« Une vie avant la mort » – Nuit et jour de Pâques, Année C

« Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? Il n’est pas ici, Il est ressuscité. » (Luc 24, 1-12)

La mort biologique est la seule certitude humaine que nous ayons. Tous nous allons mourir. Même Jésus, le Verbe divin fait homme, a connu la mort. Et la mort horrible et injuste de la croix. Cependant, la mort n’est pas une réalité ultime. Tel est le credo de Pâques que les chrétiens proclament à la face du monde depuis plus de 2000 ans. Mais les baptisés ne se contentent pas de croire en une vie après la mort. Ils annoncent aussi une vie avant la mort. L’Esprit du Christ rend vivant. Dans un monde qui insidieusement nous transforme en zombies – enfermés dans les tombeaux de l’avoir, du pouvoir et du valoir – l’Esprit souffle sur notre âme et nous éveille à la Vie :  « Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? »  La vie de saint François – dont notre nouveau Pape se réclame – illustre cela : Parce qu’il suit les traces de l’Esprit, le pauvre d’Assise est spirituellement plus vivant que tous les puissants de son siècle.      

Pâques signifie « passage ». Passage par la mort vers une vie plus vive – une vie en Dieu. Tel est le grand signe de la résurrection du Christ, prémisse et gage de notre propre résurrection. Dés maintenant ne laissons pas la peur, l’égoïsme et les ténèbres prendre pied dans nos vies. Vivons en enfants de la résurrection et de la lumière. « Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? Il n’est pas ici, Il est ressuscité. » Alléluia !

Une « bonne petite polémique » de Pâques

C’était sans doute trop beau: Une fête de Pâques avec un Pape populaire et aucun scandale récent qui éclate dans l’Eglise. Du coup, certains ont profité d’une interview de Mgr Léonard pour créer une « bonne petite polémique ». Pourtant, l’archevêque n’a rien dit de particulier. Mais il a répondu – en soupirant – à la rituelle question sur l’homosexualité. Et il n’a fait que rappeler l’enseignement de l’Eglise. Exigeant pour beaucoup, sans doute. Mais ainsi est le Christ: Il exige tout, mais également comprend tout et pardonne tout. Mais la compréhension et le pardon étant moins médiatiques, la polémique est partie de l’exigence. Ce matin, elle fut également relayée par la presse du nord du pays. C’est tout juste si on n’accuse pas l’archevêque de « gaybashing ».

Pourquoi donc est-il si difficile d’aborder une fête religieuse en parlant tout simplement de spiritualité? Le message chrétien fait-il donc tellement peur, que même à Pâques, il vaut mieux étouffer sa voix sous une « bonne petite polémique »? Cela me rend triste. Certains diront: Un samedi saint – que voilà une humeur de circonstance.

Vivement donc la lueur de Pâques. Celle-ci m’est venue avec la réaction pleine de respect d’un catholique homosexuel. Ce frère chrétien a écrit sur Facebook: « Je viens de lire les nombreuses critiques suscitées par les propos de Mgr Léonard sur l’homosexualité, dans l’interview de ce jour au Soir. L’archevêque avait précisé qu’il parlait de cela parce qu’on l’interrogeait. Ses propos repris sur facebook sont respectueux des personnes. Je ne pense pas qu’il bénéficie du même respect dans la plupart des commentaires. Il adresse une invitation. je n’y réponds pas positivement, même si je partage sa conviction sur l’altérité fondamentale de l’homme et de la femme. Avec mon compagnon, j’essaie de vivre l’amour et le don de soi selon ce qui m’est donné. Je bénéficie de nombreuses marques d’accueil chaleureux dans l’Eglise. »

 

Colère rouge et verte, ce matin à Liège

Hier soir, nous marchions dans les rues de Liège en suivant une croix. Ce matin, ils étaient bien plus nombreux à défiler dans la Cité Ardente pour leurs emplois à l’appel du front commun des syndicats FGTB (socialiste) et CSC (d’origine chrétienne). Mon milieu d’origine est bien éloigné de la culture syndicale, mais à l’invitation d’un responsable CSC, j’ai assisté aux discours en fin de cortège. Cela se passait, après tout, sur le territoire de la paroisse dont je suis Curé. Et puis – à certains égards – cela aussi parlait de la passion.

Il y avait de la colère. Plus tellement la colère de ceux qui réclament le plein emploi et le maintien des droits acquis. Mais bien la colère de celui qui voit la pauvreté augmenter et s’insinuer partout. La colère de celui qui aperçoit des jeunes dormir dans les gares et des petites voler un porte-feuille pour pouvoir se payer la cantine scolaire.

