Messes TV – Faut-il interdire la Marseillaise?

Je ne suis pas encore intervenu sur le débat concernant la Messe télévisé du WE dernier en Flandre, où des politiciens s’étaient scandalisés de la lecture d’un extrait d’une épitre de Saint-Paul aux Ephésiens (« femmes, soyez soumises à vos maris »), réclamant la fin des Messes télévisées. (Oubliant au passage que l’apôtre précise que la mesure de cette soumission était celle du Christ, qui a donné sa vie pour l’Eglise.) 
La lettre de Paul est, bien sûr, écrite dans une culture patriarcale, qui n’est plus la nôtre. Ce qui importe est donc de voir comment elle est relue et vécue par les chrétiens aujourd’hui. Si beaucoup reste à faire pour le droit des femmes dans la société et dans l’Eglise, constatons que nous progressons.
Mais le coeur du débat se situe ailleurs. S’il faut filtrer tout texte qui choque, comment encore oser chanter la Marseillaise? « Qu’un sang impur abreuve nos sillons… » S’ils étaient logiques avec eux-mêmes, nos censeurs du jour devraient inviter au boycott de l’hymne national français.  A moins que leur objectif était de viser l’Eglise catholique et non les textes anciens aux paroles parfois dérangeantes…

« Hygiène de l’âme »– 22° dimanche, Année B

« Ce qui sort de l’homme, voilà ce qu’il le rend impur ». (Marc 7, 1-23)

En ce temps de rentrée scolaire, il est bon que nos têtes blondes reprennent de bonnes habitudes. Par exemple : bien se laver les mains avant de passer à table. Comment, dès lors, expliquer que quand des pharisiens demandent à Jésus pourquoi ses disciples prennent leur repas sans l’avoir fait, celui-ci les traite d’hypocrite ? Parce que les pharisiens pensaient qu’il suffisait de se laver les mains pour se purifier le cœur. Et Jésus d’avertir : « Rien de ce qui est extérieur à l’homme et qui pénètre en lui ne peut le rendre impur. Mais ce qui sort de l’homme, voilà ce qu’il le rend impur ». S’il est utile d’apprendre à nos enfants l’hygiène du corps, il est encore plus vital d’aussi leur enseigner l’hygiène de l’âme. C’est bien de se laver les mains, mais encore mieux d’ouvrir ses mains pour partager. C’est important de se brosser les dents, mais tellement plus essentiel de ne pas ouvrir la bouche pour dire du mal de son voisin. C’est conseillé de prendre régulièrement un bain ou une douche, mais non moins nécessaire de régulièrement se replonger spirituellement dans l’eau de notre baptême. Bref, que ce temps de rentrée scolaire soit également – pour les petits comme pour les grands – un temps de redécouverte du Christ et de son Evangile.

