Allez voir le film « La prière ». 

Résolution de Carême oblige, ce n’est que hier soir que j’ai été voir avec des amis « La prière », le film de Cédric Kahn. Pour rappel, il s’agit de l’histoire de Thomas, jeune toxicomane, qui entre dans une communauté d’hommes qui se guérissent de leur dépendance par le travail, la vie communautaire et… la prière. Le film s’inspire de plusieurs réalités dans l’Eglise catholique, dont la communauté du « Cenacolo », fondée par une religieuse italienne, soeur Elvira (dont s’inspire le personnage de soeur Myriam dans le film – lire ci-dessous).
 
Je vous invite à aller voir ce film, car il sonne terriblement juste. En effet, quoi de plus difficile, surtout aujourd’hui, de filmer une démarche spirituelle aussi exigeante, sans tomber dans le cliché, le niais, le comique, ou le moqueur? Ici, rien de tout cela.  Chaque acteur et chaque scène, sonne « juste ». Comme prêtre depuis 26 ans, à aucun moment ne me suis-je dit en regardant le film: « mais non, ce n’est pas ainsi que cela se passe ». Tout sonne vrai et rien n’est « too much ». Pas même la scène d’amour assez explicite et sensuelle (mais nullement vulgaire), qui au début m’avait troublée. Je me suis d’abord dit: qu’est-ce que cela vient faire dans le film? Une façon de s’assurer de l’audimat? Ce matin, avec le recul, elle m’apparaît avoir sa place. Elle rappelle que ces jeunes ex-toxicomanes, qui passent leurs journées le chapelet à la main, ne sont pas devenus pour autant des anges. La part corporelle, voire même animale, de ces âmes que le Ciel attire, reste soulignée. Pas de rédemption en niant l’incarnation. C’est aussi ce que semble dire la fin du film, quand le jeune Thomas se décide d’entrer au séminaire et puis, sur le chemin, fait demi-tour pour retrouver sa copine. Aucune conclusion quant à son avenir (Finira-t-il prêtre? Va-t-il vivre en couple?)  mais un rappel qu’aucune vocation ne se construit sur la seule exaltation d’une expérience forte (il avait survécu à une chute et nuit solitaire en montagne). L’appel de Dieu, quel qu’il soit, se reçoit et se mûrit avec le temps et… la prière. (Je me souviens d’un jeune toxicomane, dans une de mes paroisses de stage comme séminariste. Tout le monde le déclarait « perdu ». Il est aujourd’hui prêtre après avoir été accueilli au Cenacolo). 
 
Car le personnage central du film n’est pas le jeune Thomas, si excellent soit-il. Pas, non plus «  Dieu », assez discret dans cette fiction (le réalisateur se dit agnostique). Au centre du film, il y a… la prière. Et celle-ci – par-delà ses expressions (beaux chants religieux portés par les voix d’hommes, récitations de chapelet, Eucharisties et rumination des psaumes) – est présentée comme un chemin de libération intérieure pour laisser une Vérité d’En-Haut nous guérir de ce qui étouffe nos vies. «  Arrête de te mentir », lance la soeur Myriam au jeune Thomas avec une certaine rudesse. Et c’est bien cela, le chemin sans concession, le chemin tout à la fois âpre et lumineux de la prière: un coeur à coeur qui nous donne assez de confiance en l’Amour reçu pour arrêter de nous mentir, afin que la «  Vérite nous rende libre » (Jean 8,32). C’est le message du film et il ne vaut pas que pour les ex-toxicomanes. Nous vivons tous des dépendances, qui nous coupent des sources de la Vie et de la Joie. 
 
Pour info: Soeur Elvira et le Cenacolo
Rita Agnese Petrozzi, connue sous le nom de Sœur Elvira est née en Italie en 1937. Religieuse de la charité de Sainte Jeanne-Antide Thouret, elle voit son désir grandir de fonder une œuvre pour les jeunes désespérés en recherche du sens de leur vie. Durant de longues années, ses supérieures lui demandent de renoncer à ce projet, pour lequel elle n’a pas de compétence. Dans la confiance et l’obéissance, elle obtient finalement leur permission, en 1983, de commencer son projet : le Cenacolo est né. Les premiers accueillis au Cenacolo sont de jeunes toxicomanes, affamés d’autre chose. Sœur Elvira se souvient : « C’étaient des jeunes avec des yeux éteints et avec la mort dans le cœur, qui me demandaient non des médicaments, mais la joie de vivre ! » Sœur Elvira consciente « qu’une thérapie uniquement humaine n’aurait pas rassasié leur cœur », décide de recourir à la prière pour raviver en eux l’espérance. Malgré les premiers pas incertains et les erreurs inévitables, elle ne baisse pas les bras, intimement convaincue que «  les œuvres de Dieu naissent dans le silence et ne font pas de bruit ». Le 15 juin 2015 , le Cardinal Stanislaw Rylko, Président du Conseil Pontifical pour les Laïcs, a signé le décret de reconnaissance définitif du Cenacolo comme Association Privée Internationale de Fidèles. Source: http://www.comunitacenacolo.it/fr/
 

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