Passe le message à ton voisin

Nous connaissons tous la symbolique des courses-relais : il s’agit de saisir le témoin du coureur précédant et de le porter au suivant. L’effort individuel est indispensable, mais il n’y a de résultat que collectif. Ce genre de course exprime fort bien ce que veut dire « transmettre » un quelconque héritage, que ce soit un savoir, une éducation, une identité nationale, une révélation religieuse,… En ce jour de grève des enseignants de la Communauté Wallonie-Bruxelles (et sans prendre position sur leur démarche syndicale), comment ne pas saluer le beau et ingrat travail de transmission éducative de tant de profs ? Ils se démènent, en effet, dans un univers scolaire sous-financé et font face à une jeunesse qui soufre de la fragilisation des familles.
« Transmettre » est un des défis fondateurs de toute civilisation. Pour illustrer cela, deux exemples personnels et récents me viennent à l’esprit : Le premier concerne la bibliothèque du Séminaire Saint-Paul de Louvain-la-Neuve. Les séminaristes francophones de Belgique étant désormais regroupés à Namur, se posait la question de l’avenir de l’importante bibliothèque du Séminaire de Louvain-la-Neuve. Avec l’aide de l’œuvre pontificale missionnaire, il fut décidé de l’envoyer en République Démocratique du Congo, afin que ces livres alimentent les séminaires locaux. Les rayons ont donc été vidés et mis en caisse. Hier matin, une chaine de bénévoles s’est formée pour les charger à bord d’un camion qui les conduirait au port d’Anvers. En voyant toutes ces caisses passer de main en main – vivante parabole de la transmission – je me disais que tout ce savoir théologique ne serait pas perdu, mais transmis vers le jeune continent. Et même si j’avais un pincement au cœur, la pensée que ces livres serviraient encore à la formation de futurs prêtres fut ma consolation. Toute réalité sur terre est mortelle – en ce compris les séminaires – mais ce qui finit d’un côté peut devenir fécond ailleurs. Alors, bon vent les livres. Portez avec vous le souffle de l’Esprit et transmettez les semences d’Evangile.
Autre exemple, je me trouvais ce midi au Parlement belge, où se réunissait le « Belgian Women of Faith Network », une association de femmes croyantes de toutes religions. La séance solennelle se déroulait en présence de la Ministre Milquet et des principaux responsables religieux du pays, dont Mgr Léonard. Eh bien, je fus impressionné. Pas de syncrétisme ou de bavardage stérile. Non, simplement le témoignage de femmes qui ancrent leur vie dans la foi et témoignent de ce que cela implique pour elles dans un monde qui reste – quoi qu’on en dise – très masculin. Je pense que ces dames évitent mieux que nous les hommes les pièges de ce genre de rencontre, où il est aisé de se parler longuement pour ne rien se dire. La raison en est que, parce qu’elle porte la vie en elle, la femme possède un plus puissant « instinct de transmission ». Ainsi, ce midi au Parlement, il ne fut pas question de grands accords théologiques ou vastes élans philanthropiques. Il s’agissait simplement de témoigner de la fécondité de son héritage religieux et du défi qu’il y a à le transmettre par petits pas, en évitant que le fils de l’une devienne un jour le bourreau du fils de l’autre. Je ne me suis pas ennuyé. Bien au contraire, cette rencontre m’a nourri. Elle fit œuvre de transmission.

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