout système religieux. Cependant, une religion, ce n’est pas que cela – bien au contraire. Souffrez donc, Monsieur Lacroix, que je ne partage pas votre lecture des choses. 

Plus fort encore, comme mon intervention dans ce dossier s’est confiné à l’argumentation juridique dans ce dossier, soulignant l’avis unanime du Conseil d’Etat, il est significatif de voir comment monsieur Lacroix considère le droit: comme un simple avis. Je cite son courrier: « même s’ils sont d’un grand poids, les avis du Conseil d’État n’ont pas de force juridiquement contraignante. La constatation – souligne Carlo Luyckx à la p. 3 – que « cet avis (…) a été adopté à l’unanimité en Assemblée générale, section législation, toutes chambres réunies » n’y change rien. » 

Et surtout: il encourage le pouvoir de l’Etat à intervenir dans les affaires religieuses. A la Chinoise… Je cite toujours son courrier:  « la tendance à restreindre le droit de l’État d’intervenir dans une question philosophique, théologique ou morale est peut-être dans l’air du temps ; elle n’en est pas moins contestable. » 

Je suis admiratif des réussites de la république populaire de Chine. Elle me semble bien plus adroite et efficace par sa politique d’occupation du marché pour devenir leader mondial, que les estocades de l’actuel président américain. Une visite du récent salon de l’auto de Bruxelles, est significative à cet égard: roulez en Volvo ou en MG et vous roulez chinois. 
Cependant, je pense également que la dérive de plus en plus centralisatrice du régime est son talon d’Achille. Sa (non-)gestion de l’épidémie du COVID en est la plus éclatante preuve.
Si notre Belgique vivait sous un régime équivalent à celui qui domine la Chine, il y a fort à parier que je me trouverais actuellement dans un camp de rééducation. Dans le meilleur des cas. Au pire… 
Et donc, je ne suis pas trop demandeur de pareil « évolution ».
Et donc, oui, contrairement à monsieur Lacroix, je suis attaché au poids objectivant du droit, garant d’un Etat de droit, sans intervention idéologique du politique.
En ce compris dans le dossier de reconnaissance des bouddhistes. 

«  Lumière des nations » – Présentation du Seigneur

« Mes yeux ont vu le salut, que tu as préparé à la face des peuples. » (Luc 2, 22-40)

Quarante jours après la Nativité, l’Eglise célèbre la présentation de l’enfant Jésus au temple. Ce faisant, Marie et Joseph se conforment à l’usage qui voulait que les parents offrent leur premier-né au Seigneur, puis le rachètent par un don symbolique (pour les couples au revenu modeste : un couple de tourterelles ou deux petites colombes).

Cet épisode est chargé de sens : Voici que le Christ – présence de Dieu sur terre – rentre dans le temple, qui en Israël est la demeure de Dieu. Avec la présentation de l’Enfant-Dieu au temple, la première alliance – scellée avec le peuple élu – rencontre l’alliance nouvelle et éternelle pour toute l’humanité. Les bougies que nous portons en procession en cette fête, célèbrent l’Enfant qui illumine le monde : « lumière pour éclairer les nations païennes et gloire d’Israël ». Au temple, ce sont deux vieillards qui jubilent en annonçant l’accomplissement de la promesse. Tout en avertissant que l’aube nouvelle passera par la nuit du Golgotha : « Vois, ton Fils qui est là, provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division. Et, toi-même, ton cœur sera transpercé par une épée. »