Le Pape et la pédophilie

Sale temps pour le pape François…
Sa déclaration improvisée sur le nécessaire accueil par tout parent d’un enfant homosexuel a été médiatiquement balayée par sa mention fugace d’un possible recours à un psychiatre. Et certaines rédactions de conclure: il sous-entend que l’homosexualité est un trouble psychiatrique. La Vatican a beau expliquer et contextualiser, auprès de beaucoup le mal est fait.
Mais ce n’est pas tout: un nonce à la retraite demande à François de démissionner, en l’accusant d’avoir couvert un cardinal américain, récemment sanctionné pour pédophilie et inconduite morale.
Enfin, de nombreuses victimes de la pédophilie accusent le Pape de beaucoup parler et de peu agir.
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Loin de moi de penser que le Pape soit parfait. Ou que sa gestion du dossier de la pédophilie soit sans failles. Mais – soyons francs – qui d’entre nous peut se vanter de pouvoir gérer une question aussi délicate sans parfois commettre des faux-pas? Pas moi en tous les cas. En tant que porte-parole des évêques, j’ai eu à piloter médiatiquement  la démission de l’évêque de Bruges et ce, en trois jours. Dieu m’est témoin: à ce moment-là, j’ai agi dans l’urgence et à l’instinct. J’ai été bien conseillé et entouré, mais j’aurais tout aussi bien pu me planter magistralement. Alors, dans la position du Pape, je pense que la tâche devient titanesque. J’invite donc tous les catholiques à prier pour leur Pape, afin que l’Esprit l’inspire.
Cela est d’autant plus difficile qu’il est pris en tenaille entre une faction ultra-conservatrice qui veut l’empêcher de poursuivre sa mission et voit l’ombre d’un « lobby gay », complaisant envers la pédophilie, dans son entourage. Et de l’autre, une faction ultra-progressiste, qui veut révolutionner la vision traditionnelle de l’Eglise concernant la sexualité.
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Voici quelques pistes qui me semblent importantes pour que l’Eglise soit à la hauteur du défi de la pédophilie:
1. Il faut continuer à nettoyer les écuries d’Augias. Je ne suis donc pas choqué (mais bien sûr fort peiné) par les révélations du grand jury de Pennsylvanie. Je pense que d’autres dossiers vont continuer à sortir. Au lieu de commenter la chose en disant « vous voyez que l’Eglise ne fait rien », j’invite la presse à expliquer que ceci démontre au contraire que la culture du silence et la protection des contrevenants – c’est fini. Que cela se fasse laborieusement et maladroitement, j’en conviens. Mais il s’agit de soutenir ceux qui accompagnent ce mouvement – dont le pape – plutôt que de les clouer au pilori. Car cela fait le jeu de leurs adversaires.
2. Il s’agir de lutter contre cette maladie spirituelle, appelée par le Pape le « cléricalisme ». Elle consiste pour un clerc à se penser au-dessus du commun. Que les séminaristes soient donc éduqués à la collaboration et à l’écoute des femmes et des hommes dans la société et des baptisés dans l’Eglise.
3. Le célibat consacré (tout comme le mariage) ne peut être vécu de façon équilibrée que sur base d’une intégration harmonieuse de sa sexualité. Le fait de renoncer à fonder un couple et à vivre une sexualité active ne fait pas de vous un être angélique (ou un robot clérical) sans pulsions sexuelles et sans affectivité. De saines et saintes amitiés avec des hommes et des femmes, vécue avec la prudence voulue, ne détournent pas le prêtre de sa mission, mais l’y enracinent. Je me souviens des commentaires grivois lorsque le monde découvrit l’amitié entre saint Jean-Paul II et une philosophe américaine. Jusqu’au moment où le pape François réagit en déclarant: « Moi ce qui m’inquiète, c’est un prêtre incapable de vivre une amitié juste et saine avec une femme ».
Certains affirment que le célibat consacré est un risque en soi de dérapage, par frustration. S’il est imposé, il ne pourra épanouir. Par contre, s’il est librement accepté comme réponse adulte à un appel, je pense qu’il est porteur de sens et n’empêche pas la joie et le bonheur. D’ailleurs, le phénomène #Metoo démontre qu’une vie sexuellement « libérée », n’est – hélas – pas non plus une garantie de sexualité pacifiée et non-violente.
4. Le prêtre est un homme du spirituel et de l’invisible. S’il ne vit plus dans la prière, qui le relie à l’Esprit et à l’invisible de Dieu – il devient le plus perdu des hommes. Un vendeur de chaussures, s’il perd le goût de sa profession, agit néanmoins dans le visible et le concret et ceci le raccroche à la réalité. Un prêtre qui oublie le sens de Dieu devient – lui – un pantin pathétique. Invitons donc les prêtres à rester accroché à la prière et aidons-les sur ce chemin, en les encourageant. Et en priant pour eux.

« Crise spirituelle »– 21° dimanche, Année B

« C’est l’Esprit qui fait vivre, la chair n’est capable de rien ». (Jean 6, 60-69)