Je connais assez d’économie politique pour me rendre compte qu’il n’y a pas de solution facile à la paupérisation qui frappe l’Europe. Que celle-ci découle également d’un glissement des richesses vers les pays émergents. Mais il est dangereux que ceci se vive sur fond d’un élargissement des écarts sociaux. Certains riches deviennent « scandaleusement » riches et le marché du grand luxe ne s’est jamais aussi bien porté. Ils ne sont pas directement responsables de ce qui se passe, bien sûr. Mais sans un surcroît de solidarité, la paix sociale va vivre des heures sombres. A cet égard, je rappelle une de mes chroniques, parues en septembre 2011 déjà, dans les pages de « La Libre »: « Quand les riches s’en mêlent ».

Il y avait de la colère ce matin à Liège. De la colère et de la peur. Mais aussi de l’espoir. Le responsable syndical qui m’avait invité termina son discours par ces mots: « Demain nous fêtons Pâques, la fête de la vie plus forte que la mort ». Puissent ces paroles être entendues de beaucoup. Et porter du fruit.

 

Plus de 800 participants au chemin de croix dans les rues de Liège

C’est sous un climat proprement hivernal que se vécut le deuxième chemin de croix dans les rues de Liège de ce vendredi saint, 29 mars. Présidé par Mgr Jousten, évêque de Liège, il rassembla – selon les chiffres de la police – entre 800 et 850 participants. Cela fait un peu moins que l’année dernière (plus de 1000), le froid ayant découragé un certain nombre de personnes.
Le chemin de croix a débuté en l’église Saint-Pholien. Il est passé par le centre-ville pour s’achever à la cathédrale. C’est là que Mgr Jousten présida l’office du vendredi saint dans une cathédrale bondée, comme aux grands jours.
La Pastorale Urbaine remercie les forces de police pour leur encadrement attentionné.

Vendredi saint – Chemin de croix dans les rues de Liège

Ce vendredi 29 mars, ce sera pour les chrétiens la date du vendredi saint. Ils font mémoire de la mort de Jésus sur la croix, deux jours avant de fêter sa résurrection à Pâques. Suite au succès de l’année dernière (plus de 1000 participants), la « Pastorale Urbaine », qui organise diverses animations pour les catholiques de Liège, organise pour la deuxième fois un chemin de croix dans les rues de la ville. Chapeauté par les doyens des deux rives de la ville (Rive-droite, doyen Jean-Pierre Pire et rive-gauche, doyen Eric de Beukelaer), il sera présidé par Mgr Aloys JOUSTEN, évêque de Liège. Le chemin de croix partira à 18h de l’église Saint-Pholien pour arriver à 19h15 à la Cathédrale. Les marcheurs suivront symboliquement une grande croix et porteront des cierges. Cette année, ils avanceront au rythme lent des tambours et au son des crécelles. Des intentions seront présentées par des représentants de la société civile – représentant la vie folklorique, politico/médiatique, socio-économique, artistique et éducative. L’événement s’adresse à un large public. Chacun peut librement y participer: Liégeois ou non, jeune ou aîné, croyant ou peu, pratiquant ou pas. Le chemin de croix est une prière par les pieds. C’est un message d’amour universel qui s’adresse bien au-delà des habitués des églises. La Pastorale Urbaine remercie l’administration communale et les forces de police. Grâce à leur aimable collaboration, pareille démarche s’organise dans d’excellentes conditions.

Ensuite : Les participants au chemin de croix seront invités à prolonger leur démarche en participant à l’office du vendredi saint présidé par l’évêque à 19h30 à la cathédrale. Comme le Vendredi Saint est le jour par excellence pour reconnaître notre imperfection humaine, au terme de l’office celles et ceux qui souhaitent pourront recevoir le sacrement du pardon (la confession).

Concrètement : RDV à Saint-Pholien le vendredi 29 mars à partir de 17h30. Chemin de croix dans les rues de Liège entre 18h à 19h15. Pour ceux qui le souhaitent : office à la cathédrale de 19h30 à 20h45, suivi d’un temps libre pour les confessions jusque 21h15.

Déroulement : Cinq haltes sont prévues avec une courte lecture de la passion, suivie d’une prière pour et par des acteurs de la société civile. 1. Eglise Saint-Pholien: intention pour les associations d’animation folklorique. 2. Perron: intention pour les décideurs publics et les journalistes. 3. Dalle de la place Saint-Lambert: intention pour les acteurs de la vie économique. 4. Opéra: intention pour les artistes. 5. Vierge de Delcourt: intention pour les jeunes et le monde scolaire.

