Je ne résiste pas à l’envie de reproduire ici, un passage du très bel article sur le Bhoutan, de Sabine Verhest, paru en p.16 dans « La Libre » de ce jour. A l’heure où la communauté Wallonie-Bruxelles semble déterminée à remplacer les cours spirituellement engagés (religion ou morale) par un cours « neutre », voici ce qui donne à penser : L’éveil spirituel fait partie de l’éducation et a donc toute sa place dans à l’école. Pas uniquement sous la forme d’un enseignement neutre et théorique, mais comme pratique de vie. Non pas pour enfermer le jeune dans une tradition théologique ou philosophique. Mais pour l’ouvrir à sa propre intériorité.
C’est comme pour le langage : Pour apprendre une langue étrangère, il faut d’abord maîtriser une langue maternelle. Il en va de même en spiritualité : S’ouvrir aux autres traditions, ne peut se faire que si on a une tradition spirituelle soi-même. Comme me le déclarait un ancien recteur d’université, franc-maçon notoire : « Je ne veux pas que mes étudiants deviennent des analphabètes spirituels ».
Ma crainte est donc que – en chassant l’éveil spirituel de l’école – on y fasse rentrer de plus belle son contraire : le fondamentalisme. Car oui – le « brossage de cerveau » est le meilleur antidote au « lavage de cerveau ».
Voici le passage en question :
Quand la cloche résonne, tous se pressent avec lenteur vers leur rang, face au drapeau jaune et orange du pays du dragon tonnerre. Après les chants, ils méditent quelques minutes en silence. On appelle cela le brossage de cerveau. “De la même manière que vous vous brossez les dents pour votre hygiène dentaire, vous vous brossez le cerveau pour l’hygiène du cerveau”, nous explique la directrice, Deki Choden, de sa voix douce. Cela “revient à observer consciemment le silence, l’instant présent. Nous faisons cela une fois le matin et une fois en fin de journée. Cela permet de développer le pouvoir de concentration”, note-t-elle, inspirée par le Dr.Dan Siegel, neuroscientifique et psychologue de l’université de Berkeley. Deki Choden, dont l’ambition affichée est d’oeuvrer par l’éducation au “bonheur universel”, a introduit dans son école des pratiques contemplatives. Ici, par différentes initiatives, comme le “Call to Care”, on inculque aux enfants l’art de vivre ensemble et de s’intéresser à son prochain, on cultive l’attention – à soi et à l’autre –, la bonté, la compassion et l’empathie. “Nous avons mis en place des programmes qui promeuvent ces valeurs et les compétences sociales et émotionnelles, dit-elle. Nous enseignons bien sûr les mathématiques, les sciences, l’anglais, etc., mais nous essayons aussi consciemment d’infuser des valeurs liées au bonheur.” Bref, “nous cherchons des voies alternatives” parce que, “au bout du compte, la course à l’excellence, à la perfection, au succès apporte-t-elle vraiment le bonheur ?”