L’Evangile de ce dimanche se situe à un moment de crise spirituelle. Beaucoup de contemporains avaient suivi Jésus, pour des raisons humaines (ce que l’Evangile appelle « la chair ») : le prophète de Nazareth parlait bien et touchait les cœurs, Israël avait besoin d’un réformateur, ses guérisons impressionnaient, etc. Mais trop – c’est trop. En se présentant comme Pain de Vie, Jésus s’attribue une qualité divine. La réaction du public est immédiate : « ce qu’Il dit est intolérable, on ne peut pas continuer à l’écouter ! » Et Jésus de répondre : « Personne ne vient à moi, si cela ne lui est pas donné par le Père ». Or ce que donne le Père à ceux qui le Lui demandent, c’est l’Esprit. Aujourd’hui encore, nous commençons souvent à être chrétien pour des raisons bien humaines : « c’est mon éducation, il faut des valeurs, cela éduque nos gosses, etc. »Arrive cependant un moment où ces motivations terrestres ne suffisent plus. Parce qu’on est déçu par son Curé, parce qu’on n’accepte plus la morale catholique, parce qu’on est choqué par certains comportements, etc. etc. C’est la crise spirituelle. Ne reste alors que le disciple à qui l’Esprit donne de comprendre que toutes ces raisons trop humaines ne suffisent pas pour rester durablement fier de son baptême. « C’est l’Esprit qui fait vivre, la chair n’est capable de rien ». Seul l’Esprit fait entrevoir la vraie raison – celle qu’exprime saint Pierre : « Seigneur, vers qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle ».    

« Pas de marketing…»– 17° dimanche, Année B

« Alors, de nouveau, Il se retira tout seul, dans la montagne ». (Jean 6, 1-15)

Ce Jésus n’est vraiment pas doué en matière de marketing… Il vient de faire un coup d’éclat en multipliant les pains. Les foules raffolent et en redemandent. Mieux : elles veulent en faire leur roi. Et lui, au lieu de prendre la balle au bond, que fait-il ? Il se retire, seul, dans la montagne pour prier son Père. Ses disciples – qui n’attendaient que de le voir triompher – n’ont pas dû comprendre.

Et pourtant, si Jésus multiplie les pains, ce n’est pas pour annoncer la fin des famines. L’Evangile n’est pas une assurance de gagner au win-for-life, mais une invitation à prendre le dur chemin de la conversion. La multiplication des pains annonce que le Royaume du Père est source d’abondance spirituelle et de partage fraternel. Mais le cœur humain est lent à comprendre ce que son âme pressent. Quand passe un gourou qui annonce un bonheur aussi trompeur que facile – nous sommes séduits. Tandis que le Verbe de Dieu, que les foules voulaient couronner pour de mauvais motifs, finira couronné d’épines sous les regards amusés.  

« Vous allez disparaître » – La Libre p.41

Ce lundi 23 juillet est parue ma chronique mensuelle dans le quotidien La Libre en p.41.
Son titre original est « Vous allez disparaître ». Pour la lire, cliquez que le titre (plus polémique) donné par la rédaction: « Quand un responsable politique laïque et maçon, me lance: « Vous allez disparaître »
Merci à La Libre de m’offrir cet espace d’expression.

« Saint repos »– 16° dimanche, Année B

«Reposez-vous un peu ». (Marc 6, 30-34)

De retour de mission, les apôtres sont fatigués. En bon pédagogue, Jésus les invite à se reposer. Cela n’est pas anodin. Nous vivons dans une société de l’efficacité et du travail. En soi, ce n’est pas mauvais de faire l’éloge de l’effort. A condition, cependant, que la sacro-sainte compétitivité ne devienne pas une religion. Le « toujours plus vite, plus fort et plus intense »ne peut tenir éternellement. Nous ne sommes, ni des surhommes, ni des robots. D’où le besoin de repos, de recul, de vacances. Pas uniquement pour « ne rien faire » ou pour bronzer, mais pour nous oxygéner l’esprit. Afin de faire le point, de creuser en nous-mêmes, voire pour retrouver la source de notre baptême en écoutant davantage l’Esprit.

Les vacances, ce n’est pas forcément partir loin, ou visiter beaucoup de choses. Les vacances, c’est prendre du recul par rapport au quotidien, afin de revenir plus frais, plus disponible, plus lucide, et pourquoi pas ?… plus chrétien. Car du travail nous attend à notre retour et pas uniquement pour gagner notre croute. Il s’agit aussi de notre mission de baptisé : « Jésus vit une grande foule. Il fut saisi de pitié envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, Il se mit à les instruire longuement ».