Mystères joyeux en pleine semaine sainte

Curieux paradoxe: Alors que la semaine sainte est le moment liturgique de l’année où l’on médite – par excellence – les Mystères douloureux du Rosaire (les étapes de la passion du Christ), avec le pape François, ce sont les Mystères joyeux qui se déroulent sous nos yeux: Après « l’annonciation » du nouveau pape et de son nom, il y eut « la visitation » à son prédécesseur Benoît XVI. Mystères joyeux… Rien de surprenant à ce que l’homélie du nouveau pape pour le dimanche des Rameaux parle justement de la joie: « La joie, tel est le mot que je veux vous dire. Ne soyez jamais des hommes et des femmes tristes, un chrétien ne peut jamais l’être. Ne vous laissez jamais prendre par le découragement. Notre joie n’est pas une joie qui naît de la possession de nombreux biens, mais du fait d’avoir rencontré une personne, Jésus, qui est parmi nous. Nous savons qu’avec lui nous ne sommes jamais seuls, même dans les moments difficiles, même quand le chemin de la vie se heurte à des problèmes et à des obstacles qui semblent insurmontables. Et il y en a tant! Nous accompagnons et nous suivons Jésus, mais surtout nous savons qu’il nous accompagne et nous charge sur ses épaules. En cela est notre joie, l’espérance que nous devons porter dans notre monde. »

C’est un peu comme si le pape François ramenait l’Eglise aux sources vives. Là où tout commence. C’est ce que déclara le cardinal Angelo Comastri, vicaire pour la cité du Vatican: « Nous redécouvrons la simplicité et la ferveur des premiers commencements de notre foi ». C’est également le sentiment de l’écrivain Christian Bobin, qui déclare à Jean-Claude Raspiengeas pour le quotidien « La Croix »: « Malgré son âge, malgré son poumon en moins, malgré toutes les fatigues et les lourdeurs, je vois un homme neuf, vivant, qui, déjà, me touche profondément. »

Mystères joyeux, donc. Vivons cette joie et rendons grâce au Père pour celle-ci. Mais n’oublions cependant pas: Après les Mystères joyeux viennent les Mystères douloureux. Même saint François d’Assise – le troubadour de la joie divine – finit sa vie marqué des signes de la passion du Christ. Il est donc possible que ce Pape de la joie connaisse à son tour l’abîme de la solitude et de la souffrance. Soyons donc dans la joie, mais demeurons vigilants dans la prière.

« Ils ne savent pas ce qu’ils font » – Dimanche des Rameaux et de la Passion, Année C

« Et il disait : ‘Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton Règne.’ Jésus lui dit : ‘Amen, je te le déclare, aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis.’ » (Luc 22, 14-23, 56. Luc 23, 1-49)

Avec le dimanche des Rameaux débute la « Semaine Sainte », c’est-à-dire la sainte semaine des chrétiens. La semaine qui résume notre foi en un Dieu qui aime l’humanité de façon déraisonnable. Un Dieu crucifié par amour, qui pardonne les péchés jusqu’à son dernier souffle, car « ils ne savent pas ce qu’ils font ». De cet Amour fou, les rameaux qui orneront les crucifix de nos maisons, sont le rappel tout au long de l’année.

Ne vivons pas cette semaine de façon distraite. Unis à l’Eglise universelle et à notre pape François, participons dans la mesure du possible aux offices de la semaine sainte et au chemin de croix dans les rues de Liège. Ainsi, nous retrouverons-nous pour célébrer la Pâques du Christ avec un cœur de ressuscité.

Poverello

Lorsque, après la fumée blanche et l’« habemus papam », apparut la silhouette du nouveau successeur de Pierre, j’étais particulièrement ému. Pas tant par la silhouette simple et souriante du nouveau Pape, ni par sa nationalité. Ce fut le nom « François » qui me remua. Et j’ai pensé: « Il a osé! ».

Les lecteurs réguliers de ce blog se rappellent l’article rédigé dans la foulée de l’élection, intitulé « Francesco ». Certains observateurs me firent remarquer que je m’avançais un peu vite en décrétant que le Pape se réclamait du Poverello. Que ce pourrait être François de Sales ou François-Xavier. Personnellement, je ne doutais pas qu’il s’agissait de François d’Assise. Non pas parce que je suis un peu devin ou particulièrement bien introduit au Vatican. Mais parce que, déjà lors du précédent conclave, alors que j’accompagnais le cardinal Danneels comme porte-parole, le nom de « François » circulait dans les couloirs romains. Il se chuchotait: « Pour créer un électrochoc, il faudrait un nom de pape qui soit un rappel fort de la radicalité de l’Evangile. François d’Assise serait ce nom ». A cela, d’autres objectaient: « Cela ne se fait pas. Un Pape doit prendre un nom de pape ». Le pape Bergoglio a donc osé. Ce geste est fort. Il signifie un audacieux programme de gouvernement – comme le souligne le Vaticanologue John Allen. En lisant hier sur Facebook les commentaires de jeunes catholiques français « bien comme il faut »,  regrettant sa sobriété liturgique, je me suis dit que son ministère ne serait pas facile.

Prions pour notre Pape, afin que l’Esprit lui ouvre des chemins pour aider l’Eglise à se recentrer sur le Christ et la simplicité de l’Evangile. S’il ne pouvait insuffler ce renouveau à la curie romaine et à toute l’Eglise, les fidèles les plus dubitatifs se détourneront en soupirant: « Il sourit aux malades et embrasse les enfants, mais pour le reste… » Reste également à espérer qu’un émule d’Ali Agça ne prenne bientôt pour cible, ce pasteur qui aime le contact avec la foule.

Saint François d’Assise, nous vous confions notre nouveau Pape.

Cachez ce Pape… – Marianne Belgique p.24

L’édition belge de l’hebdo Marianne vient de publier son deuxième n°. La rédaction m’a demandé de tenir une chronique régulière dans ses colonnes.
Je suis heureux de cet espace d’expression dans un magazine tous-publics. D’autant plus que celui-ci est bien connu pour sa défense de la laïcité politique.
Un clin d’œil à tous ceux qui pensent qu’une fois sortis de leur sacristie, les curés n’auraient plus qu’un droit: celui de se taire.
Ci-dessous le texte de ma chronique:

Ma signature dans les pages de Marianne-B déclenchera peut-être quelques réactions agacées. Du genre : « Cet hebdo déclare défendre une ‘laïcité affirmée’. Alors, pourquoi ‘diable’ offrir une tribune à un ecclésiastique ? Un catholique modérément… catholique  – passe encore. Faut être tolérant. Mais là… » Et pourtant. La vertu d’une chronique n’est pas d’entrainer l’adhésion de tous. Bien de faire réfléchir.  A l’écrit qui caresse dans le sens du poil, préférons le rebrousse-poil. Au prêt-à-penser, substituons le remue-méninges

Ainsi, le Pape… A la rédaction de ce billet, j’ignore encore quel successeur de Benoît XVI la fumée blanche désignera. Peu importe : Qu’il soit jeune ou vieux, pragmatique ou charismatique, Italien ou Africain, Sud-Américain ou Asiatique,… un Pape est là pour « faire le Pape ». Et cela implique davantage que de bénir les foules en 36 langues. Un Pape annonce le Christ et son Evangile. Ce qui parfois dérange. Tout le monde encourage le pardon, mais qui accueille Michèle Martin ? Tout le monde aime la famille, mais qui cherche à consolider les couples ? Tout le monde regrette la pauvreté, mais qui est prêt à partager ? Un Pape qui « fait le Pape », rame souvent à contre-courant. Il sera critiqué. Parce que  l’Eglise est aussi une réalité humaine avec ses failles. Mais également parce qu’il bouscule. Aux Tartuffes postmodernes qui crient : « Cachez ce Pape que je ne saurais voir », je réponds donc : « un Pape donne à penser. »          

La vieillesse a parfois du bon – 5e dimanche de Carême, Année C

« Ils s’en allaient l’un après l’autre, en commençant par les plus âgés » (Jn. 8, 1-11)

L’histoire de la femme adultère révèle toute la finesse psychologique de Jésus. Au lieu de plaider l’acquittement de la coupable « car il faut bien être chrétien – n’est-ce pas mon bon Monsieur ? », Jésus met une condition à sa lapidation : « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter la pierre ». Avec humour, l’évangéliste note : « Ils s’en allaient l’un après l’autre, en commençant par les plus âgés ». La vieillesse a parfois cela de bon, qu’elle rend l’homme plus lucide sur lui-même.

Voilà pourquoi, les cardinaux élisent le successeur de Pierre parmi des hommes d’âge mur et non dans un sérail de jeunes premiers. De par son expérience de vie, le nouveau Pape sera davantage conscient de l’humaine faiblesse. Et ceci lui donnera d’annoncer avec d’autant plus de force que Celui qui est – Lui – sans péché, ne jette jamais la pierre : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. »